Chapitre Treize

107 8 12
                                    

Dans la vie on est amené à rencontrer un bon nombre de gens. Certains restent plus longtemps que d'autres, mais à la fin, tout le monde finit par nous quitter. Et on se retrouve seul. Puis le cycle recommence, jusqu'au jour où on trouve enfin la personne qui restera à nos cotés indéfiniment. On s'attache, crée des souvenirs, développe des sentiments forts puis du jour au lendemain, plus rien, tout s'envole. On nous abandonne comme si rien de tout cela n'avait existé, comme si tout avait déjà été oublié par l'autre. Est-ce que j'ai vraiment compté pour cette personne ? Tout ce qu'on a partagé ne signifie donc rien pour elle ? Qu'est-ce que j'ai bien pu faire de mal ? Une multitude de questions se bousculent dans notre tête, souvent sans réponse.

J'aurais aimé dire que je faisais partie de la catégorie de ceux qui s'en vont, mais j'étais plutôt celle qu'on laissait tomber. La première personne à être sortie de ma vie, c'est ma mère. J'ai vécu sa mort comme un abandon, elle avait lâchement renoncé à la vie et à moi par la même occasion. Est venu ensuite le tour de Lyna, la personne avec qui j'avais passé la majeur partie de mon existence, mon pilier. Elle est partie, sans prévenir, sans un au revoir. Mon monde s'est écroulé avec son départ, mais Taehyung a su le reconstruire, lentement. Il l'a reconstruit brique par brique puis a disparu dès qu'il eut fini. On pourrait croire qu'après autant de déceptions, j'avais pris l'habitude et je ne ressentais donc plus de peine. Mais la vérité c'est que j'avais mal. Contrairement aux personnes qui m'entouraient, la douleur elle ne voulait pas me quitter. Elle persistait et s'intensifiait de jour en jour. J'avais mal, et c'est pour cette raison que je n'arrivais pas à les oublier.

J'avançais dans les rues vides de la ville, perdue dans mes pensées. Je n'avais aucune destination en tête, je voulais juste partir le plus loin possible de chez moi. Je t'étais en colère contre tous ceux qui m'avaient abandonnée et contre moi-même. Le vent hivernal s'engouffrait dans ma veste et me fouettait le visage à mesure que je prenais de la vitesse. Mes joues brûlaient à cause du froid, mes mains était gelées, mon souffle saccadé. Je courai aussi vite que je le pouvais, comme si ma vie en dépendait.

Arrivée près d'un petit parc pour enfant, sentant la fatigue me gagner, je décidai de faire un arrêt. Je m'assis sur un banc derrière un arbre pour y reprendre mon souffle. De là, je pouvais voir la ville et ses lumière. C'était si beau que j'en oubliai doucement la raison de ma colère. Mon coeur qui battait si vite quelques minutes plus tôt s'était calmé, et j'avais retrouvé une respiration normale. Après une bonne vingtaine de minutes, je me relevai et entrepris de terminer ma petite escapade.

Vidée de mon énergie, je marchai d'un pas lent le long d'une route destinée aux voitures, en regardant mes pieds. Le silence et l'obscurité régnaient. Seuls quelques réverbères éclairaient le chemin. Je n'avais pas peur, j'étais au contraire très apaisée. Quelques mois auparavant, l'idée même de sortir après le couché du soleil, même accompagnée, était impensable pour moi. La nuit m'angoissait, me terrifiait. C'est Taehyung qui m'a fait surmonter cette peur et m'a fait apprécier les balades nocturnes. L'angoisse était toujours présente, mais elle ne prenait plus le dessus sur moi. En sa présence, je me sentais invincible, rien ne pouvait m'arriver, j'étais dans une bulle. Notre bulle. Depuis son départ, je me raccroche aux souvenirs que j'ai de nous en train de marcher, main dans la main, nos têtes levées vers les étoiles, admirant l'immensité de l'univers. Ou encore lorsque nous buvions des bières sous un arbres, les soirs de pleine lune. Rien que le fait de penser à lui, suffisait pour qu'aucune peur ne s'empare de moi.

Le temps passait à une vitesse ahurissante lorsque je me perdais dans mes souvenirs, lorsque je pensais à lui. Je n'avais même pas remarqué que j'étais arrivée à ce fameux pont, un témoin des nombreuses promesses que Taehyung n'a jamais tenues. Je partis m'assoir sur un rocher situé de l'autre coté du pont. Faisant bien attention de ne pas tomber, je ramenai mes genoux à ma poitrine, les enroulai de mes bras et posai ma tête dessus. Et jusqu'au petit matin, j'observai les voitures défiler en silence.

Dans la proche droite de ma veste se trouvai encore la lettre rouge de Lyna que j'avais emporté avec moi en sortant. J'avais oublié sa présence durant toute la soirée, je ne savais même plus pourquoi je l'avais prise. En me redressant, je la sortis délicatement de ma poche et la saisis de mon autre main. Je la fixai intensément, comme si j'essayais de lire son contenu à travers l'enveloppe.

« Bah ça alors, je pensais pas à te revoir de si tôt. » Une voix grave s'exclama derrière moi, me faisant sursauter. Je me retournai vivement, une grande silhouette masculine s'approchait de moi en marchant. Le manque d'éclairage ne me permettrai pas de voir son visage, mais sa voix me semblait particulièrement familière.

« Excuse moi, je voulais pas te faire peur. » Dit-il en se rapprochant un peu plus. Ce n'est que lorsqu'il fut à quelques pas de moi que je pu reconnaitre Namjoon, l'inconnu que j'avais rencontré sur ce pont. Un soupire de soulagement m'échappa puis laissa place à un sourire sur mon visage.

« Je m'attendais pas à te voir ici, encore moins à cette heure-ci. » Me confia-t-il en s'asseyant à mes cotés. « Désolé, je n'ai pas des bière aujourd'hui, se sera pour une prochaine fois. » Sa remarque me fit légèrement rire.

« - Qu'est-ce que c'est ? Il désigna de la tête le courrier que je tenais entre mes doigts. Mon attention se reposa dessus.

- Une lettre que j'ai reçu il y a un an. » Un soupire traversa mes lèvres et je relevai la tête en direction de la route. Un long silence s'installa entre nous, mais loin d'être gênant.

« Est-ce que tu veux bien me la lire ? » Je lui tendis la lettre rouge d'une main tremblante. Il acquiesça de la tête et saisit l'enveloppe.

Je le regardai l'ouvrir lentement, appréhendant son contenu. Il en sortit ensuite un papier rouge, plié en trois, rempli avec ce que je reconnaissais l'écriture de Lyna. Il me lança un dernier regard, comme pour de demander si j'étais prête, et entama la lecture.

"Ma très chère Hana..."

House Of Cards ▪k.th▪Où les histoires vivent. Découvrez maintenant