Chapitre 13

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Je choisis une place libre et je m'assis sur la chaise en bois. Je regardai le menu et je réalisai que je ne me souvenais pas de la moitié des choses qui y figuraient. Tellement de temps avait passé depuis que les anges m'avaient enlevée.

Je commandai une poutine même si je ne savais pas ce que c'était et je pris un Coke, une autre étrangeté. Avec un nom pareil, ça avait tout de même l'air buvable.

Je regardai dans le restaurant avant de me replonger dans mes pensées.

8ans. 8ans avaient passés.

Je soupirai.

Je me souvenais de cette journée comme si c'était hier. Nous étions l'après-midi et je venais d'avoir mes 10ans une semaine plus tôt. J'étais assise sur le sol et je dessinais sur des feuilles blanches. J'avais un réel talent, mais j'avais arrêté de dessiner quand j'étais arrivée chez le anges.

Bref, c'était un après-midi bien ordinaire en compagnie de ceux que je croyais alors être mes vrais parents. Ma mère était dans la cuisine, les cheveux attachés en chignon, et elle parlait au téléphone avec sa soeur. Mon père, quant à lui, était à l'étage en train de travailler à l'ordinateur.

J'étais concentrée sur mon chef-d'oeuvre quand j'avais aperçu une ombre du coin de l'oeil. J'avais jeté un oeil par la fenêtre avant de courir retrouver ma mère, inquiète. Elle avait raccroché le téléphone et avait tenté de me rassurer, mais je n'étais pas capable de me relaxer. Je savais d'instinct que quelque chose se préparait.

Ma poutine arriva avec le Coke que j'avais commandé et je commençai à manger. La poutine était délicieuse, c'était des frites avec du fromage et de la sauce, et le Coke était, comme je disais, buvable.

Bon, où en étais-je? Ah oui, c'est à ce moment-là que mon père était descendu et nous avait rejoins dans la cuisine. Il avait tout de suite remarqué mon visage un peu paniqué et il avait, lui aussi, essayé de me réconforter. Je ne m'étais pas calmée pour autant.

C'est alors que j'avais entendu un bruit d'explosion et je m'étais précipitée sous la table. J'avais ensuite perçu un craquement épouvantable provenant du deuxième étage et j'avais vu le plafond dans le salon s'effondrer. Il y avait de la poussière partout et je toussais comme une folle.

Un moment de silence avait suivi et j'avais cru que l'épisode de la catastrophe était passé. J'étais sorti de sous la table et je n'avais repéré mes parents nulle part. J'avais crié leur nom plusieurs fois avant de les voir inconscients sur le plancher de la cuisine, assommés par le plafond. Je n'avais pas vu que la moitié de la cuisine s'était effondrée aussi.

Je passai ma main dans mes cheveux en reposant ma fourchette sur la table du petit restaurant.

Le plus dur s'en venait.

Je m'étais précipitée vers eux jusqu'à ce que je me fige sur place. Il y avait le feu sur la cuisinière et il se répandait rapidement.

J'avais reculé de quelques pas. Les flammes m'avait bloqué le passage et je ne pouvais plus rejoindre mes parents. Des larmes de rage avaient coulées sur mes joues tandis que le feu avait encerclé les êtres qui comptaient le plus pour moi.

Je m'étais alors mise à crier, tentant tant bien que mal de les réveiller. Ça n'avait pas marché.

Le plus pire dans tout ça était sûrement le fait que je ne m'était même pas aperçue que le feu m'entourait aussi, me bloquant de l'unique sortie. C'est seulement lorsque la chaleur avait augmentée que je m'en étais rendu compte, mais il était trop tard.

La fumée avait envahi mes poumons et ma respiration était devenue de plus en plus difficile. Je m'étais effondrée à genoux et j'avais vu la pire chose au monde.

Ma gorge se serra alors que je repensait à ces évènements du passé et je serrai les poings. J'haïssais les anges pour m'avoir fait subir ça.

Agenouillée là, respirant difficilement et les yeux embrouillés de larmes, j'avais vu mes parents. J'avais vu mes parents être dévorés par les flammes. Je les avais vu mourir de mes propres yeux, chaque minute durant une éternité. J'avais vu ma mère ouvrir les yeux, puis les refermer doucement avec un dernier sourire coincé pour me dire que tout irait bien. J'avais vu mon père serrer la main de la femme qu'il aimait et pousser un grognement en laissant son dernier souffle le quitter. Je les avais vus, tous les deux, être brûlés vivants.

Je fermai les yeux et un larme m'échappa. Si seulement je pouvais retourner dans le passé et revive les choses différemment. La mort de mes parents, je ne l'oublierai jamais. Cet instant macabre, sinistre et horrifiant allait rester dans ma mémoire pour le restant de mes jours.

Au moment où ils avaient rendus l'âme, j'étais tombée sur le côté pour attendre que la mort vienne me chercher aussi. Les flammes m'avaient léché les pieds et je n'avais pas réagi. Pas un cri. Ni même de clignement de paupières. Je n'étais peut-être pas décédée pour vrai, mais j'étais morte de l'intérieur. Tout espoir m'avait abandonnée et je voulais rejoindre mes parents, où qu'ils soient.

La serveuse me coupa de mes pensées et je payai la facture avant de sortir dans la rue. Je déambulai en me remémorant la scène la plus effrayante que je n'avais jamais vécue. Les anges n'auraient jamais dû venir me chercher, car, en fait, ce n'était pas Elwin qui avait gâché ma vie. C'était les anges. Tous les anges.

Allongée sur le sol, j'avais patiemment attendu que mon âme vole vers le ciel, mais ce n'était jamais arrivé. Un ange, grand et fort avec les cheveux et les ailes noirs, m'avait trouvée et ramenée parmi les miens.

C'était ainsi que ma nouvelle vie avait débutée.

Devenue aussi froide et glaciale qu'un bloc de glace, j'avais tourné le dos à la bonne petite fille que j'étais et j'étais devenue mauvaise et cruelle.

J'étais devenue un ange noir.

AngéliqueOù les histoires vivent. Découvrez maintenant