Capharnaüm

vis /02.11.02

Bonsoir, petite fille à la balançoire,

Sais-tu que le ciel ne veut pas de toi ? Il s'échappe dès que tu lèves la main. Plus haut tu parviens à te balancer, plus il semble s'éloigner.

N'as tu pas remarqué que les étoiles t'interdisent même de sortir le soir ? Il est trop tard petite fille.

Le ciel ne veut pas de toi.
Arrêtes de rêver et regarde sous tes pieds. Ne vois-tu pas le sol qui te retient ?
Ne vois-tu pas que c'est la terre qui te rattrape à chaque fois que tu tombes de cette balançoire ?
Restes avec moi petite fille.

Regarde tes genoux. N'en as-tu pas assez de chuter ?

Il y a bien longtemps que même les nuages des murs de ta chambre d'enfant t'on abandonnée.
Il y a bien longtemps que tu es seule dans ce parc.

Même quand le ciel te crache à la figure toute l'eau dont il ne veut plus, tu restes là, la langue pendue.

Il te chasse, le ciel.
Et toi, tu restes.

Tu es trop grande pour rêver petite fille.
Rentres à la maison. Accomplis ton devoir. Reviens sur terre, petite fille.

Laisses tes pieds sentir la fraîcheur de la pelouse.
Laisses les insectes te chatouiller.

Recommence à rire, petite fille.
Fermes les yeux. Ne regarde plus le ciel.
Laisse ton chagrin là haut, petite fille. Tu sais très bien que c'est fini.

Tu sais très bien qu'il ne reviendra pas. Même le ciel ne veut pas de toi.

Tu es trop bête petite fille.
Laisse les fleurs fleurir dans tes yeux.
Laisses leurs épines griffer tes bras.
Ressens, petite fille.
Accordes toi des sentiments.
Grandis, petite fille.
Deviens adulte, petite fille.
Tu n'as plus ta place.
Tu n'es plus, petite fille.

Laisses la glace refroidir ton cœur.
Laisses l'orage s'exprimer en toi.
Devient quelqu'un, petite fille.
Un jour, le ciel t'admirera.
Un jour, il reviendra. Lorsque tu ne voudras plus de lui, à son tour.
Il viendra te chercher, petite fille. Lorsque tu ne seras pas prête
Il sera trop tard petite fille.
Fuis le ciel temps que tu le peux encore.
Vis, petite fille, temps que tu le peux.