Chapitre II : Vlimcra - Parcourir le palais

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J'ouvre difficilement les yeux. Ma tête me hurle de ne pas bouger mais l'environnement autour de moi me panique. Je suis dans mon lit à la chambre du palais et au vu de toutes mes douleurs sur mon corps meurtri cela me rappelle de suite une partie de mon cauchemar la veille de la Cérémonie. Combien de temps ai-je dormi ? Comment la bataille s'est-elle terminée ? Avons-nous gagné ?

Je tente de me lever mais une importante douleur au niveau de mon abdomen me fait retomber lourdement sur mon lit. Que m'est-il arrivé ? Je soulève le haut de mon pyjama et remarque un immense bandage faisant le tour entier de mon corps. Tout me revient brutalement en mémoire et je ne peux retenir une larme.

Je me souviens de la corne brume qui a retentit et de notre espoir d'avoir gagné, mais lorsque nous avons vu ce monstre géant trainé derrière lui le corps de Meyla et celui de Emeyrria nous avons de suite compris qu'en réalité nous avions perdu. Nos adversaires se retirait, sans doute parce qu'ils étaient affaiblis mais surtout parce qu'ils avaient avec eux deux otages, et non des moindres.

Je me souviens avoir sauté de rage en direction de cet ennemi. Il était hors de question qu'il nous enlève notre princesse et Élue, et qu'il m'enlève Emeyrria. Je me rappelle avoir couru toute la longueur de l'île, mes bois en avant, d'avoir sauté au-dessus de simples monstres. J'étais enragé. Mais le coup de massue du monstre géant m'avait envoyé valser bien des mètres plus loin. J'étais si sonné que je ne voyais presque plus rien. J'avais seulement entre aperçu un ennemi s'approcher de moi, sa lance bien en évidence, et la douleur que j'avais ressenti sur le coup.

J'avais envie de vomir à tel point cela me faisait mal. Et pour bien me réduire à néant, le monstre avait laissé sa lance dans mon corps. C'est à ce moment-là que j'avais compris qu'on avait perdu. Juste parce qu'il osait laisser son arme, comme s'il souhaitait se moquer de nous, nous provoquer.

Apparemment je ne les intéressais pas, car ils m'avaient laissé là, alors qu'ils auraient pu me prendre en otage aussi. Non ils m'avaient laissé agoniser en voyant mes amies s'éloigner. J'avais pleuré de douleur. Mais pas de la douleur de mon corps, mais celui de mon cœur. Je me souviens du visage de Sori, se penchant sur moi, inquiet. Il me parlait mais je ne comprenais pas un seul de ses mots. Tout me semblait étouffé.

Et maintenant je suis là, dans ma chambre, à repenser à tout cela. Je sens les larmes dévalé mes joues, et les gouttes tomber dans un bruit mat sur mes genoux. Je m'en veux tellement, tellement. Ce n'est qu'après une longue partie de la journée écoulé que le courage me revient. Je ne laisserais pas plus longtemps les filles là-bas. J'irais les chercher !

Je tente une nouvelle fois de me lever. La douleur est intense mais je suis remonté à bloc. Je jette un coup d'œil circulaire à ma chambre en quête d'un quelconque objet sur lequel m'appuyer pour avancer, mais il n'y a rien qui puisse m'aider. Alors je me colle au mur et avance petit à petit vers la porte de ma chambre. Pourquoi celle-ci est si grande ? Il ne pouvait pas la faire plus petite pour m'éviter autant de souffrance pour rien ?

Je remarque un peu tard que je devrais m'habiller avant de quitter la pièce. Et c'est une nouvelle épreuve pour moi, surtout pour passer ma tunique verte. Mais j'y parviens finalement avec quelques difficultés. Je retourne à la porte de ma chambre tout en me tenant l'abdomen. Il faut vraiment que je trouve quelque chose sur quoi m'appuyer.

Une fois dans le couloir je jette un coup d'œil de chaque côté. Personne. Étonnement cela me rassure. Où est-ce que je pourrais trouver quelque chose ? Je réfléchi quelques instants, adossé contre la porte de ma chambre. Il y a bien la cave, mais je me vois mal réussir à parcourir tout le palais et sans me faire voir. Mon regard se pose sur la chambre de Meyla. Je continu de réfléchir tout en regardant la porte d'un bleu nuit. Et soudain, l'illumination !

La chambre de Meyla est reliée à une autre pièce qui était avant sa salle de jeu quand elle était petite. C'est maintenant devenu un dépotoir des affaires qu'elle n'utilise plus. J'avance toujours coller au mur et m'arrête en face de la porte. Mais les trois mètres qui me sépare avec l'autre côté du couloir ne me rassure pas. Pourquoi faire si grand ? Ça n'a aucun intérêt.

Je prends une grande inspiration et me jette à l'eau. La douleur est si intense que je m'en mords la lèvre inférieure et lorsque je parviens enfin à ma destination je m'écroule sur le mur. Enfin... J'appuie sur la poignée tout en remarquant que ma main tremble excessivement. J'essaie de ne pas en tenir compte et entre dans la pièce.

Tous les rideaux sont fermés, pourtant Meyla déteste ça. Elle ne vit que pour le jour, la nuit est synonyme de cauchemar pour elle. Je me souviens du nombre de fois important où elle venait se blottir dans mon lit parce qu'elle était terrorisée par un de ses songes. Elle semblait si fragile dans ses moments-là, elle qui est si fière. Ce changement dans l'environnement de la princesse m'énerve et je vais de suite ouvrir les lourds tissus royaux. La lumière du soleil levant rentre avec force dans la pièce. Suis-je restée éveillé toute la nuit ?

J'observe avec attention chaque détail de cette pièce d'un bleu roi. La moquette de la même couleur que les murs est désormais vide alors que devant mes yeux le souvenir de la princesse enfant jouant à la poupée avec moi est translucide. Le roi détestait que l'on joue dans la chambre alors que Meyla avait une pièce spécialement dédiée à cela juste à côté. Mais briser cette règle en cachette étant notre passe-temps favori.

À ma gauche, coincée dans le coin, un immense lit recouvert de draps en satin rouge pourpre. Plusieurs peluches sont posées contre le mur mais trois attire mon attention : un cerf, un ara et un loup. Depuis quand les a-t-elle ? La dernière fois que je suis rentré dans cette chambre, il y a quatre ans maintenant, je ne me souviens pas les avoir vu. Et puis surtout, pourquoi un loup ? Je croyais qu'elle n'aimait pas Emeyrria ?

Mais un autre détail me frappe : une partie du lit est défait. Meyla fait toujours son lit le matin, elle trouve cela plus agréable pour le soir. Je m'approche et remarque que le lit est juste froissé à un endroit précis et qu'il est humide, comme si quelqu'un était venu pleurer. Le roi ? Ou peut-être la reine ?

Je rejoins la table circulaire ou Meyla fait ses devoirs et m'assois à une chaise pour reprendre mon souffle. Il faut que j'arrête de perdre du temps à regarder ce lieu. Je m'épuise pour rien. Je jette un rapide coup d'œil à la porte de la salle de jeux. Elle semble si loin que cela me décourage. Mais pour autant je me lève, non sans tenir mon abdomen de mes deux mains et rejoins la porte au plus vite.

En ouvrant la porte je remarque qu'il n'y pas que Meyla qui entrepose ses vieilles affaires ici. Des épées en bois usées ont été laissé à l'abandon et elles sont gravé au nom de leurs propriétaires : Sori et Meyla. Cela m'étonne de ne pas voir celle de leur frère ainé, mais bon, c'est quelqu'un de très discret. Je m'avance dans la pièce à la recherche de quelque chose pour m'aider et je finis par trouver ce que je cherche. Une maquette d'oiseau géant à base de morceau de bois. Je m'assois au sol et commence à couper avec mes dents les différents cordages afin de récupérer le bâton le plus grand, celui qui sert de base pour les ailes.

Après quelques minutes à ronger je parviens enfin à mes fins. Je me relève et commence à marcher au travers de la pièce. Avec de l'aide c'est toute suite mieux et beaucoup moins douloureux. Je souris mais me rends rapidement compte que je ne sais pas quoi faire ensuite. Je devrais peut-être descendre à la recherche de quelqu'un ? N'ayant aucune autre option et ne souhaitant pas retourner dans ma chambre, je quitte les lieux.

Le couloir est toujours désert. Je pars en direction des escaliers et descends les marches une à une avec difficulté. J'espère que la douleur passera vite. Arrivé sur le palier je me dirige vers les escaliers du grand hall, mais en passant devant la salle du trône j'entends du bruit. Je pousse doucement la porte et remarque Maître Limorea et le roi qui s'entretiennent. Je ne devrais pas rester là. Je cherche à refermer la porte mais on m'interpelle. Raté... Je rentre la tête baissée dans la salle.

- Vlimcra ?

The Songs of Osira - Tome 2 : La Guerre des ElusOù les histoires vivent. Découvrez maintenant