Chapitre 4

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  Cette joute verbale devint hebdomadaire, et peu peu diminuait le venin au sein de ces mots, séchant avec le temps. C'était empreint de taquinerie que ces mots étaient prononcés dans l'impénétrable bibliothèque. Elizabeth se trouvait de plus en plus présente au sein du manoir, pour l'on ne sait quel raison : il se murmurait qu'elle avait subit un douloureux chagrin d'amour au sein de la cour, et qu'elle était revenue se réfugier ; d'autres affirmaient savoir de sources fiables que l'on tentait d'attenter à sa vie en ville, et qu'elle était donc assigné à résidence par son père en personne. En tout cas, tout ce que je possédais comme information pour ma part, c'est que tous avait tord, ce qui ne m'était pas d'une grande utilité. Mais bon, ce n'était à peine que le cadet de mes soucis, et je préférais m'adonner à ce petit plaisir en toute innocence. C'est d'ailleurs cette innocence et cette absence totale de curiosité qui accéléra les évènements d'une façon assez brutale, et qui redonna un peu de vie à l'histoire.

  Ce fut un de ces énièmes soirs où retentissent la joviale ambiance qui rôde autour d'un repas. Ces tintements de verres, ces rires retentissants et ces voraces appétits qui animent un foyer au coeur de l'hiver. Toujours les mêmes acteurs attablés, entre les domestiques, Elizabeth, Aaron et moi. Mais l'on se suffit à nous mêmes, et rien ne semble manquer à première vue. Touts sourires, la tristesse n'a plus sa place sur nos masques. Tous joyeux, le désespoir n'est plus sur notre déguisement. On range les envies, les désirs secrets, et on profite de ce petit moment de chaleur qui sauve du mordant froid. On apprécie, et ça devrait suffire pour passer une nouvelle nuit.
  La porte s'ouvre. Aussi brutalement que cette phrase. Elle claque contre le mur, dissipant le brouhaha du repas. Quelqu'un entre à la suite du courant d'air. Trois personnes en vérité, mais ça, personne ne pouvait l'apercevoir sur l'instant. Enroulé dans des chaud manteaux de fourrures, aucun salut, aucun mot. Juste une présence, qui pourrait être naturel si leur visage n'était pas caché par l'ombre. Ils ferment la porte, bien conscient du froid qui vient déranger la chaleur que nous avions réussi à instaurer. Ils retirent leurs manteaux, et toutes sorte de vêtements les protégeants du froid. Les silhouettes les plus mûrs me paraissent familières, mais je me retrouve incapable de les nommer. Tandis qu'en face de moi, Elizabeth en a le souffle coupé. Les domestiques se relèvent tous dans un même geste, et l'ambiance retombe. Le dirigeant de la maisonnée recueille les affaires des intrus, en chuchotant des mots inaudibles.
  Tous sont levés autour de moi, hormis Elizabeth. Elle parut des plus contrariés à la vue des ces étrangers, qui adressent des ordres à chacun des domestiques. Seul une personne reste dans l'ombre, toisant la scène. Impossible d'apercevoir son visage, et cela m'importe peu en fait. Le soudain hurlement de ma voisine happant mon attention me détourne de cette curieuse personne. Peut-être l'approche des intrus, grand sourire dégainés, l'a t'elle enfin permis de faire jaillir sa surprise sous sa forme la plus stridente. La femme me jette un regard, ce qui renforce le sentiment de connaissance, mais elle ne fait que jeter, car je n'obtiens aucune parole de sa part.
  -Alors tu n'es point contente ?
-Je devrais être heureuse de votre irruption ? Il me semble que vous aviez une parole, n'est-ce pas ?
-Ainsi les parents sont ils accueillis, sous les glapissements de leur propre fille...
-Et ainsi regagnèrent-ils la sortie, sous ces mêmes glapissements...
-Elizabeth... Tu es pleinement consciente que seul notre décès pourrait nous empêcher de faire irruption dans nos propres demeures...
  Peu à peu, les souvenirs revinrent... C'est vrai que cela faisait longtemps que les hôtes n'étaient pas revenus dans leur manoir... J'avais au le temps de scruter les traits de la femme tandis que son mari parlait... Les cheveux grisés par l'âge, le teint blessés par le temps, mais toujours ses yeux de chasseuse qui feraient fuir le plus aguerrie des rois de la jungle. Par contre, l'homme paraissait toujours aussi jeune. C'est vrai que je ne l'avais aperçu que très brièvement, lors ces petites réunions entre amis qui faisait la fierté de mon éducation. Il semblait moins dur que son épouse, mais entièrement soumis aux décisions de sa « chère ami ». Elle s'empressa d'ailleurs de prendre la parole, de sa voix suave et infiniment exécrable.
-Nous sommes ici chez nous, à ce que je sache. Et ce n'est pas toi qui arrivera à nous chasser de notre propre propriété.
-Mère, je ne souhaite pas vous chasser. Juste que vous vous accrochez à votre honneur, ce qui ne semble pas être le cas...
-Peu importe... souffle-t-elle.
-Oui, nous allons passer quelques jours ici. rattrape son mari. Nous avons certains sujet qui requièrent que nous nous entretenions.

JackOù les histoires vivent. Découvrez maintenant