– Tu ne m'as pas dit que tu étais une Legilimens, murmura Hécate en fronçant les sourcils.
– Je n'ai aucune idée de ce que peut bien être une Legili...chose, répondis-je avec mauvaise humeur.
Derrière nous, à l'autre bout de la pièce, Ode veillait sur Mélie avec tendresse. Dès notre retour, elle s'était empressée de lui administrer la potion de guérison et avait décidé de rester à son chevet jusqu'à son réveil.
Hécate en profita pour faire le point sur la situation.
– Une legilimens est une sorcière capable de lire dans les pensées, expliqua-t-elle d'un air grave. C'est un don très rare, d'autant plus que tu es aussi une louv...
– Chut... intimai-je en risquant un regard en arrière. Ode ignore qui je suis. Tu es la seule à connaître ma véritable nature.
– Oooh, fit-elle, visiblement émue. Je suis touchée par cette marque de confiance, Louna. Être ta confidente est un véritable honneur.
– J'en suis ravie...
Les révélations d'Hécate me laissaient songeuse. Depuis mon départ de Carcasso, je m'étais toujours fiée à mon instinct pour ne pas attirer l'attention sur moi lors de mes passages en ville. Je pensais que c'était la chance qui m'avait permis d'arriver jusqu'ici sans encombre. Mais si cette chance n'était en réalité qu'une manifestation inconsciente de mes pouvoirs ?
Depuis toujours, j'avais su me fier aux bonnes personnes. Je n'avais pas hésité une seconde avant de proposer à Ode et Mélie de m'accompagner. Malgré sa volonté farouche de me faire du mal, je n'avais pas tué Dagmar Mortarion. L'espace d'un instant, je l'avais même vu comme un allié potentiel. Et dès le premier regard, j'avais compris que James Mc Callagan était un homme dont l'hypocrisie n'avait d'égale que la ruse qu'il utilisait pour parvenir à ses fins.
– Au fait, pourquoi avait-il besoin de tes cheveux ? me demanda Hécate.
Je levai les yeux vers mon amie et pus lire une certaine inquiétude sur son visage. Les cheveux d'une personne étaient souvent utilisés dans la confection de certaines potions. Le Polynectar, par exemple, permettait de voler l'apparence de quelqu'un d'autre. Le Traceur, plus facile à faire, permettait de retrouver n'importe qui dans un périmètre réduit. Mais de manière générale, les alchimistes utilisaient les cheveux des sorciers pour annuler les sortilèges ou les enchantements qu'ils avaient lancés.
– Mortarion, soufflai-je avec horreur.
– Quoi ?
Tout semblait plus clair, à présent. Après avoir effacé la mémoire de Dagmar Mortarion avec sa propre baguette, je l'avais jetée au sol avant de prendre la fuite. Or, il suffisait d'une simple incantation pour retrouver le dernier sortilège lancé par une baguette.
– Mortarion a compris que sa mémoire a été effacée, dis-je dans un murmure. Mc Callagan avait besoin de mes cheveux pour lui rendre ses souvenirs.
– Ça n'a pas de sens, répondit Hécate en secouant la tête. Nous ne sommes certainement pas les seules sorcières du coin. Comment pouvait-il savoir que tu es celle qui a lancé le sortilège d'amnésie ?
– Je ne sais pas... avouai-je.
– Et comment pouvait-il savoir que tu viendrais dans son atelier ? reprit-elle en posant une main sur mon épaule. Tu dois oublier Mortarion, nous ne le reverrons sans doute jamais.
– Louna ! Hécate ! Mélie a ouvert les yeux !
Je me retournai sous l'effet de la surprise, et Hécate se précipita aussitôt vers Ode pour la serrer dans ses bras. Elle déposa ensuite un tendre baiser sur le front de la petite fille avant de s'abandonner à des larmes de soulagement.
La potion de Mc Callagan avait fonctionné. Le processus de guérison avait été rapide. Trop rapide à mon goût. Pour obtenir un tel résultat, l'alchimiste devait connaître l'origine de la fièvre. Pourtant, je ne lui avais donné aucune information.
– Et s'il avait tout planifié depuis le début ? murmurai-je pour moi-même.
– Il y a un problème, Louna ? me demanda Ode.
Je me tournai vers Hécate, le cœur battant à tout rompre.
– Que faisais-tu dans la forêt la nuit dernière ? questionnai-je brusquement.
– Pardon ?
– Qu'est-ce qui t'a amenée ici ? Pourquoi étais-tu dans ces bois en pleine nuit ?
Hécate sembla réfléchir un instant, puis répondit le plus naturellement possible.
– Je cherchais une licorne.
– Tu te fiches de moi ?
– Pas du tout, fit-elle en fronçant les sourcils. Apparemment, cette forêt abriterait de nombreuses créatures fantastiques.
– Et d'où tiens-tu cette information ?
– Un vieil homme en parlait, à Mons Cornutus.
La situation aurait pu être comique si elle n'avait pas été aussi grave.
– Un vieillard fait des allusions à la magie en pleine ville, et tu ne trouves pas ça étrange ? m'emportai-je avec colère.
– Pourquoi t'énerves-tu ? demanda Ode. Vous venez de sauver Mélie, toutes les deux...
– J'ai besoin de prendre l'air.
– Attends, Louna !
Hécate me suivit à l'extérieur de la bâtisse et se planta devant moi, la mine boudeuse.
– Tu comptes me dire ce qu'il se passe, espèce de vieille louve grincheuse ?
Je réorganisai mes pensées et pris une profonde inspiration.
– James Mc Callagan se joue de nous depuis le début, grondai-je en serrant les dents. Il s'est arrangé pour que tu croises ma route dans cette forêt, en utilisant ta fascination étrange pour les créatures magiques. Je pense aussi qu'il est responsable de la fièvre de l'enfant. Sinon, comment pouvait-il la soigner aussi facilement ?
– Tu as peut-être raison, admit Hécate en esquissant une moue dubitative. Mais pourquoi aurait-il fait ça ? Tu penses qu'il s'est allié avec Mortarion ?
– Je ne sais pas, répondis-je avec un haussement d'épaules. Pour être honnête, je ne serais pas surprise de découvrir que Dagmar Mortarion s'est lui aussi fait manipuler...
Nos regards se croisèrent, et les yeux d'Hécate s'animèrent d'une lueur malicieuse.
– Penses-tu à la même chose que moi ? me demanda-t-elle.
J'acquiesçai lentement, et mon visage se fendit d'un sourire complice.
– Absolument. Montrons à ce cher James Mc Callagan ce qu'il en coûte de défier deux amies solidaires.
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Cercle Magus : Les Fondateurs
ParanormalIls sont au nombre de quatre. Quatre sorciers aux pouvoirs incommensurables. Ils ne semblent rien avoir en commun, et pourtant... Ambitieux. Solidaire. Rusé. Enthousiaste. Voici leur histoire.