C'était une sombre nuit glacée que le mois de novembre offrait couramment au pays du matin calme. C'était une nuit comme il en avait existé des milliers, comme il en existerait encore des milliards. C'était une nuit parmi tant d'autres pour Taekwoon, identique à la précédente et aussi identique que la suivante. C'était une nuit de travail pour lui. Tout ne commençait que maintenant, lorsque le soleil se couchait, que la lune apparaissait et que les étoiles brillaient dans le ciel noir sans qu'il ne puisse jamais les voir. Il était là, debout sur le trottoir, comme à son habitude, Soyou veillant de loin à ce qu'il ne lui arrive rien. Il avait froid, il avait faim mais il ne bougeait pas pour autant. Il travaillait, il ne devait pas quitter sa position. Des bruits de pas, une respiration forte se fit entendre juste à côté de lui et il n'en fallut pas plus pour qu'il comprenne que son cauchemar débutait maintenant. Une fois de plus. Une main caressa sa joue froide. Taekwoon ne sursauta pas. Il ne sursautait plus depuis longtemps.
- Combien ? Lui chuchota une voix grave à quelques centimètres de son visage de porcelaine.
Et Taekwoon ne répondit rien, l'emmenant directement auprès de Soyou, lui même ne savait pas combien il valait. Soyou se chargeait de cela, comme du reste. L'homme paya immédiatement, Taekwoon ne s'intéressa même pas à leur petit échange. Comme à son habitude il gravit les escaliers, sentant la présence de l'homme sur ses talons. Il l'avait réservé pour une heure et il ne savait même pas son prénom. Mais après tout il s'en moquait un peu. Voir totalement. La porte claqua et Taekwoon ne prit même pas la peine d'attendre que l'homme lui ordonne quoi que ce soit. Il savait déjà ce qu'il avait à faire. Ses gestes étaient calculés à la seconde près, il était comme un automate, reproduisant chaque soir, et ce, plusieurs fois par nuit, les mêmes mouvements, les mêmes paroles, les mêmes esquisses sur son visage. Il savait qu'il devait accomplir sa tâche sans poser la moindre question.
Après tout, il ne servait qu'à cela. Assouvir les besoins des inconnus pour avoir droit à un logement, de la nourriture et un peu de chaleur humaine. Mais aussi pour avoir le droit de vivre. Sans Soyou, Taekwoon le savait parfaitement, il ne serait probablement plus de ce monde. Alors plutôt que de se lamenter sur sa triste vie, il devait être reconnaissant et montrer tous les jours sa gratitude envers cette vieille femme pour l'avoir sauvé d'une mort certaine... Mais il se demandait si cela n'aurait pas été mieux pour lui... C'était certain, il aurait préféré mourir que de subir le toucher et les paroles dégoûtantes de tous ceux qui l'avaient sali à jamais. Il enleva ses couches de vêtements que Soyou avait pris soin de lui choisir avant qu'il ne sorte faire sa ronde sur les trottoirs, ses deux petites oreilles de chats aux aguets en entendant la respiration de l'homme se rapprocher de plus en plus.
- Chuuut. N'aie pas peur Léo.
Sa réputation le suivait n'importe où et il n'était pas rare que des étrangers fassent un bout de chemin uniquement pour s'abandonner aux plaisirs de la chair avec un être comme Taekwoon. Le client de ce soir en faisait parti. Issu d'une bonne famille, il pouvait facilement avoir ce qu'il voulait rien qu'en claquant des doigts. Il avait déjà tout. Maintenant il voulait Taekwoon.
Il sentit une paire de lèvres se poser à la base de son cou et un haut le cœur le prit. Tous ces attouchements qu'il subissait, les gémissements qu'il entendait le rendaient malade. Il n'éprouvait jamais le moindre plaisir, même lorsque ses clients étaient gentils avec lui. Ce qui n'arrivait que très rarement. En même temps comment aurait-il pu ressentir ne serait-ce qu'une vague de ce plaisir tant convoité alors qu'on le forçait à avoir une relation sexuelle avec un inconnu ? Alors il ne faisait pas attention, à ces mots, ces gestes, cette douleur qui le prenait toujours lorsque que le sexe dur et gorgé de sang de son client entrait en lui avec force. Ça ne devait pas le toucher. Rien ne devait le toucher.
Il savait son calvaire terminé - pour un temps du moins - lorsqu'il entendait l'homme pousser un soupir de satisfaction en sortant de son antre de chair chaud et terriblement étroit que beaucoup d'hommes avaient l'air d'apprécier. Taekwoon se laissa glisser à terre et chercha à tâtons ses vêtements, ne pouvant se permettre de prendre froid et de poser quelques jours de congé maladie. Encore une fois il n'avait rien ressenti, si ce n'est de la douleur et du dégoût. Il aurait dû être content d'avoir enfin fini avec cet homme et tout ce qu'il souhaitait c'était se glisser dans la chaude couverture que Soyou lui avait donné, de se rouler en boule et d'y dormir paisiblement jusqu'au petit matin. Mais cela était impossible, il le savait bien. D'ici quelques minutes il devrait aller faire son rapport à Soyou, lui assurant que l'homme n'avait pas été trop violent, ce qui lui était arrivé plusieurs fois et si cela avait été le cas, elle soignait ses blessures correctement et avec grand soin. Après tout Taekwoon était le meilleur gagne pain qu'elle n'ait jamais eu. Elle se devait donc de faire attention à lui.
Toujours à terre, Taekwoon ne parvenait pas à trouver son petit gilet noir qui complétait à la perfection sa tenue. Une main sur la sienne le fit sursauter et reculer de quelques pas. Dans sa peur il avait poussé un petit miaulement involontaire - qui ressemblait plus à un crachement - ses petites oreilles plaquées contre sa chevelure ébène. Avançant une main, Taekwoon attrapa son vêtement que l'homme lui tendait et le tira avec force. Que faisait-il encore ici ? Il n'en savait foutrement rien mais il ne resta pas dans la même pièce pour le savoir. Après tout il s'en moquait. À tâtons, il sortit de la chambre, descendit les escaliers avec prudence car pour s'être déjà mangé de belles gamelles, il savait qu'il devait être patient aujourd'hui. Il sentit un courant d'air froid passer à côté de lui et Taekwoon n'eut aucun mal à sentir le parfum qu'il avait dû supporter durant la dernière heure, mélangé à la sueur qui avait failli le faire vomir. L'homme venait de partir. La cécité de Taekwoon lui avait ouvert les autres portes de ses sens, c'est ainsi qu'il sut que Soyou l'attendait, assise comme à son habitude à table, probablement en train de compter sa recette si Taekwoon se fiait au bruit de froissement de ses fameux billets verts qu'il entendait.
- Rien à signaler ? Demanda-t-elle.
- Non.
- Wonsik est un homme de parole alors. Je suis sûr qu'il deviendra un client régulier !
Ainsi il s'appelait Wonsik... Et Taekwoon se demanda en quoi cela pouvait lui être utile. Il s'en moquait. Éperdument. Qu'il se nomme Bonhwa, Jinyoung ou même Baeil. C'était un homme qui avait payé pour pouvoir le toucher et le salir. C'était un homme qui n'avait rien fait à part lui faire du mal. Par définition c'était un homme mauvais, comme tous ceux qui l'avaient précédé, comme tous ceux qui le précéderaient encore.
- Bois et mange un peu. Ensuite tu pourras continuer.
Il hocha la tête, s'assit sur une chaise en remontant ses jambes, attendant simplement qu'elle lui apporte son repas, comme tous les soirs. Dans n'importe quelle situation il se repliait toujours sur lui-même, espérant ainsi se protéger du monde extérieur qui le terrorisait. Son petit nez se renfrogna en sentant la si délicieuse odeur de poisson qu'il adorait tant. Soyou lui préparait toujours le même repas, c'était ce qu'il préférait. Et rien que pour cela, il se devait d'être reconnaissant. Il mangea en un temps record, se délectant du lait froid coulant dans le fond de sa gorge avant qu'il ne se lèche les babines. Un petit moment de bonheur avant de repartir pour l'enfer. Le seul de sa journée en fait. Et il en profitait toujours un maximum, sachant que pour avoir le prochain, il devrait encore subir les attouchements des inconnus. C'était sa vie, c'était ce pourquoi il devait se lever chaque jour.
Il dormait, mangeait du poisson, buvait du lait et se prostituait chaque fois que la noirceur s'engouffrait à travers les rues de la ville. Mais d'ici d'une dizaine de jours, Taekwoon savait qu'il allait au moins avoir le droit de souffler un peu. Rien qu'un peu. La pleine lune était programmée, le seul moment où Taekwoon se transformait en cette petite chose inoffensive et où personne ne voulait lui faire de mal. Son seul souhait était la métamorphose totale. Ne plus jamais redevenir le pantin sexuel dont le monde s'amusait à tirer les ficelles. Il voulait juste être une petite boule de poil noire, jouer avec un bout de ficelle, en se faisant dorloter par une petite fille de quatre ans, et son seul but serait d'attaquer les souris et de trouver le moyen de chiper le poisson dans l'aquarium.
Ce n'était vraiment pas la vie qu'il avait rêvé, la vie qu'il avait imaginé. Mais la vie, elle, l'avait choisie lui. Quelque fois il se demandait ce que ses parents en auraient pensé, du chemin qu'il avait été forcé d'emprunter sans possibilité de revenir en arrière. Ce qu'il serait devenu si ses parents n'avaient pas péri tragiquement. Auraient-ils été fiers de lui ? À quoi Taekwoon aurait-il ressemblé ? Ce qu'il aurait fait comme études. Tant de questions qui restaient sans réponse et il savait que jamais il ne connaîtrait cela. Ils auraient honte probablement. Du fils qu'ils avaient mis au monde et qui offrait son corps chaque soir de la semaine. C'était son métier, c'était sa vie. C'était ce pourquoi il vivait encore.
C'était donc la même nuit qui se répétait chaque soir. Rien ne changeait, tout se passait exactement comme la veille. C'est ainsi que le lendemain soir, même heure, Taekwoon était déjà sur le trottoir, malgré qu'un de ses clients la veille ait été particulièrement violent envers lui. Il portait encore sur son dos les marques de sa folie. Soyou l'avait soigné mais l'avait remis sur le chemin du travail en un temps record. Il se déplaça à tâtons et frissonna lorsque la froideur de la nuit le frappa de plein fouet. Il fit quelques pas, se figea et attendit un nouveau client. Cependant quelque chose d'étrange se passa. Des bruits de pas. Une respiration. Une caresse sur sa joue. Un murmure. Un parfum que Taekwoon n'eût aucun mal à reconnaître. Wonsik était revenu.
☆☆
salut les amis !
voilà donc le chapitre 1 de blind <3 j'espère très sincèrement que cette fiction vous plaira !! j'adore l'écrire vraiment j'crois que j'aime quand c'est un peu "sombre" si je puis dire. j'ai essayé de former des phrases correcte et cohérente vraiment je prends le temps sur cette oeuvre pour vous plaire !
voilà j'espère que ce chapitre vous a fait un peu bader quand même et j'vous dit à bientôt pour un prochain chapitre !
xoxo
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blind
Fanfic〔VIXX〕 [taekwoon + wonsik] - édition 2018 fiction en cours : ©darianilduenilun