VIII. Je ne méritais personne.

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E L I S A B E T H

Depuis quelques années, j'avais pris pour habitude de prendre des bains quotidiens. Tous les jours, je me couchais dans la baignoire de la maison et je me perdais quelques minutes dans l'eau. L'eau était ce qu'il y avait de plus terrifiant et de plus apaisant.

C'était avec surprise que je m'étais rendue compte qu'une baignoire se tenait au beau milieu de notre salle de bain de chambre d'étudiante, à Méline et moi. Je trempai ma main dedans afin de vérifier la température de l'eau qui s'y coulait. Elle était glacée. Et j'adorais cela. Cela me rappelait à quel point je devais souffrir, parce que c'était ma faute.

Je verrouillai la porte puis me déshabillai. Chaque vêtement ôté de mon corps était un pas de plus vers Elias. Je vais te rejoindre. Le temps d'un bain, je serai à tes côtés. Je rentrai vers la baignoire et le froid de l'eau atteignant mes pieds me procurèrent des frissons. Lentement, je laissai l'eau chatouiller mon corps jusqu'à ce que mes épaules furent couvertes par le liquide. Je pris une inspiration avant de plonger ma tête sous l'eau.

Le silence m'entourait et le froid me glaçait les veines, et c'était bien ainsi. C'était ce qu'Elias avait dû ressentir.

J'expirai tout l'air que j'avais inspiré, faisant ma vision se brouiller à cause des bulles qui se formaient.

J'adorais la sensation de mes poumons qui me brûlaient, de l'eau se faufilant sous mon dos qui se cambrait pour me forcer à sortir la tête de l'eau. Mon corps me suppliait de lui donner de l'air, mais tout ce que je voulais, c'était ne plus en avoir du tout. Je ne voulais plus penser.

Le temps de quelques secondes, je mourrais. Le temps de quelques secondes, je retrouvais mon frère. Que j'avais tué.

Je suis désolée...

Le feu qui animait mes poumons se confondait avec le froid qui me givrait la peau, et je chérissais le fait que je ne ressentais presque rien. Je souris, les larmes qui s'écoulaient de mes yeux se mélangeant à l'eau. Je fermai les paupières.

C'est parti.

Des doigts se posèrent délicatement sur mon cou. D'un coup, ils se resserrèrent fermement, me faisant crier silencieusement sous le poids du poison qu'était l'eau. La mort était en train de secouer tout mon corps. J'étais en train de mourir. La folle ne s'enlevait pas de mon cou. J'ouvris les yeux, et aperçus d'une vision trouble, entre tous les arbres aux feuilles orangées, une petite fille. L'enfant aux cheveux blonds tressés me regardait avec de grands yeux de terreur et de peine. Elle ferma les paupières et cria une dernière fois.

Pardon...

Je revins à la réalité lorsque je perçus contre mon gré des cris transperçant l'eau. Le feu et le froid parcouraient tout mon corps et je sortis vivement la tête de l'eau, abandonnant ainsi Elias et ma culpabilité. Je respirai enfin un grand coup, apaisant peu à peu mes poumons qui, comme chaque soir, devaient me détester.

- BETH ! BETH, OUVRE !

Je cognai plusieurs fois mes phalanges contre le rebord de la baignoire pour informer la voix que je devinais être celle de Méline de ma présence. Je suis là. Je suis là.

Je l'entendis même souffler de soulagement.

- Putain, tu m'as fais peur...

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⏰ Dernière mise à jour : Dec 05, 2017 ⏰

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L'eau reste silencieuse Où les histoires vivent. Découvrez maintenant