Chapitre 3

4.5K 618 27
                                    

À cette heure de la journée Boubacar profitait pour réviser ses cours en guise de préparation à ses examens. En effet ces derniers devaient se tenir dans moins d'une semaine et il lui fallait donc mettre les bouchées doubles. Le jeune homme était donc à même le sol de la cour familiale une bougie à côté de lui. Et il essayait tant bien que mal de se débrouiller avec cela malgré les faibles lueurs qu'offrait la chandelle.
Quelques fois il se retournait pour observer Yaye Rama qui était concentrée sur la préparation du repas du soir. Et c'est à ce moment précis qu'il retrouvait toute son ardeur et son énergie.

Il la voyait qui chantait tout en tournant et retournant la poudre de mil. Et ce qui l'intriguait c'était la manière avec laquelle elle s'y prenait. Sa mère faisait ses tâches avec tellement de passion. Jamais il n'avait vu Yaye Rama se fâcher ou se plaindre de quoi que ce soit. Au contraire il avait toujours l'impression que pour elle ce travail qu'elle accomplissait était une pure partie de plaisir. Et là il se disait qu'il devait tout faire pour la mettre dans de meilleures conditions. La mère de Boubacar, c'était son socle, sa raison de se battre pour changer le monde. Il aurait donné corps et âme juste pour la rendre heureuse. Mais également pour lui rendre la monnaie de sa pièce bien que cela soit impossible avec tout ce qu'elle avait fait pour lui. Yaye Rama devait obtenir son repos mérité et c'était sa plus grande motivation. Et chaque fois qu'il lui arrivait de discuter avec elle et de lui faire part de ses projets, elle acquiesçait tout simplement se contentant de sourire, le regard lointain. Elle ne manquait également jamais de l'exhorter à ne jamais oublier sa religion et à toujours tout mettre entre les mains de dieu. De même la mère de famille conseillait toujours son unique fils, lui disant de faire garde à tout monde qui ne lui appartenait pas...

Le père de famille par contre n'était pas encore rentré. Et sa petite famille commençait à s'inquiéter car à cette heure il était déjà arrivé se préparant à diriger la prière du soir. Mais le travail qu'il faisait n'était pas de tout repos et Boubacar le savait. Il ne connaissait que trop bien la situation de son père et comment vivait sa famille. Sa résolution première était de changer tout ceci dès qu'il aurait son diplôme. Il savait ce que son père endurait pour joindre les deux bouts à chaque fin du mois. Et en tant qu'aîné et unique fils de son père le jeune homme était conscient qu'il devait prendre la relève. Et c'est ce qui faisait que jamais il ne s'attardait à certaines futilités de la vie. Il n'était intéressé ni par les jeux ni par les préoccupations autres qu'avaient ses amis et compagnons. La seule personne qu'il estimait vraiment de par son comportement était Abdoul. Ce dernier en plus d'être pieux était très instruit. Et Boubacar ne se lassait de discussions avec lui qui finissaient toujours par tirer en longueur. En fait le jeune homme y apprenait toujours quelque chose de nouveau, tantôt c'était la science et son avancée fulgurante ou tantôt c'était l'histoire ou encore la philosophie qui étaient leur principaux sujets de discussion. En classe également il faisait toujours partie des premiers et lui et Boubacar se disputaient la première et la deuxième place des rangs.
Abdoul avait certes un mode de vie plus aisé que Boubacar mais jamais il n'avait laissé apparaître cela. Au contraire le jeune homme était tellement modeste que son ami s'en exclamait.

En fait Abdoul avait un grand frère qui n'habitait plus dans le village. Ce dernier avait son diplôme de baccalauréat il y a de cela quelques années. Et heureusement pour lui il avait obtenu une bourse d'étude à l'étranger grâce à sa mention bien. Et donc le grand frère de Abdoul est allé continuer ses études universitaires hors du pays. Au début la situation dans laquelle vivait la famille Abdoul était des plus précaires. Mais il avait cru en lui et était parvenu à ses fins. Et désormais c'était lui qui entretenait sa famille entière. Il avait même rénové leur maison familiale avec l'argent qu'il leur avait envoyé. La petite maison en briques rouges avait laissé la place à une magnifique demeure à un étage supplémentaire. Mais Abdoul ne s'en vantait jamais tout simplement parce qu'il savait d'où il venait. Et quand il venait à rendre visite à son meilleur ami, ce dernier accourait pour lui chercher un siège où s'assoir. Mais il rigolait toujours ne manquant pas de lui répéter que cela ne le dérangeait point, au contraire il préférait mieux s'assoir à terre plutôt que de se tordre sur un banc.
De plus sa gentillesse était sans égale, il partageait tout avec son meilleur ami même ses fournitures scolaires. Aussi Abdoul avait beaucoup d'affection pour Yaye Rama qui le lui rendait bien. Il raffolait du fameux '' fondé '' qu'elle savait si bien préparer grâce à ses mains habiles. Et chaque jour la mère de famille prenait le soin de lui en garder une part qu'il venait manger dès qu'il terminait ses cours...

Jusqu'au dernier souffleOù les histoires vivent. Découvrez maintenant