Allongé sur le grand lit molletonné d'Al', Nolan lançait et rattrapait inlassablement la balle rouge, un sourire idiot sur les lèvres.
Son ami lui s'agitait de son côté :– J'arrive pas à y croire, mais qu'est ce que t'as dans le crâne ?!
Comme à chaque fois qu'il était en colère, il rangeait sa chambre comme un maniaque et passait nerveusement sa main dans ses cheveux blonds en marmonnant de façon incompréhensible.
– Bordel Nolan tu t'es vraiment introduit chez des gens par effraction ! s'énerva-t-il exaspéré.
Le jeune marmonna un "hm" pour seule et unique réponse, toujours le même sourire scotché aux lèvres.
Il n'écoutait le sermon de son ami que d'une oreille distraite, bien trop hypnotisé par cette balle et ce qu'elle signifiait.Cette balle qui montait haut dans les airs avant d'atterrir dans le creux de sa main, elle lui rappelait la veille. La toucher lui prouvait que tout ça avait bien eut lieu, que c'était réel : il était monté dans le château fou.
– Et pas n'importe qui en plus, continua le blond en se levant pour maintenant s'attaquer au bureau,"les barges de la forêt" !
Alan continuait de parler, sans se douter d'avoir perdu avec cette phrase le peu d'attention que lui avait accordé le brun jusqu'ici.
"Les barges de la forêt", c'était ridicule.
Toute cette folie et cette méfiance irraisonnée autour de cette famille était ridicule.
Personne ne connaissait ces gens ou n'avait voulu leur accorder une chance. Mais lui était convaincu qu'il pouvait s'agir d'une très gentille famille, bien que peut-être... un peu spéciale.Seulement le problème était là, son ami avait beau être quelqu'un d'exceptionnel, il n'était pas aussi ouvert que lui, et jugeait avant tout les choses par leurs apparences.
Il analysait, jugeait, et tranchait. Impartial.Alors oui il s'inquiétait pour Nolan, ce qu'il comprenait étant donné les forts liens qui unissaient les deux garçons. Ils se connaissaient, s'amusaient, se conseillaient et veillaient l'un sur l'autre depuis des années. Leur relation était bien plus qu'une simple amitié, elle était avec le temps devenue fraternelle, même fusionnelle.
Malgré toutes les remarques acerbes d'Alan, les conneries à répétion de Nolan, malgré leurs compétitions permanentes et toutes leurs différences, les deux acolytes savaient qu'ils s'aimaient et qu'ils ne souhaitaient que le meilleur pour l'autre.– Qu'on soit clairs, t'as plus intérêt à faire quelque chose comme ça ! Sérieusement tu te rends pas compte d'à quel point c'est grave ! Ça aurait pu être dangereux...
Nolan était toujours fixé sur ce qu'il faisait voler.
Lui ne voulait pas juger ces gens de cette manière, cette balle, sa fascination pour cette maison, sa brève rencontre avec le garçon l'en empêchait.
Ah, ce garçon, lui aussi avait éveillé une certaine curiosité en lui.
Il ne connaissait même pas son nom, ne l'avait vu que quelques minutes à peine, et pourtant. Son allure, son air fragile une fois sortie, sa voix, tout restait très clair dans son esprit. L'image de son regard vert perçant. Son attitude autoritaire et craintive à la fois.
C'était vraiment intriguant.
Il n'avait rien oublié de cette rencontre ou des détails de sa maison, et ne voulait pas prendre le risque de tout laisser s'effacer.– Nolan tu m'écoutes ?
Le brun arrêta la balle au vol et la fit tourner entre ses doigts un moment.
Sans même réfléchir, toujours avec le même sourire abruti, il lâcha :– Je vais y retourner.
•••
Nolan s'était ensuite fait insulté de "petit con", engueulé et même frappé par Alan, mais voilà qu'il se retrouvait sur son vélo, suivant les sentiers et s'enfonçant dans les entrailles de la forêt.

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Le Petit Prince
Teen Fiction"Le château fou". Voici le nom qu'avaient choisis les citadins pour désigner cette maison farfelue qu'on voyait émerger du coeur de la forêt au loin, au dessus de la crique. Personne ne savait grand chose sur la famille qui y habitait et la plupart...