L'Hirondelle

10 MINUTES

C'est au moins la quinzième fois, sans exagérer, que j'essaye d'appeler Irina. Quel con putain. J'ai tout fait foirer comme d'habitude. La brune que j'ai ramenée hier avec moi sort à peine de la douche et vient s'asseoir à mes côtés. C'est même pas mon genre de faire ça, j'sais pas, j'avais besoin de me prouver que j'aimais pas Irina, que j'étais plus fort que ça. Je jette mon téléphone puis me lève du lit afin de prendre ma douche, je demande gentiment à la femme à mes côtés de rentrer chez elle. Elle laisse son numéro sur un morceau de papier qui traîne, j'en ai rien à foutre. Il faut que j'aille voir Lucas. Il faut que je lui demande comment elle allait, si elle m'a vu partir avec une autre. Il sait comment s'y prendre avec moi Lucas.

"- J'ai couché avec Irina, Foda." répète Lucas

Et c'est tout ce qu'il a eu le temps de me dire. Je lui ai tourné le dos puis j'ai claqué la porte, le laissant là, debout au milieu de son salon, sa clope à la bouche. J'ai la rage et je sais même pas pourquoi, après tout j'ai fait pareil, après tout y avait rien entre elle et moi. 

Le volant entre mes mains réussit à apaiser ma colère, les fenêtre de ma voiture sont grandes ouvertes et la vitesse se fait ressentir à travers tout mon corps. Là je suis vraiment bien. Je sais pas réellement où je vais. Chez elle ? Chez moi ? Je roule jusqu'à une rue que je ne reconnais que vaguement, j'aperçois la rue dans laquelle elle avait pris une photo de moi. Je continue tout droit jusqu'à tomber devant un grand immeuble marqué par les années. Est-ce vraiment ici ? Je descends de ma voiture peu sûr de moi et cherche un nom me paraissant familier à l'interphone.   3 sonneries après un bruit retentit me faisant signe que la porte est ouverte. Je monte les escaliers quatre à quatre et me dirige vers la seule porte entrouverte. Irina est assise sur le sol et écoute une musique dont je reconnais les paroles tout en fredonant l'air, Galatée. Sans m'adresser un regard la petite femme passe devant moi pour fermer la porte.

"- Écoute Irina, je sais pas pourquoi j'ai fait ça je m'excuse si ça t'a blessée." avouais-je à demi mot.

Son regard croise le mien pour la première fois depuis que je suis arrivé. 

"- J'en ai rien à foutre de tes excuses Théo. Toi et moi on était rien."

Son ton est tranchant. Sa voix tremble et elle joue nerveusement avec ses mains tout en me regardant. Elle doit se demander pourquoi je reste. C'est vrai ça, pourquoi je reste ?

Je ne sais pas si elle dit ça parce qu'elle est en colère ou si elle le pense sincèrement. Dans tous les cas je suis assez blessé dans mon égo pour rester une minute de plus dans cet appart. Je lui lance un dernier regard et puis prend le chemin inverse. Une fois dehors je sens la chaleur de l'été qui m'étouffe. J'ai besoin d'air et de réfléchir.

IRINA

"- J'étais une erreur ou tu réponds pas au téléphone parce que celui ci s'est fait rouler dessus par un tank?"

"- Je t'en prie Lucas entre, c'est pire qu'un moulin ici, et ça me dérange absolument pas, c'est pas comme si j'avais l'air anéantie et encore complètement pétée !" lançais-je de manière sarcastique 

Le -très- grand brun debout en face de moi me regarde avec un sourire scotché sur le visage. Il attrape la cigarette qui se tenait entre mes doigts depuis tout à l'heure et la porte à sa bouche, je ne réagis pas contrairement à ce qu'il aurait pensé, et me dirige lentement vers mon canapé. Je prends soin de m'affaler dessus avec la grâce d'un éléphant de mer. Je suis vite rejoint et suis donc obligée de m'assoir à peu près correctement pour laisser de la place à mon invité qui s'est en fait lui-même invité. Il fume silencieusement en fixant la télé sans vraiment la regarder. Je ne la regarde pas non plus pour dire vrai, je pense à hier.