Narcissus mortem

Cinquième acte: Calendula

- Ils sont trois. A environ 1500 mètres. Cracha la radio aux deux chasseurs.

Les abres de la clairière étaient secoués par la tempête. Le bruit du craquement sec des branches semblait résonner, malgré le vent qui mugissait. La pluie, froide et cinglante, tombait. Aucune étoile n'était visible. La colère du temps aurait dû interdir à quiquonque de chasser ou ne serait-ce que de se trouver dans la forêt.

Les deux chasseurs tentaient de patienter comme ils le pouvaient, dans les branches larges et hautes d'un chêne, leur cabane spacieuse en acier et en tissu les surplombant de huit bons mètres, les nargant de sa chaleur et de son calme. Les deux, un homme et une femme, se tenaient à cinq mètres de l'humus humide, leurs fusils à l'épaule, leurs lunettes de tir misent. La radio était à l'intersection de deux branches, fiérement droite. Le couple portait un uniforme couleur militaire, avec un casque fin en cas de chute. Les deux étaient armés d'un jeu de trois couteaux à la ceinture. Une plaque ornée d'un renard stylisé luisant dans la pénombre à leur poitrine.

- Eh bah, si on m'avait prévenu, j'aurais prit une petite laine. fit l'homme

- La ferme, David. rétorqua sa compagne. On est en mission. Ces saloperies ne reculerons devant rien!

- A part nos balles.

Les deux fixaient droit devant eux, la clairière. Bientôt, des cris purent être entendus. Inhumains, monstrueux. On eût dit une bête infâme à l'agonie.

- Rectification, ils nous ont bernés, ils sont six à 750 mètres.

La femme prit la radio et appuya sur un bouton.

-On le sait, on en entend plus que deux.

- Gaffez-vous, agents. Ils y a le risque qu'ils soient encore plus nombreux.

Comme pour lui donner raison, les cris devinrent plus soutenus, plus forts.

-Vous allez rire, agents. Il viennent de passer le lieu de comptage et la caméra infrarouge en a compté vingt-et-un.

- Nous faire rire?! Ce n'est pas une simple attaque... Il y a eu des dégâts au périmètre de sécurité Delta-1?

- Non. fit la radio. Les grilles renforcées sont toujours intactes.

La femme, après s'être tue un moment, prit alors la parole.

- J'ai un visuel. Six dans la clairière.

Effectivement, se confondant avec les ténèbres, des silhouettes remontaient le long de la trouée. L'homme visa soigneusement et tira six coups rapides. Plus aucun mouvement n'était visible dans les hautes herbes.

- Le compte en est où?

- Je ne sais pas, il y a comme un bruit de friture sur la ligne. fit la femme.

Soudainement, un long râle se fit entendre. Ce ne fut plus une dizaine, ni une vigntaine, mes des centaines de silouhettes qui se mirent à arpenter les hautes herbes.

- Ils.... Delta-1..... Confinement spécial..... restez en sécurité.... la radio tentait de les informer mais voilà, un autre bruit couvrit alors les autres, un sifflement aigu, comme celui d'un serpent.

- La faille.... LA PUTAIN DE FAILLE....

-Davide, garde ton calme, ils vont nous entendre....

- Ce putain de sifflement a été entendu quand la faille a été ouverte! Un événement Delta-A serait en train de se produire?!

- Mais non ils ne seront jamais...

Elle fut interrompue par un grondement sourd, comme si la roche se déchirait au passage des créatures de l'Enfer. Les arbres devant les agents craquèrent et tombèrent, libérant une longue trouée, noyée de silhouettes sombres. Au fond, drapé de brume noire, quelque chose d'immense approchait. Le vent semblait avoir prit plus d'ampleur, la pluie tombait plus fort.

Les silouhettes sombres avaient vu le couple dans l'arbre. Elles s'employaient à y monter, malgré les tirs des deux humains.

- PUTAIN, PUTAIN, PUTAIN! ON EST MORTS!

-LA FERME DAVID, J'AI DIT

L'une des bête sembla tomber mais elle feinta et remonta prestement sur l'arbre, saisi la jambe du dénommé David et se hissa sur son torse.

Elle était squelettique, mais musclée. De longues griffes aux pattes, de longs crocs luisants et son regard de braise aurait fait peur à l'homme le plus courageux, mais pas à la femme la plus courageuse.

La compagne de l'infortuné, rapide comme une tarentule sur sa victime, saisit la bête au coup et la jeta dans le flot de ses semblables. Malheureusement pour lui, l'homme fut déséqulibré et fut aussi entraîné. Bientôt, un geiser de sang et de chair jaillit du torrent vivant.

La femme, sachant que si elle restait dans l'arbre, verrait sa vie terminée par un glât prématuré, monta prestement vers la cabane de tissu et prit l'unique machette. Elle jaugea ce sur quoi elle pouvait sauter puis comprit qu'une créateur blessée en ferait une de moins. Elle sauta, bottes en avant, visant la tête d'une créature, qui poussa un râle en se brisant la nuque. L'agent reprit son souffle et fuya, évitant les bêtes. Mais elle fut fauchée dans son élan par l'une d'entre elle, encore maculée du sang de son compagnon. Elle sembla sourire à sa victime, qui priait pour que le glât tombe vite. La bête arracha un bras de la femme, le jeta aux autres et mordit dans l'abdomen de sa victime. La douleur sourde du membre arraché et des crocs taillant ses viscères arracha un cri à l'agent, qui se termina par une décapitation infâme par une patte musclée.

[Extrait d'un quotidien quelquonque]

On a retrouvé deux morts près de la clairière des vents, dans la forêt de [illisible]. Ils semblerait qu'ils aient subi de lourds dégâts par la chute d'un arbre.