L'apogée

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- Liquid-2 ici Humanity, veuillez-vous authentifier pour la phase d'amarrage.

Un agent glissa parmi le tumulte de la salle de contrôle.

- La quarantaine est-elle prête ? Demanda-t-il.

- Ne vous inquiétez pas, j'ai tout à fait conscience des risques liés à cette mission retour.

- Je pense au contraire que vous n'avez pas bien saisi la gravité du problème !

- Je me contrefiche éperdument de votre avis, répondit sèchement le commandant.

- Quoi !? s'offusqua l'agent. Vous n'avez même pas idée de ce qui s'est passé sur Encelade. Malgré mes messages, l'équipe entière est probablement décimée depuis longtemps. Ce vaisseau ne doit pas s'amarrer à la station tant que nous savons pas ce qui s'est réellement produit sur Cold Point. L'objectif initial était de le neutraliser avant l'amarrage !

- La quarantaine est prête et votre agitation ne me permet pas de garantir une phase d'approche sécurisée. Laissez-moi faire mon travail.

- Commandant, regardez !

Une petite voix s'était élevée au milieu de toute l'agitation.

Devant eux un éclat brillant et rougeoyant s'élargissait immanquablement sur le vide spatial, illuminant la cabine de contrôle toute entière. L'anneau du souffle de l'explosion s'agrandit progressivement pour finir par toucher la piste. La capsule venait de se pulvériser, emportant avec elle une partie du hangar d'arrivée des vaisseaux.

Puis, telles des dominos, les passerelles et plateformes explosèrent les unes après les autres dans un silence apocalyptique que seul l'espace pouvait délivrer.

- Bon sang lancez les boucliers d'urgence ! Aboya le commandant.

L'onde balaya en une fraction de seconde la salle de contrôle.

*****

- L'accident d'hier est fort regrettable.

Le ton n'avait rien de cordial, l'Archonte était connu pour sa fureur. Diriger une super-agglomération humaine ne lui permettait pas d'être transigeant.

- Mon seigneur, les sous-niveaux sont désormais hors d'atteinte. Quant aux réparations, nous pensons pouvoir relancer la gestion de l'astroport sous 3 jours.

La colère se lisait clairement dans ses yeux. Il se tourna, joignit ses mains dans son dos, observa l'espace infini à travers l'immense baie de la salle du conseil. Puis il ajouta :

- La structure principale a-t-elle été fragilisée ?

- Oui partiellement. Les axes horizontaux des supports ont légèrement été inclinés, créant un point de rupture sur le secteur 7.

- Un point de rupture ?

Le front du petit homme perlait. Les autres conseillers baissaient le regard, feintant l'ignorance.

- Approche... Dit-il en appuyant son ordre d'un geste de la main. Sais-tu autre chose que j'ignore ?

Le conseiller s'avança la peur au ventre et le pas mal assuré. Il émit ces derniers mots en gémissant littéralement comme un enfant :

- Humanity est condamnée... Quand le secteur 7 s'effondrera sur lui-même, la station se disloquera, très peu d'entre nous survivront...

Une ambiance pesante emplissait la grande salle.

- C'est tout ?

Les yeux de l'Archonte semblaient changer d'aspect, ils étaient comme animés par les flammes.

- Quelqu'un est entré dans le système de gestion des colonies..., dit un autre. Au moment où nous parlons nous avons perdu le contact avec la totalité d'entre elles... Tous les générateurs principaux d'oxygène et les systèmes autonomes analogues sont interrompus. C'est l'unique et dernière information que nous ayons reçue. Les plus petites tiendront quelques heures, les plus grandes quelques jours tout au plus...

L'Archonte se tourna de nouveau vers l'espace étoilé. Un murmure parcourut l'assemblée. Tous le fixaient dans l'attente d'une quelconque explication.

- Chaque instant n'est que le renouveau du précédent. Une nouvelle ère s'érigera sur l'ancienne, balayant l'existence humaine et son destin d'un revers de la main, expliqua-t-il. Humanity, Humanity... Une si somptueuse merveille architecturale, gracieuse et éternelle. Un grain de poussière dans les rouages d'une civilisation et c'est le monde qui perd pied.

L'assistance, pétrifiée, ne pouvait qu'assister à l'inévitable. Des grondements lointains se firent entendre. Quelques ondes oscillaient à la surface des liquides contenus dans les verres. Divers objets se déplaçaient en vibrant.

Le seigneur changea de position pour se diriger au cœur de la salle. Des conseillers amassaient leurs affaires précipitamment, d'autres s'étaient déjà éclipsés sans demander leur reste. Il ouvrit majestueusement les bras en s'adressant à eux, un rictus démoniaque en travers du visage :

- Quelle triste fin vous ne trouvez pas ?

L'apogée d'un règneOù les histoires vivent. Découvrez maintenant