Wicked Games

CHAPITRE 1

I'd trade my luck to know why he's caught in the crossfire.And I'm here wakin' up to the sun and the sound of birds. Society's anxiety deprived of all that we're blessed with.We just can't get enough, no!

Louis n'était pas certain de vouloir se lever ce matin là. Il n'était pas certain d'avoir envie d'aller travailler non plus. La boîte dans laquelle il était employé n'était pas désagréable à cause de ses collègues, elle était juste bien trop impersonnelle, aucun suivi. Après deux ans à donner de son temps, il ne tutoyait personne, ne voyait personne en dehors du boulot, il ne déjeunait même pas avec quiconque. Il était seul.

En vérité, ses journées, il les passait derrière un écran à gérer la communication de l'entreprise avec les clients. Le patron avait monté la boîte si haut que les chargés de publicité ou communication avaient chacun leur rôle. Lui, il lisait, écrivait, corrigeait et envoyait les mails. Quel bonheur ! Il ne faisait que cela, il ne savait plus faire que cela.

Encore heureux, ses horaires lui permettaient de gagner sa vie seulement en travaillant le matin, et lui laissait le reste de la journée seul avec lui-même. La politique de l'entreprise était étrange, sûrement pour montrer un semblant de générosité envers ses employés . Il donnait ainsi tout lors de ses matinées, puis rentrait aux alentours de midi trente pour faire le repas une fois reposé, toujours d'une sieste de vingt minutes. Travailler six heures de suite, sans pouvoir vraiment se permettre de pause, c'était dur pour lui et son cerveau ne tenait plus, il chauffait trop.

Le burn-out ne tarderait pas. Après seulement deux ans, c'était triste. Mais le brunet avait tant besoin de contact humain. Il avait besoin de communiquer, il n'en pouvait plus de rester courbé à son bureau à se remplir l'estomac de café froid. Les noms de ses collègues ? Il ne les connaissait même pas ! Il ne pouvait pas parler, il était surchargé. Et malgré tout le travail qu'il fournissait, il n'avait jamais reçu d'augmentation ou de mutation, pas même un merci, rien. Juste des fiches de paye sur internet à la fin du mois. Les chiffres au bas de page lui permettaient tout juste de louer un petit appartement. L'eau chaude manquait, elle était constamment coupée, sûrement car les voisins l'utilisaient aussi.

Ce fut son réveil qui le fit revenir à la réalité, et le sortit du lit en sursaut. Il ne devait pas être en retard, non, surtout pas, il ne pouvait pas se le permettre. En frottant ses yeux bleus encore pleins de sommeil, il vagabonda entre les vêtements qui traînaient, et se rendit jusque dans sa petite cuisine pour trouver de quoi remplir son estomac affamé. Elle n'était qu'à une petite poignée de mètres de son lit, mais il en était satisfait, il n'y passait pas beaucoup de temps. Bon. Des pâtes ? Pas le matin. Des céréales peut-être ? A peine de quoi nourrir un pigeon. Une pomme ? Il n'allait pas avoir le choix de s'en satisfaire... Encore, en fait. Comme tous ces matins pourris qu'il enchaînait. Une boucle qui n'en terminait pas. Tant pis, il demanderait un énième café chez Nick's.

-La ferme.

Grogna t-il contre son réveil qui sonnait encore alors qu'il était déjà debout, et prêt à partir. Après l'avoir débranché avec force, il quitta son petit appart avec sa sacoche sur l'épaule, puis pris son vélo jusqu'au snack de Nick's.

Comme tous les matins, il gara son vélo derrière le bâtiment, apportant ses maigres économies avec lui. Ce fut en envoyant ses indomptables cheveux qu'il entra dans le snack, inspectant celui-ci de sa grande paire d'yeux bleus.

-Louis Toujours à l'heure, un vrai bonheur de te voir le matin. Ton café au lait est prêt !
-Merci Nickie, mais.. J'ai de quoi te le payer aujourd'hui, combien je te dois déjà ?

Demanda t-il, avant de voir l'air dépité et les traits tirés du cinquantenaire se froncer. Il semblait vraiment très, très sérieux.

-L'... Je te l'offre. Utilise ton argent pour autre chose. Achète toi un bouquin, ou un bouquet de roses à ta copine.
-J'ai pas de copine.
-Même pas la petite blondinette qui vient tous les mercredis ? Ou la grande rousse au tailleur noir ?
-Non. Personne, Nickie, tu sais que je suis seul...
-Mais à ton âge... commença t-il avant de jeter un oeil à la montre sous sa chemise rouge, aller oust, je ne veux pllus te voir ici, prends ton café et vas-t'en, tu vas être en retard sinon, pense à passer demain ! Ou avant !
-J'y penserai ! Et puis, j'ai besoin de l'avis de ton fils pour mon prochain chapitre, et sur mes photos.
-Ah Leiv..

Celui-ci ne se fit pas prier, et en attrapant le gobelet tiède, il sortit du snack, non sans un regard à la femme au tailleurs. D'un geste de la main, il salua Nick, puis grimpa sur son vélo à toute vitesse. Voilà qu'il était déjà en retard... Il lui avait pourtant dit des centaines de fois de veiller à l'heure.

A la sortie de ses études, Nick l'avait accueilli chez lui, l'avait nourri, et même offert un poste de serveur das son petit café, le temps qu'il se fasse un peu d'argent de côté. C'est d'ailleurs lui avait d'ailleurs trouvé cet emplois chez Lender & sons comme chargé de communication. Il avait été comme un père pour lui, lorsqu'il n'avait plus que lui-même sur qui compter.

Il savait qu'il avait pitié de lui, au point de continuer à lui offrir des cafés en échange de ses nouvelles. Il ne lui en voulait pas en vérité, au moins, il pouvait discuter, échanger de longues conversations avec lui, contrairement à son emplois dans la boîte, répétitif, silencieux et ennuyant.

Cette même boîte dans laquelle il s'apprêtait à entrer. Il passa son badge une fois, deux fois, trois fois même, rien. Jamais la porte ne s'ouvrit, elle resta parfaitement close. Il était planté là, ridicule, voyait les employés rentrer, mais pas un seul ne voulu l'aider, ils passaient par les autres portes. Il y avait toujours cet écran rouge qui affichait "profil supprimé, veuillez vous adresser à l'accueil".

Et au fond de lui, Louis savait que ce n'était pas qu'un problème de réseau.

Il avait été viré.