Chapitre 4 // Monica

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Je tirai sur ma queue de cheval, puis réajustai nerveusement mes lunettes sur mon nez, avant d'étirer le bras pour frapper deux coups distincts à la porte.

"Alexis?" m'enquis-je d'une voix ridiculement chantante, et je dus me mordre la lèvre, réprimant l'envie de me gifler pour la niaiserie du ton que j'avais involontairement employé.

J'entendis des bruits de pas, et la porte s'ouvrit sur le visage interrogateur d'Alexis. Ses sourcils bruns étaient froncés, comme ses yeux verts découvraient mon visage avec surprise. À la façon dont son regard dévorait mes traits, je sentis mon estomac se nouer.

"Monica?" souffla-t-il, sa main fouillant distraitement sa chevelure immaculée, et je remarquai qu'il était légèrement hors d'haleine, son torse se soulevant au rythme de sa respiration irrégulière. "Qu'est-ce qu'il y a?"

Mon regard se réfugia immédiatement sur mes pieds, que je contemplai comme si mes chaussettes roses avaient été la chose la plus intéressante au monde. "Je... Euh... Je voulais juste voir si tout allait bien," balbutiai-je maladroitement, et à cet instant j'aurais tout donné pour que la terre m'avale. Je me sentais ridicule et stupide.

"C'est gentil, Monica," résonna la voix d'Alexis, et je n'osais plus lever les yeux pour affronter son regard. J'avais chaud aux oreilles, et je commençais à regretter de m'être fait une queue de cheval : elles devaient être cramoisies, de quoi me faire passer pour une écrevisse. "Tout va très bien."

J'essuyai nerveusement mes mains moites sur ma robe. "Génial," m'écriai-je d'une voix suraiguë. Mon dieu, il fallait cesser ce massacre. Je devais trouver un moyen de décamper, et vite.

"Alex? C'est qui?"

Une voix inconnue s'éleva derrière Alexis, me faisant immédiatement lever les yeux : Alexis s'était tourné vers une grande brune qui avançait vers nous en balançant les hanches. Elle posa sa main sur son épaule, et m'adressa un sourire chaleureux. Mais je ne lui répondis pas, restant là, à la contempler d'un air incrédule.

"Bonjour," me dit-elle d'une voix profonde, une voix magnifique. Aussi magnifique qu'elle. Parce qu'elle était sublime, la salope.

De longs cheveux noirs et lisses reposaient tranquillement sur le bustier de sa longue robe à fleurs, qui soulignait bien les pleins et les déliés de son corps de déesse. Elle avait un visage plutôt rond, des lèvres pulpeuses, et des yeux en amande. Elle avait sûrement des racines asiatiques, et le mélange était tout simplement éblouissant.

"Estelle, je te présente Monica, ma demi-soeur," annonça calmement Alexis. Je vis au regard qu'ils échangèrent qu'ils partageaient une véritable complicité, et je ressentis un pincement au coeur.

"Enchantée, Monica," me dit la fille, et son sourire s'élargit. "Je suis Estelle, une amie d'Alexis."

Je ne savais que trop bien ce que voulait dire le mot "amie" dans cette phrase de présentation. J'avais rencontré un bon nombre des "amies" d'Oliver, comme elles déambulaient à moitié nues dans la maison. La jalousie me prit à la gorge, mais je m'efforçai de sourire et je serrai la main chaude qu'elle me tendait.

"Bon," grogna Alexis, "ce n'est pas tout, mais Estelle et moi avons du travail."

Estelle acquiesça, et je me reculai, muette. Évidemment, je voyais bien de quel genre de travail il parlait ! Voilà qui expliquait pourquoi il avait pris du temps à ouvrir, et pourquoi il s'était présenté à moi décoiffé et hors d'haleine. Je les avais interrompus en plein acte.

"Je... Je vois," marmonnai-je, en me tordant nerveusement les mains. "Je ne vais pas vous déranger plus longtemps, alors."

"Super. À toute à l'heure, Monica," me dit Alexis, et j'eus à peine le temps de relever la tête et d'apercevoir ses traits angéliques que la porte se refermait d'un coup, m'obstruant la vue. Je restai sur le pas de la porte, complètement désemparée, pendant quelques minutes. L'idée de coller mon oreille contre le bois pour essayer de confirmer ma théorie me traversa l'esprit, mais le peu de dignité qu'il me restait me poussa à m'en aller sans demander mon reste.

Je déambulai dans les couloirs comme un fantôme, et lorsque je débouchai sur le salon, j'y trouvai mes deux frères. Bryan était allongé sur le canapé, les yeux rivés sur l'écran de son portable, tandis qu'Oliver faisait les cent pas dans la pièce, la mine sombre.

"Momo," s'exclama Oli, dont le visage s'illumina lorsqu'il m'apperçut, "t'étais où?"

Je poussai les jambes de Bryan et me laissai lourdement tomber sur les coussins moelleux. "En enfer," grommelai-je, et je vis, en face de moi, Bryan lever les yeux de son téléphone, en se pinçant les lèvres d'un air curieux.

Oli haussa les épaules. "Au fait, la fangirl, ça te dérangerait d'aller chercher Alexis? Papa a une surprise pour lui," bougonna-t-il, et je me redressai brusquement.

"Ah, non !" m'écriai-je, horrifiée. "C'est hors de question ! J'y retourne pas !" Il me dévisagea avec surprise, et je baissai les yeux. "Il est occupé... Si tu vois ce que je veux dire," marmonnai-je sans le regarder.

Oli leva un sourcil, et, à côté de moi, Bryan lâcha complètement son téléphone.

"De quoi?" grogna mon grand-frère.

Je secouai la tête. "Il est avec une fille," leur annonçai-je d'une voix sourde.

Je vis littéralement sa mâchoire se décrocher. "Bah dis donc," grommela-t-il, "il a été rapide." Puis il reprit, d'une voix plus forte : "Tu... Tu les a vus?"

J'hochai la tête.

"Ça alors," lâcha Bryan d'un air franchement amusé, et je lui jetai un regard surpris : il n'était pas du genre à s'intéresser à ce qui l'entourait.

"Oh, le petit con," s'exclama joyeusement Oli, les yeux rieurs. Mais qu'est-ce qui les amusait autant? "Il est plus puceau !" Il lâcha un petit rire, et se tourna de nouveau vers moi pour me demander en souriant : "Elle était jolie, au moins?"

Je pinçai les lèvres. "Non. Dégueulasse."

Oli rit à nouveau. "Bien sûr, avec sa petite b..."

"Alors, il est où Alexis?" l'interrompit la voix tonitruante de Papa. "Oliver, je t'avais dit d'aller le chercher !"

"Oui, c'est bon, j'y vais," grommela Oliver en se relevant de mauvaise grâce de la chaise où il s'était écroulé de rire. Je lui soufflai un "bonne chance", auquel il répondit par un beau doigt d'honneur.

"Allez !" le pressa-t-il. "Et vous," ajouta-t-il en se tournant vers Bryan et moi, "allez lire des livres et vous cultiver plutôt que de traîner sur le sofa comme des baleines !"

Je me mis à glousser et m'enfonçai encore plus profondément dans le canapé, sous le regard désespéré de mon paternel. Bryan avait ressorti son téléphone. Je restai allongée ainsi à réfléchir pendant quelques minutes, jusqu'à ce qu'Oliver reparaisse, suivi d'Alexis et de sa bombasse. Bryan étouffa un petit rire, et j'allais faire une remarque, quand Oliver me saisit par le bras pour me glisser à l'oreille :

"Dis donc, toi. Il va sérieusement falloir qu'on revoie ta définition du mot "dégueulasse"."

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