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En discutant avec mon père l'autre jour, je me suis rendue compte de quelque chose qui me gêne. Il m'a dit que je donnais l'impression de m'être totalement intégrée au système scolaire et sans aucun problème.
Or l'entrée à l'école a été un traumatisme.
L'autre jour que j'étais chez ma psy, je lui ai parlé de la petite Fuyuko, qui a besoin d'être réconfortée, câlinée, prise dans des bras, qui a besoin d'explications, qui a besoin de poser des questions et d'obtenir des réponses claires.
Elle m'a alors demandé quel âge avait cette petite Fuyuko, et je lui ai répondu. Trois ans.
Quand mon père m'a demandé (quand j'en ai parlé avec lui un ou deux jours après) si je savais pourquoi cette petite avait trois ans. Je lui ai dit :
"Facile, l'entrée à l'école. Là où ça a dérapé."
Oui, ça dérapé, simplement parce j'ai été confrontée aux autres. Confrontée à d'autres cadres de référence que le mien. Confrontée à la manière de réfléchir et d'envisager les choses des autres.
Je me souviens que en petite section de maternelle, je détestais regarder les autres enfants faire des puzzles. Tout simplement parce qu'ils mettaient dix minutes là où j'en prenais trois. C'était insupportable de les regarder galérer pour quelque chose que je trouvais aussi facile.
Et puis, je crois que je me suis toujours ennuyée à l'école. J'ai su lire avant les autres. Je n'avais que deux difficultés, en classe : la confiance en moi et mon perfectionnisme.
Ahlala, le perfectionnisme, si je tenais l'imbécile qui l'a inventé... Bref, c'était compliqué parce que je voulais tout réussir du premier coup, sans erreur. Évidemment que ce n'est pas possible, mais je ne pouvais pas l'admettre, cela me faisais trop peur. Peur de me décevoir (ce qui finissait immanquablement par arriver quand je ratais), peur de décevoir l'enseignant, peur de décevoir mes parents, peur que l'on se moque de moi. Alors quand je ne comprenais pas une consigne, je me mettais à paniquer puis à pleurer. Et là c'est sûr, certains se moquaient :
"Regarde ! Elle pleure ! Pfff", pouffaient-ils.
Oui, ah ah, très drôle... En attendant, cela me blessait énormément.
Et puis, j'ai été obligée de me rendre compte que j'étais différente, qu'il y avait un truc qui clochait. Comment expliquer sinon que j'avais des principes alors que les autres non ? Comment expliquer que ce à quoi ils s'intéressaient en CM2, je m'y étais intéressée en CE2 ?
J'ai un écart de maturité et de lucidité qui me pourris la vie, parce que je dois sans cesse me dire que mon cadre de référence est très peu répandu, et donc que je dois tout revoir selon le cadre de référence des autres. C'est d'un compliqué... En plus, c'est très fatiguant, cela me prend une énergie folle.
Il y une chose que je n'ai jamais comprise : pourquoi, quand je pose une question à un/une prof', je n'obtiens pas de réponse ? Par là, j'entends que soit ils répondent à côté de la question, soit ils ne répondent pas. Je n'arrive pas à saisir. Pourquoi ça m'arrive tout le temps ? Est-ce que je suis si décalée que ça ? Mon cadre de référence est-il si différent ? Je n'en sais rien, en tout cas, depuis longtemps je ne pose presque plus de question. Forcément.
Je n'ai jamais supporté cette prétendue supériorité des professeurs. Par ce prétexte, ils vous doublent dans la file du self en réprimandant les élèves faisant de même. Bonjour la cohérence !
J'avais même un prof en troisième qui mettait des taquets à certains élèves sous le prétexte d'un jeu. Un jeu ! Quand il m'a dit ça, j'ai clairement compris que ce type était un con et qu'en plus, il se payait ma tête avec un grand sourire. J'aurais voulu le lui faire avaler.
Mon collège ressemblait un peu à une prison, il y avait des affiches sur les murs disant :
"Toute personne surprise en train de bousculer une autres aura deux heures de colle."
"Les sucettes et chewing-gum sont interdits sous peine de sanction."
Nan mais sérieusement, on a l'impression d'être des bébés ! C'est vraiment ridicule...
Et puis, ma prof d'histoire-géo de première, elle nous a donné une note de cahier ! Une note de cahier ! Et après elle nous dit que on est grand et qu'on devrait savoir se débrouiller seuls ! Ben voyons ! Encore une fois, la cohérence était partie en vacances...
Ma prof d'histoire-géo de seconde, c'était toute une histoire. Pardon pour le jeu de mot, c'était involontaire. Bref, une fois, elle nous a dit : "Vous vous réveillez un peu ? J'ai l'impression de faire cours à des chiots. Non, en fait ce serait plus agréable."
Elle l'a sorti comme ça, comme si c'était normal de dire quelque chose de cet acabit. Honnêtement, je ne l'ai plus en prof et heureusement, je n'aurais pas pu la supporter plus longtemps... Mais sérieusement, rien que de la croiser dans les couloirs, ça me colle des boutons. J'ai envie de lui gueuler dessus. De me défouler. Elle était partisane du charmant "Faites ce que je dis, pas ce que je fais". Je lui aurais fais manger ses dents si j'étais assez bête pour m'abaisser à son niveau. Mais bon... restons zen, je n'aime pas la violence, physique, verbale ou psychologique.

Je crois qu'il faut que je me calme... Même si l'école est faite de telle manière que c'est forcément destructeur pour certains d'entre nous. À ces personnes-là, je dis courage ! Même si c'est un calvaire, vous pouvez le faire. Je sais que ça ne réconforte en rien, mais, sachez que vous n'êtes pas seuls.
Alors je vous souhaite bonne chance !

Dans l'antre de mon ÊtreOù les histoires vivent. Découvrez maintenant