Chapitre II

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Ce soir c’est décidé je profite. J’ai dû supporter Zachary et ses conneries pendant exactement soixante-douze heures et je crois que si aujourd’hui je ne passais pas la journée avec Sofia j’aurais déjà commis un massacre. Cet imbécile a volé la clé de ma chambre et a fermé la porte de l’extérieur pour m’enfermer, je suis restée coincée toute la journée jusqu’à ce que Dorian passe enfin dans le couloir et entende mes cris, parce que oui évidemment il a aussi veillé à ce que mon téléphone disparaisse. Quand je me suis fait couler un bain il a profité de mon absence pour régler l’eau sur la chaleur maximale.
Et hier soir il a volé une seconde fois mon téléphone, ce que je viens de remarquer puisque je viens de me réveiller. Je sors donc de ma chambre comme une furie. Si je n’ai pas mon téléphone je ne pourrai pas envoyer des messages à Eliott. On ne s’est pas vraiment parlé depuis sa proposition de sortie, juste des discussions courantes comme Salut. Ça va ? Tu fais quoi ? Mais si je ne peux pas lui envoyer de messages on ne pourra pas se retrouver et c’est hors de question que mon stupide demi-frère gâche cette soirée. Je fais irruption dans sa chambre, il est profondément endormi. Je crois qu’il est rentré tard hier soir parce que quand je me suis couchée à minuit il n’était pas encore arrivé. Il est sorti je ne sais où avec Sébastian. Je ne veux même pas savoir où ils sont allés.
— Zachary Collins réveille-toi tout de suite !
Même en lui donnant quelques baffes, il continue de dormir. Ça me donne presque l’impression qu’il est en train de me narguer.
Couché sous ses draps mais avec son torse nu et musclé à portée de vue. Je ne peux pas m’empêcher de loucher sur son corps d’athlète.
D’un côté ce n’est pas de ma faute. Pourquoi a-t-il fallu que ce mec si insupportable soit aussi beau? Non ! Je secoue vite ma tête pour reprendre mes esprits. Je me fiche de son corps de rêve, de ses cheveux en bazar qui lui donnent cet air de mauvais garçon si irrésistible, de ses bras si musclés et wow! Wow wow wow il faut que je me calme là. Mon téléphone. Je dois retrouver mon téléphone. Je m’approche de lui pour le secouer, le frapper plus fort et même abattre un oreiller plusieurs fois sur son visage. Mais rien ne le réveille. Même quand je tire les rideaux pour laisser entrer la lumière il se contente de se retourner. Je ne suis pas dupe. Il fait semblant, je le sais. Je sors encore plus en colère et je vais dans la salle de bains prendre le seau d’eau qu’on utilise d’ordinaire pour la serpillière, je le remplis d’eau bien froide, j’ajoute quelques glaçons puis je repars dans sa chambre, je monte sur le lit et je retourne le seau pour que le liquide glacé s’écroule sur lui. Et cette fois il se réveille en sursaut. Même si sa réaction me donne envie d’exploser de rire je ne perds pas de vue mon objectif premier.
— Mon téléphone Zachary. Où il est ?
Il lève enfin la tête vers moi fou de rage.
— Non mais tu es complètement tarée !
Puisqu’il n’a pas l’air de vouloir coopérer, je verse le reste d’eau que contenait le seau sur sa tête avant de lancer le récipient sur lui.
— Rends-moi mon téléphone !
— Alors toi tu vas le regretter.
Et merde. Je saute du lit à toute vitesse et je cours pour sortir de la chambre, mais il me poursuit bien sûr. Il n’allait pas me laisser m’en sortir aussi facilement et je le savais très bien quand je préparais mon plan pour le réveiller. Il arrive à me rattraper en bas des escaliers où il me soulève en enroulant ses bras autour de ma taille.
— Lâche-moi!
Aucune pensée pour les autres personnes endormies dans cette maison.
— Je t’aurai prévenue Amyra Salem.
Et il entre dans la cuisine pour ouvrir le réfrigérateur. Et tout ce que je sais après ça c’est que je sens quelque chose se casser sur ma tête et une odeur répugnante s’en échapper. Un œuf, forcément pourri, puisqu’il sent affreusement mauvais. Un des seuls défauts de ma mère et de Dorian: ils sont tellement absorbés par leur travail, qu’ils ne se préoccupent jamais de ce qui traîne durant plusieurs semaines dans ce frigo. Il fallait que Zachary tombe sur celui-ci en particulier. Ce dernier me lâche enfin, mais lorsque je me retourne vers lui j’en reçois un autre en pleine figure, c’est dégoûtant, j’ai presque envie de vomir. J’essuie le liquide gluant avec mes doigts, rien ne pourrait alors calmer ma rage.
— D’accord Zachary Collins tu veux la guerre ? Tu vas l’avoir.
J’ouvre le placard, je m’empare de la farine, et lui en lance des poignées, alors que lui continue de me prendre pour cible avec les œufs. J’attrape ensuite la chantilly et je l’attaque. Je l’en recouvre pendant qu’il s’amuse à faire pareil sur moi avec de la confiture cette fois.
— Non mais qu’est-ce qui se passe ici ? !
La voix de ma mère nous arrête aussitôt. Elle et Dorian, nous regardent avec plus de stupéfaction que de colère. Ils ne trouvent rien à dire pendant quelques secondes puis c’est Dorian qui parle.
— Bon écoutez vous êtes trop vieux pour qu’on vous fasse la leçon et on est encore à moitié endormis. Alors rangez-moi tout ce bazar maintenant avant que je ne change d’avis.
Et ils repartent. Sûrement pour se rendormir. Ils ne crient jamais alors je ne suis même pas étonnée de leur réaction. Ils ont dû rater les cours d’autorité à l’école des parents. Ça ne m’étonne pas que
Zachary soit aussi stupide puisque Dorian le laisse tout faire sans jamais rien dire. Je me tourne vers lui dès que nos parents sont hors de vue.
— C’est de ta faute tout ça, dis-je dans un murmure en serrant les dents.
— Ma faute ? Attends c’est toi qui es venue me réveiller avec un seau d’eau glacée.
— Parce que tu as volé mon téléphone imbécile ne fais pas l’innocent.
— C’est ça ouais. Tu sais quoi ? Range tout ça moi je vais me doucher.
— Tu te fous de moi là j’espère ?
— Absolument pas.
Il commence à s’éloigner alors je prends à mon tour un œuf pour le lancer sur lui. Le crétin s’arrête, ne bouge plus pendant un court moment, puis s’approche calmement de moi, avant de prendre le pot de farine pour le lancer sur moi. Et ça reprend. Ce n’est qu’une heure et demie après que tout est nettoyé et que je sors de la douche. Avec ce mélange d‘ingrédients, mes cheveux étaient impossibles à laver. Heureusement j’y suis parvenue avec une tonne de shampooing. Mais je n’ai toujours pas mon téléphone. Alors je vais voir Charlie dans sa chambre, elle joue à la caissière dans sa jolie tenue de princesse.
— Salut toi.
— Amyra ! Viens je vends des léyumes!
— Légumes. On dit légumes.
Je souris et je vais m’installer sur son lit recouvert de draps roses. En fait toute la chambre est rose, je ne comprends pas. J’ai toujours détesté cette couleur, même à son âge. Je ne comprends pas pourquoi tout le monde dit que le rose c’est pour les filles et le bleu pour les garçons. Le bleu a toujours été ma couleur préférée et c’était la couleur de ma chambre étant petite. Mais Charlie est totalement différente de moi, c’est pour ça que je la trouve si mignonne, elle arrive toujours à me surprendre. Et je peux toujours compter sur elle pour une chose précise.
— Chérie je peux te demander un service ?
— Ouiiii!
Je lui fais signe de parler moins fort et de s’approcher de moi. Je chuchote pour que personne ne puisse entendre notre conversation.
— Tu sais où est mon téléphone pas vrai ?
Elle fait une petite mine méfiante.
— Zachary a dit que c’était un secret.
— Mais tu sais que je sais garder les secrets. Rappelle-toi la fois où tu as volé le rouge à lèvres de maman. Je n’ai jamais rien dit à personne et je t’ai même aidée en le remettant en place après.
La petite hésite encore un instant avant de me lancer un regard plein de confiance.
— Zuré ?
Je souris et lève ma main solennellement.
— Zuré.
Son sourire malicieux de petite fille de cinq ans revient enfin.
— Attends ici.
Et elle sort de la chambre comme une flèche. Elle revient quelques minutes après avec le précieux objet dans la main et je la prends dans mes bras pour la serrer fort.
— Merci ma puce. Je t’offrirai une nouvelle poupée pour ta collection.
Elle tape des mains en riant fière d’elle, je dépose un baiser sur le haut de son crâne, et rejoins ma chambre pour préparer mes affaires.
Je vais aider Sofia à tout mettre en place et ensuite je reviens ici pour me changer, et pour donner un prétexte à Eliott de venir me chercher ici, histoire d’énerver mon frère qui ne veut toujours pas que je sorte avec un de ses potes. D’ailleurs mon téléphone sonne, c’est Sofia. Je réponds en me laissant tomber sur le lit, déjà épuisée de cette journée qui commence à peine.
— Sofia je vis un enfer depuis mon réveil.
— Laisse-moi deviner. Vu que je t’ai laissé plusieurs messages et que tu n’as répondu à aucun de mes appels je suppose que Zachary s’est encore amusé à voler ton portable et vous vous êtes encore battus pour qu’au final ce soit ton adorable demi-sœur qui sauve la situation.
Là elle me fait peur.
— Attends tu n’aurais pas installé des caméras chez moi ?
— Je sais je suis trop forte. Mais en attendant je t’attends, alors laisse tomber le gars trop sexy de la chambre d’en face et viens chez moi. Tout de suite.
Et elle raccroche pour ne pas me faire perdre plus de temps évidemment. Elle va finir par me tuer celle-là un jour. Je prends mes affaires, descends pour la millionième fois ces escaliers et je sors pour me rendre chez mon amie qui n’habite pas très loin. Elle vit même assez près pour que je puisse y aller à pied. Je me retrouve de corvée de ballons. Elle aime les ballons, elle dit que ça renforce le côté festif. Puis ce sont les branchements de la chaîne Hi-fi que personne n’utilise jamais en dehors des soirées que je dois gérer.
Ensuite c’est au tour du rangement en lieu sûr de tous les objets précieux ou fragiles, et pour finir les boissons et la nourriture. Malgré la pause du midi, j’ai l’impression que je ne me suis pas reposée de toute la journée, je suis épuisée. Et c’est déjà l’heure de rentrer chez moi pour me préparer. Sofia m’accompagne jusqu’à la porte d’entrée de sa maison, les bras chargés de gobelets en plastique.
— Je n’ai qu’un conseil à te donner chérie, sors le décolleté bien décolleté.
N’importe quoi.
— Je ne veux pas paraître vulgaire dès le premier soir.
— Mais tu dois mettre en avant tes atouts. Si j’avais des seins comme les tiens j’en profiterais moi.
— Si tu avais des seins comme les miens tu ne dirais pas ça.
— Je ne le saurai jamais. Mais fais ce que je te dis.
Et elle me pousse hors de la maison en claquant la porte derrière moi. Oui oui elle m’a mise dehors. Elle a de la chance que j’aie l’habitude qu’elle fasse des choses comme ça. J’hésite à suivre son conseil. Je n’aime pas que les gens remarquent ma poitrine ce qui se fait tout le temps. Sofia n’est pas non plus plate comme un bâton, elle exagère. Je rentre chez moi en essayant de ne pas m’écrouler de fatigue sur le sol en chemin. Et quand j’arrive, je tombe bien sûr sur mon grand frère qui sort justement avec les clés de voiture de notre mère à la main. Au début je le laisse passer à côté de moi sans lui adresser la parole, puis je me retourne alors que sa main se posait sur la poignée de la porte.
— Tu sors ?
Il soupire.
— Je vais voir des potes. C’est bon je peux y aller maman?
Parler. Il faut lui parler. Mais comment parler avec quelqu’un qui ne veut rien entendre ? Bon autant y aller direct il n’aime pas que les gens tournent autour du pot.
— Sébastian qu’est-ce qui t’arrive ? Tu es différent depuis le divorce de papa et maman et je ne sais plus comment m’y prendre avec toi.
Je vois pendant une fraction de seconde une expression autre que de la colère et du mépris sur son visage. Mais elle s’envole très vite.
Comme s’il s’en voulait de se comporter comme ça avec moi mais qu’il avait peur de l’admettre.
— Je vais bien Amyra. Je suis l’aîné et je gère mes affaires tout seul alors arrête de t’en mêler c’est clair ?
Et il claque la porte en sortant comme toujours. Je soupire désespérée. J’aurais au moins essayé. Mais d’un côté ça a un peu fonctionné, pendant un court moment j’ai retrouvé mon grand frère et je vais tout faire pour que ça recommence. Je sais qu’il a besoin de moi comme j’ai besoin de lui alors je ne laisserai pas tomber c’est décidé. Je me retourne pour voir à la place des escaliers vides, un autre garçon que j’aurais souhaité ne pas revoir de la journée. Il est assis sur les marches et arbore un sourire qui me tape sur les nerfs.
— Des problèmes avec ton frangin peut-être ?
— Moins qu’avec toi en tout cas.
J’avance en évitant de le regarder mais quand je passe à côté de lui:
— Tu as un rencard ce soir non?
Qui lui a dit ? À tous les coups c’est la petite, une chose est sûre, elle, elle ne sait pas garder les secrets.
— Et alors ?
— Tu n’as pas peur qu’il te trouve ennuyeuse à mourir ?
Je lui adresse un grand sourire et je décide de monter sans répondre à son attaque. Mais évidemment il me suit.
— Quoi c’est tout ? Tu ne dis rien?
— Il n’y a rien à dire. Si je te réponds on va continuer de se disputer comme d’habitude, il ne me restera que très peu de temps pour pouvoir me changer et quand Eliott arrivera je serai encore en peignoir.
— Attends quoi ? Eliott ? Tu sors avec Eliott ?
Oups. Est-ce que j’ai vraiment fait une gaffe ?
— Non.
J’entre dans ma chambre et fonce jusqu’à mon armoire pour l’ouvrir et mettre la porte entre Zachary et moi. Mais il la referme et s’appuie contre le meuble, les bras croisés et le regard amusé.
— Tu sors avec Eliott j’y crois pas.
— Qu’est-ce que ça peut te faire ?
— Oh rien je me souviens juste de ses exploits avec les filles au lycée. Un vrai coureur de jupons celui-là.
— Il ne peut pas être pire que toi.
J’ouvre la porte en le poussant mais il la referme et se penche à nouveau vers moi.
— Je ne cours pas après les filles Amyra Salem, ce sont les filles qui me courent après. Et généralement je ne leur donne pas ce qu’elles veulent.
— Généralement ?
Je croise à mon tour mes bras et je me mets bien face à lui pour lui montrer que je ne suis absolument pas intimidée. Et ça a l’air de lui plaire que j’entre dans son jeu, comme si c’était la seule chose qu’il attendait depuis le début.
— Parfois je fais des exceptions, poursuit-il en souriant.
Je ne sais pas si je dois être amusée, dégoûtée ou exaspérée. Je choisis de lui montrer la première option.
— Je vois. En tout cas j’adorerais rester là à parler de tes conquêtes sans lendemain encore longtemps mais je dois me changer pour mon rendez-vous.
— Tu as peur de te déshabiller devant moi ? J’ai déjà vu mieux que toi tu sais je ne vais pas te sauter dessus.
Il est fier de lui. Je vais lui enlever sa fierté moi. Je lui souris pour la énième fois avant d’aplatir ma main sur sa joue. Le bruit de la claque résonne dans la pièce et je vois la marque rose sur sa peau dès que je retire ma main. Il ne dit rien mais je vois qu’il trouve toujours la situation drôle. Ça l’amuse que je le gifle et que je perde mon sang-froid.
— Le masochisme ça se soigne au cas où tu ne le saurais pas, lui dis-je en soupirant. Alors ne me cherche plus sinon ce n’est pas une simple gifle que je te donnerai et tu sais très bien de quoi je parle.
Et je pars vers la salle de bains. Oui il sait de quoi je parle. Avant son départ pour l’université je lui ai cassé le nez en lui donnant un coup de poing. Il m’énervait trop pour que je le laisse continuer de me rendre dingue. Pour mon grand plaisir il me laisse enfin tranquille le reste de l’après-midi et je parviens à me préparer. En fait je finis juste de mettre mes boucles d’oreilles quand Eliott arrive. Je cours le rejoindre, il est devant sa décapotable rouge, il porte une chemise à carreaux qui lui donne un air sage et distingué. Tout le contraire de Zachary avec ses vestes en cuir et ses cheveux en pagaille qui correspondent au vrai stéréotype du bad boy en puissance. Même s’il est vraiment canon comme ça, il a son mauvais caractère qui fait que celui d’Eliott, calme et adorable lui fait de l’ombre. Et puis de toute façon pourquoi je pense à ce crétin ? Il ne mérite même pas deux secondes de mon attention.
Je remets bien en ordre une mèche de mes cheveux, je tire un peu sur ma robe pour l’ajuster et me voilà qui m’avance vers lui. Je suis un peu nerveuse mais c’est normal de l’être j’imagine. Cependant je me calme quand, près de lui, je remarque que lui non plus n’est pas tout à fait tranquille. Il fait tout de même un effort pour ne pas le montrer.
— Tu es magnifique.
Magnifique. Il exagère un peu, j’ai juste mis une robe bleue en dentelle suivant le conseil de mon amie. C’est d’ailleurs sûrement ce qu’il trouve magnifique. Non. Non Eliott n’est pas comme ça, je dois me détendre un peu et arrêter de penser à ce que Zachary m’a dit sur lui. Je vais juste profiter de la soirée. Je le remercie donc. Pendant le trajet on ne sait pas vraiment quoi se dire, je pense qu’on est tous les deux trop gênés pour parler. Une fois sur place la musique qui est à son maximum brise le silence qui régnait quelques secondes plus tôt. La pelouse est envahie de gens qui rient, boivent, et dansent.
À l’intérieur c’est deux fois pire. Il n’y a pas un seul endroit libre de présence humaine. Je ne ferai aucun commentaire sur la piscine derrière la maison. Je me demande si Sofia n’a pas passé une annonce dans les interphones du lycée pour inviter tous les élèves plus leurs amis inconnus. Autrement je ne vois vraiment pas comment elle pourrait connaître autant de gens. Eliott me propose d’aller me chercher un verre, je me retrouve alors seule le temps qu’il se rende jusqu’à la table des boissons que j’ai installée moi-même. Et quand il revient je décide de l’emmener dans un endroit plus calme, je connais cette maison dans ses moindres recoins.
En un rien de temps, nous nous retrouvons allongés sur le toit à parler de tout et de rien. La discussion s’est lancée sur le sujet des petites sœurs. On se raconte des anecdotes amusantes sur les petites et je me rends compte que je devrais acheter plus d’une poupée. Puis on parle des études, je lui raconte ce que je voudrais faire : quitter cette ville pour toujours. Il me parle de sa vie à l’université. Et puis au bout de longues heures le dialogue devient presque normal entre nous. J’aime bien parler avec lui, il sait écouter. Il est parfait.
Beaucoup trop parfait, je commence à me méfier. Est-ce qu’il est vraiment aussi gentil et drôle intentionnellement ou est-ce qu’il joue un rôle ? Il est plus vieux que les garçons de mon âge et plus mature, il sait quoi dire à une fille pour la séduire. C’est pourquoi je prends peur quant à un moment il se penche vers moi pour essayer de m’embrasser. Je me redresse en regardant l’heure sur mon téléphone.
— Waouh il est déjà minuit passé ! Je prends le ton le plus naturel possible. Je pense qu’on devrait rentrer.
— Euh… ouais d’accord.
Je vois bien qu’il n’en a pas envie mais je suis totalement perdue là maintenant et je voudrais juste rentrer. Et puis je commençais à manquer de choses à dire. On redescend tous les deux. Au rez-de-chaussée je vois ma meilleure amie, debout sur une table, en train de danser une bouteille de whisky à la main. Il ne manquait plus que ça.
Je me tourne vers Eliott gênée.
— Je crois que je vais rester je dois… m’occuper de la maîtresse de maison.
Il jette un coup d’œil dans la direction de Sofia puis me regarde à nouveau.
— Tu veux de l’aide ?
— Non ça ira, vu l’état dans lequel elle est, il n’y a que moi qui puisse la gérer. Ça va aller tu peux rentrer.
Il hoche la tête et s’approche. Alors que je m’apprêtais à faire un pas en arrière pour éviter ce baiser, il tourne la tête et dépose ses lèvres sur ma joue. Soulagée, je lui souris et le regarde s’éloigner le sourire aux lèvres. Il me faut maintenant reprendre mes esprits et aider ma meilleure amie à ne pas casser sa propre maison à commencer par la table sur laquelle elle se trémousse. Je m’efforce de me frayer un chemin parmi la foule qui l’entoure.
— Sofia ? ! Sofia ? !
Elle me remarque enfin et saute de la table, mais son atterrissage n’est pas parfait et je suis obligée de la rattraper avant qu’elle ne s’écroule sur le sol.
— Hey! Amyra ! Comment ça va ? ! Où est ton rencard? ! Il t’a abandonnée ? ! S’il t’a laissée tomber je le retrouve et je lui fais sa fête !
— Oui bien sûr en attendant suis-moi la tienne est terminée.
Je passe un de ses bras autour de mon cou et je l’emmène vers les escaliers. En chemin devinez qui je croise. Le déchet de la nature. Il discute tranquillement avec des garçons de son âge et quand il me voit il se met à sourire, pour s’approcher pendant que j’essaie de traîner Sofia qui se débat.
— Je ne veux pas partir Amyra je m’amuse !
— Oui mais tu t’amuses un peu trop là.
Zachary arrive devant nous pile au moment où mon pied atteint la première marche des escaliers.
— Jolie robe Amyra Salem. Je crois avoir vu une de mes profs de l’université porter la même.
— Et tu te crois drôle ?
Je tente de monter quelques marches mais Sofia qui cherchait à s’enfuir, perd l’équilibre avant d’être rattrapée de justesse par mon emmerdeur de demi-frère. Il la retient et la soulève tandis qu’elle s’endort paisiblement.
— Besoin d’aide peut-être ?
Décidément, il me nargue !
— Ça te ferait trop plaisir que j’accepte.
— Mais tu n’as pas vraiment le choix.
Il a raison. Je serre les dents un instant avant de mettre de côté ma fierté pour mon amie.
— D’accord suis-moi.
On monte tous les deux à l’étage, où Zachary dépose sur son lit une Sofia qui ronfle déjà. Je referme bien la porte à clé pour que personne ne la dérange. Mais une fois seuls, Zachary se met à me regarder en souriant encore plus que d’habitude.
— Qu’est-ce que tu as Zachary Collins ? Tu viens de te rendre compte que tu es un cas désespéré et ça te fait rire ?
— J’attends juste des remerciements.
Je lève les yeux au ciel et je passe à côté de lui pour redescendre.
— Je dois m’occuper de la soirée maintenant que Sofia est hors service.
J’allais m’engager dans les escaliers quand:
— Je te trouve canon dans cette robe au fait.
J’ai l’impression qu’il vient de parler dans une langue totalement inconnue.
— Quoi ?
— Tu es la seule à pouvoir la mettre aussi bien en valeur.
Et encore une fois son regard se baisse un peu trop, ce qui m’exaspère encore.
— Sale obsédé !
Je descends les escaliers, où un énorme problème se pose. Pourquoi est-ce que je ne peux pas m’empêcher de sourire ?

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