Kaisoo - Maybe (Tome 2)

Chapitre 4 : Lundi matin

Un homme me tourne le dos.

Nous sommes dans une pièce, une chambre, mais je ne sais pas à qui elle appartient. Elle est entièrement grise, et j'ai l'impression d'être dans une sorte de chape de brume qui alourdit l'air et me rend la respiration difficile. Je le hèle, mais il ne bouge pas. Je m'avance vers lui, avec lenteur, comme si mes pieds sont englués dans le sol, et il ne bouge toujours pas. Je pose lentement, timidement ma main sur son épaule. Sa tête bouge, et j'attends qu'il se retourne et me regarde, mais à la place, son corps bascule en arrière. Je recule précipitamment pour ne pas qu'il me tombe dessus, et il heurte le sol lourdement, mollement. Puis sa tête se détache de son corps et continue de rouler, jusqu'à arriver à mes pieds.

Je connais ce visage. Il serait tellement beau sans tout ce sang autour, et sans cette peau, ces lèvres blanches comme de la craie, sans ses yeux ouverts et qui me fixent, vides et froids. Ils restent fixés sur moi, et je sens une vague de remors m'envahir, car je sais que c'est pour m'accuser.

- Soo ?

Qui a parlé ? La voix ne vient pas de lui. Elle ne peut pas, il est mort.

- Soo... Chéri, réveille-toi.

Je m'extirpe avec difficulté de la brume épaisse et étouffante dans laquelle mon rêve m'a plongé, mais n'ouvre pas les yeux pour autant. Je n'ai pas envie. Je veux simplement que Jongin continue de me caresser les cheveux comme il est en train de le faire.

- Soo.

- Laisse-moi dormir encore, marmonné-je.

- On a cours, tu le sais, me dit-il d'un ton désolé.

Je me fais violence pour soulever mes paupières. Elles sont lourdes et me piquent. Devant moi, Jongin me regarde avec des yeux anxieux.

- Tu pleures, m'informe-t-il alors que je lui lance un regard inquisiteur.

Aussitôt, j'amène mes mains à mes joues, pour effectivement sentir qu'elles sont mouillées.

- T'as encore fait un cauchemar ?

- Laisse, c'est rien, le rassuré-je avec ce que j'espère être un sourire confiant.

- Ton réveil a sonné mais tu ne t'es pas réveillé, alors je t'ai laissé au lit et je t'ai préparé ton petit déjeuner.

Je n'ai pas envie de me lever. Cela fait deux jours maintenant que Yixing m'ignore, et j'angoisse à l'idée de son regard haineux sur moi. Ou peut être va-t-il juste continuer de m'ignorer ? Quel est le pire ?

Je n'ai pas faim, non plus. C'est ce que j'ai envie de lui dire. Mais je ne peux pas. Il fait tellement d'efforts pour être attentionné, gentil - même s'il n'en a pas besoin - que je me dois d'en faire aussi. Moi, j'en ai besoin.

- Merci, déclaré-je donc.

Et je noue mes mains derrière sa nuque pour pouvoir approcher son visage du mien, puis pose mes lèvres sur les siennes brièvement. Il me sourit.

À présent levé, lavé et à demi réveillé, je m'assois à table avec Jongin. Devant moi, un café encore chaud malgré le temps que j'ai pris dans la douche, et une assiette de toasts au Nutella. L'éternel Nutella de Jongin. N'est-il jamais écœuré ?

Je sens d'ailleurs le regard de ce dernier sur ma personne, et lève mes yeux vers lui. On se fixe quelques courts instants. Je sais à quoi il pense. Ce qui me tue, c'est que je suis à peu près certain d'être incapable de faire ce qu'il aimerait que je fasse.

Manger.

Je sais qu'à force de menaces calmes et d'argumentation de sa part, je vais finir par avaler un toast sur les deux. À contrecœur. Non pas que je n'essaie pas de bien manger par moi-même. Je n'y parviens simplement pas.