— Tu peux pas être comme tout le monde, hein ?
La tasse qu'il tenait dans sa main gauche s'écrasa sur le sol dans un fracas, laissant les morceaux s'éparpiller sur le carrelage de la cuisine mal éclairée.
Il passa ses doigts dans ses cheveux couleur or, fixant sa sœur de ses yeux ténébreux.
La jeune fille, ses longs cheveux blonds recouvrant son visage, la tête tournée vers ses pieds, était assise à la table, une larme coulant le long de sa joue.
— Je... je suis... désolée... murmura-t-elle, tremblante.
Un coup brusque, provoqué par le poing de son frère, fit vibrer la table et la fit sursauter.
— Désolée, désolée ! Tu crois que ça va te servir de t'excuser ? La question que je me pose, moi, c'est : comment est-ce que je vais l'annoncer aux parents ?
Son cri résonna dans toute la pièce, et le temps sembla se figer. Un silence intense s'installa, silence vite brisé par le soupir exaspéré du jeune homme.
— Je... je suis désolée...
Elle ne savait pas quoi dire d'autre. La peur l'avait paralysée. Une peur qui commençait lentement à s'effacer.
Elle se leva brusquement, sous le regard surpris de son frère.
— Je suis désolée d'être ta sœur ! C'est ça que tu veux entendre ? Ah, non, tu veux peut-être que je change de personnalité, c'est ça ? Tu es mon frère ! Et tu devrais plutôt m'encourager dans cette période compliquée pour moi au lieu de me rejeter ! Tout cela parce que je suis...
— Ne prononce pas ces mots ici !
Il avait levé la main, prêt à frapper.
— Sors d'ici, Stéphanie, sors !
Stéphanie se dirigea vers la porte d'un pas nonchalant, le regard fixé sur celui qui la détestait.
— C'est pas à toi de me dire ce que je dois faire, Benjamin !
Il croisa les bras, une moue dédaigneuse s'affichant sur son visage rouge de colère.
— Ah, ouais ? C'est qui alors ?
Stéphanie le regarda droit dans les yeux, une goutte de sueur perlant sur sa tempe ; elle n'avait pas l'habitude de se rebeller contre son frère si autoritaire.
— C'est mon cœur.
Sur ces mots, elle claqua la porte et s'enfuit en courant dans le froid hivernal de la rue.
*
Son portable à la main, soufflant des nuages de buée, la jeune fille pianota rapidement sur le clavier, pressée de contacter le rayon de soleil de sa vie.
Arrivée dans un parc aux arbres sans feuilles et aux bancs rouillés, Stéphanie s'adossa à un lampadaire, soucieuse, ses yeux bleu turquoise tournés de part et d'autre du terrain de jeu pour enfants.
— Salut, Steph !
Se retournant pour se retrouver en face de la personne qui l'avait interpellée, un gigantesque sourire passa sur le visage de la jeune blonde.
Émilie.
Cette dernière accourut vers l'adolescente en poussant des cris de joie, cris souvent utilisés pour exprimer sa bonne humeur.
Émilie possédait des yeux aussi magnifiques que surprenants couleur feuilles d'automne, accompagnés d'une masse de cheveux plutôt foncés toujours ébouriffés.
— Je suis tellement heureuse de te voir ! cria celle-ci en sautant dans les bras de l'autre fille.
Stéphanie se dégagea rapidement et un rire sans joie s'échappa de sa gorge. Un air inquiet se forma sur le visage de la brune qui, prenant ses deux mains, offrit un peu de chaleur humaine à l'autre en ce temps glacial.
— Je vois bien que ça ne va pas... Dis-moi tout.
Stéphanie déglutit, baissant la tête vers ses pieds.
— Eh bien... J'ai tout dit à mon frère.
— C'est vrai ? Mais c'est génial ! Oh, pardon... ajouta-t-elle en remarquant le regard noir lancé par la jeune fille.
— Il n'a pas bien réagi du tout. Il a crié, cassé de la vaisselle... Il a même failli me frapper ! Je ne sais pas si ça pourra marcher... Je suis tellement désolée, Émilie !
Prononçant ces derniers mots, elle éclata en sanglots et s'effondra sur un banc placé tout près. Émilie s'assit à côté d'elle et la serra dans une étreinte un peu maladroite.
— Tu sais quoi ? Je m'en moque. Je me moque de ce que peuvent dire les autres. Je me moque des regards dégoûtés que les gens nous lancent. Je me fiche de tout cela ! Le principal, c'est d'être heureux, non ?
Stéphanie se redressa, des étoiles plein les yeux. Elle secoua frénétiquement la tête, essuyant les larmes restées sur ses joues.
— Tu... Tu as raison. Tu as totalement raison ! Nous sommes heureuses, c'est tout ce qui compte, dit-elle, plus pour se rassurer elle-même que pour autre chose.
Émilie s'approcha et colla ses lèvres sur les siennes, entraînant Stéphanie dans un baiser long et fougueux, sous les regards apeurés des passants.
Elles s'aimaient.
Elles étaient différentes.
Et elles acceptaient de l'être.
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Dans ma tête | RECUEIL
RandomEntrez dans un autre monde, Celui d'une fille rêveuse et pleine d'imagination. Entrez dans un labyrinthe de mots, Des mots permettant à cette jeune fille de s'exprimer. Entrez dans un tourbillon de pensées, Un tourbillon dans lequel elle est so...