Accidente » TORRES ✓

PREMIÈRE PARTIE -3.

-3.

C'est quatre jours plus tard qu'il revit enfin Lena.

Il était venu tous les jours à des heures différentes, pour mettre toutes les chances de son côté. Et si la dernière fois, elle avait été matinale, aujourd'hui, c'est presque au coucher du soleil qu'elle arriva devant la tombe de sa sœur. Et qu'elle trouva un Fernando assis devant, en train de lire un livre à haute voix.

-Je peux savoir ce que tu fais ? elle lança, et Fernando sursauta avant de se retourner et de sourire en voyant qu'il s'agissait de Lena.

-Je lui lis ce livre, il répondit.

-Elle est morte, Fernando, elle ne t'entend pas.

Il secoua la tête avant de fermer son livre et de se lever.

-Il faut qu'on parle.

-Je t'ai dit que je ne voulais ni t'écouter, ni que tu viennes ici, qu'est-ce que tu n'as pas compris ?! En quelle langue je dois le dire pour que tu comprennes ? Anglais, peut-être, puisque tu as décidé de fuir là-bas ? Ou italien ?

-Lena, c'est important, il fit un pas vers elle, mais elle recula. S'il te plaît. J'ai juste besoin de te raconter l'accident.

-Je n'ai pas besoin que tu me racontes l'accident, Fernando, mes parents s'en sont chargés dès mon réveil, maintenant, laisse-moi tranquille. Laisse-nous tranquille.

-Je te laisserais tranquille. Je vous laisserais tranquille. Mais je veux que tu entendes ce que j'ai à te dire avant. Une fois fait, je te promets que je disparaîtrais de ta vie pour de bon.

-Demain, seize heures, au Café Federal. Je ne t'attendrais pas une seule seconde si tu es en retard. Après ça, je ne veux plus jamais te revoir.

Fernando hocha vivement la tête.

-Très bien. À demain, Lena. À bientôt, Valentina, il ajouta avant de quitter le cimetière.

*

« Elle va enfin m'écouter. »

C'est la phrase que se répétait Fernando depuis qu'il s'était réveillé ce matin. À tel point que la journée avait été tout sauf productive pour lui, ne pouvant se concentrer sur quoi que ce soit. Parce qu'à seize heures, c'est-à-dire, dans moins de dix minutes maintenant, Lena serait là pour l'écouter.

Et c'est seulement maintenant qu'il réalisait ce qu'il était sur le point de faire. Il allait lui révéler la vérité. Elle venait de passer dix ans à croire une histoire qui n'était pas vraie parce qu'il avait voulu la protéger.

Mais il était temps qu'elle sache ce qui s'était vraiment passé. Il était temps qu'elle apprenne comment Valentina était réellement morte. Même si après avoir entendu cette histoire, elle serait sûrement brisée.

Il releva soudainement la tête en voyant la chaise face à lui bouger, et une Lena l'air aussi agacée que les deux fois précédentes s'assit face à elle.

-Quel dommage, tu es à l'heure, elle lança avant d'enlever sa veste.

-Merci d'être venu, il dit, ne se laissant pas dérouter par sa remarque.

Il n'avait pas fait tout ça pour perdre ses moyens maintenant. Il allait tout lui dire une bonne fois pour toutes.

-Je suis venue pour avoir la paix.

-Qu'est-ce que tu veux boire ? Je paie, il ajouta, et elle haussa un sourcil.

-Évidemment, quelle surprise, elle ironisa. Je veux juste un thé à la menthe.

-Un thé à la menthe, il hocha la tête avant de se lever pour aller commander au bar. Il revint un peu plus d'une minute plus tard avec deux tasses à la main.

-Je crois que tu mets un sucre, il dit avant de poser la tasse devant Lena ainsi que le sachet de thé et deux petits sucres emballés.

-Merci, elle répondit avant de poser ses mains autour de la tasse. Qu'est-ce que tu bois ? elle s'enquit, et Fernando fronça les sourcils, surpris qu'elle s'y intéresse.

-Du café, il haussa les épaules, parce que c'était toujours ce qu'il buvait.

Lena hocha la tête.

-Alors ? Qu'est-ce que tu as à me dire de si important que tu oses remettre les pieds sur la tombe de Valentina alors que je te l'ai formellement interdit ?

Il baissa les yeux vers sa tasse.

-Je...pense que tu mérites de connaître la vérité.

-Je connais la vérité, Fernando. J'ai peut-être oublié tout ce qui s'est passé ce jour-là, mais mes parents se sont chargés de me mettre au jus, pendant que toi, tu t'enfuyais.

-Écoute, je sais que ça va paraître complètement fou, et je sais aussi que tu ne vas probablement pas me croire. Mais je veux que tu entendes ce qui s'est vraiment passé. Je ne sais pas de quoi tu te souviens. Mais tu avais eu ton permis quelques jours avant, et depuis ce moment, tu refusais de t'asseoir sur le siège passager. Alors tu es venue me chercher à l'entraînement, et tu as décidé que tu conduirais au retour.

Il fit une pause dans son récit et se mordit la lèvre. Parce que lui dire la vérité voulait accessoirement dire la briser. Et c'était loin d'être chose facile.

-C'est ce que tu as fait, Lena, et même si je le regrette encore, j'ai trouvé que c'était le moment opportun pour t'annoncer que je pensais à changer de club pour rejoindre la Premier League. Tu as lâché le volant. Valentina passait à l'entrée de l'allée, où nous étions, juste à ce moment-là. Tu as essayé de l'éviter, sans succès, et la voiture s'est retrouvée à l'envers, nous à l'intérieur, toi inconsciente. Mais pas moi. J'ai appelé le SAMU et on est parti à l'hôpital tous les trois. Valentina est décédée avant qu'on y arrive, et toi, tu étais toujours inconsciente.

Quand tes parents sont arrivés, les médecins leur ont annoncé tout de suite que leur benjamine était morte, et que l'aînée avait une amnésie partielle : elle ne se souvenait même pas de l'accident. Ils m'ont donc demandé ce qui s'était passé, et j'ai tout raconté. Sauf que j'ai dit que j'étais au volant. Ils m'ont demandé de partir sur le champ et m'ont interdit de t'approcher que ce soit de près ou de loin.

Fernando releva la tête vers Lena, qui avait le même visage impassible qu'au début de son récit.

-Dix ans après, ta conscience ne s'est toujours pas calmée, alors tu décides de me faire porter le chapeau ? elle lâcha, et l'attaquant secoua vivement la tête.

-Non, bien sûr que non ! C'est réellement ce qui s'est passé !

-T'es vraiment un sacré connard, Fernando.

Et sur ces mots, elle se leva et quitta le café.

Bien joué, Torres, il se félicita.