Chapitre 8: Après la guerre (Franck)

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Huit ans ont passé depuis le débarquement de Provence d'Août 1944.
Nous sommes en mi-Septembre 1952, et la guerre vient de se terminer par une bombe nucléaire sur Berlin.
Les allemands ont réussi à faire capituler l'URSS et à faire revenir toutes ses troupes à l'Ouest pour contrer les forces alliées présentes en France et en Italie. La guerre a duré bien plus longtemps que prévu, les pertes sont lourdes :
Une grande partie des villes d'Allemagne, du Benelux et du Nord de la France ont été rasées, à la fois sous les bombes Nazies et américaines.
Deux bombes nucléaires américaines envoyées sur Nagasaki et Hiroshima ont fait capituler le Japon en  Septembre 1945.
Les scientifiques de l'Axe ayant récupérés les plans de l'arme dévastatrice firent exploser une bombe atomique sur Londres, et une autre sur Grenoble, quartier général de l'US army.
Finalement, des bombardiers anglais larguèrent une ultime ogive sur Berlin pour faire capituler le III ème Reich. La deuxième guerre mondiale fut au final une guerre nucléaire, dont sortirent «vainqueurs», les USA et ses alliés, désormais insignifiants.

Et moi, Franck Holster, ai vécu cet abominable affrontement en tant que petit soldat remplaçable. Mais l'espoir fait vivre, et aujourd'hui, je rentre enfin rejoindre ma Laure à Thonon-les-Bains, en Haute-Savoie.
Chaque jour ne passait pas sans que je ne pense à elle, et j'attendais ce moment avec beaucoup trop d'impatience.
J'allais aussi rejoindre ce bon sergent Karl Moxcon, resté à l'arrière du front à cause de ses blessures trop graves pour lui permettre de continuer le combat. J'allais tout compte fait retrouver mon seul ami et la femme que j'aimais depuis trop longtemps pour l'abandonner de nouveau.

Je redécouvris la fabuleuse région où je m'étais reposé durant quelques semaines avec beaucoup d'euphorie. Rien n'avait changé, ou presque...

Je claquai la porte du camion militaire, et je pris le chemin en direction des thermes. La guerre n'avait pas touché à ce petit coin de paradis, qui malgré l'Automne était toujours très accueillant.
Après de longues minutes de marche, je retrouvai enfin l'hôpital où devait encore travailler Laure: rien n'avait bougé. Le mobilier était resté à sa place durant plusieurs années, seul le plafond avait été refait, ce qui donnait au vieux bâtiment, un vent de renouveau.
Puis sans prévenir:
- Hééééé... mais je vous reconnaît vous !? Poussa une voix grave et agressive.
Je fis volte-face, et j'aperçus, dans l'ombre, la silhouette de l'horrible médecin.
- Bonsoir doc ! Lui répondis-je doucement, mais avec bonne humeur.
- Mon petit Franck, ha ha ! Vous êtes revenu me voir, n'est ce pas ? Demanda-t-il, à la fois réjoui et méfiant.
Son horrible tête sortit de l'obscurité et m'exposa ses affreuses rides et yeux gris déprimant. Ses doigts sales et boudinés se tendirent vers moi, pour me serrer la main, ce que je fis avec dégoût...
- A vrai dire, commençais-je à m' expliquer, je suis venu pour Laure. Vous savez, la jeune infirmière blonde et rayonnante qui m'avait soigné lorsque que j'étais ici.
Il fit quelques pas de recul, comme pour montrer sa déception et se tourna vers la fenêtre du grand escalier.
- Laure dites-vous... Laure... il hésita longuement à avouer ce qu'il savait, mais finit par dire, Oui ! Je me rappelle d'une Laure. Une fille devenue fort sympathique depuis votre départ. Je me remémore ce souvenir que j'ai de vos adieux, où vous lui avouez vos sentiments et vous vous embrassez durant fort longtemps... quels liens puissants forment l'amour ! Annonce-t-il finalement en prolongeant la dernière syllabe.
- Oui c'est vrai, je pense à ce baiser depuis mon départ... mais venons en au faits. Savez-vous ou je pourrais la trouver ?
Il me fixa durement avec un regard de pitié dans ses yeux, puis annonça finalement en ricanant:
- Bien sûr que je sais où la trouver... elle a démissionné pour s'occuper personnellement de Mr Moxcon, votre compagnon d'armes. Ils sont partis vivre dans une immense villa, non loin d'ici. Vous la trouverez sur les bords du lac, à côté du château de Ripailles.
Il me fit un large sourire forcé en montrant ses dents jaunes et tordues puis termina par:
- Qu'attendez-vous amerloque ?! Allez la rejoindre... courrez ! Cria-t-il en me faisant un clin d'œil.
- Je...heu... je vous remercie beaucoup toubib ! Je vous souhaite une bonne fin de soirée. Dis-je pour clôturer la conversation.
Je refis demi-tour et je me précipitai vers la sortie, prêt à rejoindre le soleil de mon cœur !
Le vieux médecin, déjà âgé de plus d'une soixantaine d'années m'observa par la grande baie vitrée et chuchota pour lui même:
- Si il savait ce qui l'attend ! L'idiot... j'espère juste que la guerre ne l'a pas rendu incontrôlable et violent.»
Puis il se mit à hurler de rire, réveillant alors tous ses patients, tentant tant bien que mal, de trouver du repos.

Encore une fois, je me ruai vers cette femme qui me rendait follement heureux durant un coucher de soleil d'Automne. Néanmoins, ce spectacle était de plus en plus caché par les nuages noirs et épais, et le brouillard du vieux lac Léman, au fur et à mesure de ma progression dans la ville. Les passants étaient les mêmes, mais leurs pensées, changées par la guerre n'éprouvait plus la même chose.

Puisse l'orage ne pas éclater avant que j'arrive à destination !

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