Ne rien dire, tout garder

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La pluie m'avait surpris en sortant de Yuei à la fin des cours. Merci à Todoroki qui a toujours deux parapluies avec lui et qui a accepté très chaleureusement de m'en prêter un.
Mais au fond de lui, il savait que c'était important que je prenne quelque chose pour me protéger de la pluie. Il savait où j'allais tous les soirs, il savait ce que j'espérais.
Par ce simple geste amical, il me soutenait.

Car contrairement à ce que pourrait penser Kacchan, Shouto n'avait jamais voulu lui faire de mal. Il l'appréciait en tant que camarade de classe, c'était une chose énorme compte tenu du caractère que Katsuki détenait.
Ce garçon de feu et de glace n'était pas le coupable, je le savais. Mais penser à un coupable dans cet accident me faisait trembler.
Évidemment que Bakugou était le seul responsable de ses erreurs, personne n'en doutait car c'était vrai.
Mais entendre ceci de la bouche de quelqu'un faisait toujours mal, peu importe la personne.

Et ainsi, par ce lundi de pluie, je me retrouvai inévitablement sous son palier à attendre que sa mère vienne m'accueillir chez eux.
Le même sourire faussé sur son visage. Un sourire falsifié par la perte d'honneur de son fils.

Je retirai mes chaussures dans le hall par tradition et posai mon blouson sur le porte-manteau prévu à cette issue.
Sa mère me proposa du thé, que je refusai. Comme à notre habitude. Ses actions répétées en long, en large et en travers, je pouvais les répéter par cœur, indéfiniment.
Les escaliers m'appelaient désespérément, attendaient que je les monte, marche par marche, pour atteindre mon ultime but : sa porte. Une porte qui sera toujours fermée à mon arrivée.

Puis, après m'être excusé auprès de sa mère, je montai ses interminables marches. Un long chemin jusqu'à la solitude et le rejet.
Un chemin que je faisais tous les soirs, avec un courage mis à rude épreuve.

"Ah! Que j'aimerais revoir son visage et le serrer dans mes bras!" c'était les sentiments que je gardais, enfouis au plus profonds de moi-même. Des sentiments que je ne pouvais refouler, et dont je connaissais bien la provenance.
Toute les nuits, je m'étais mis à regretter notre enfance. Une enfance avec un Kacchan si différent, si admirable.
Je tenais à lui.

Ça y est, j'étais devant le seuil de sa porte.
Mes poings avaient déjà toqués trois fois sur celle-ci, et j'attendais désormais une réponse.
Un mouvement, un bruit, un souffle ferait l'affaire. Du moment que c'est de lui.
Mais rien, comme tous les soirs.

Mais alors, pour la première fois, je lui glissai une enveloppe sous la porte et m'en allai.
Je venais de faire pénétrer une lettre écrite de ma main dans son antre. J'espérais qu'il la lise avant de la déchirer.
C'était un grand pas en avant que je faisais.

Je remis mes chaussures, repris mon parapluie et mon blouson et sorti sous cette pluie ravageuse.
Pardon maman, je serais encore en retard. Enfin, ce n'était pas si grave après tout, elle avait l'habitude de me voir rentrer tous les soirs après le dîner. Elle me pardonnerait.

Dans un grand souffle, je m'élançais sous les cordes d'eau qui rebondissait sur mon parapluie. Mes chaussures finiront trempées avant même que je ne rentre chez moi, je détestais ça.

Un pas, deux pas et au troisième, je me rendis enfin compte que ce qui coulait sur mes joues n'était pas de l'eau venant des nuages, mais bien de mes yeux.
Je ne savais pas pourquoi je pleurais. Avais-je été déçu car je n'avais pas vu Kacchan?
Non, impossible.
Était-ce possible? Je me morfondais depuis le début de son accident, je m'inquiétais. Tous les soirs, alors que je rentrais seul en ayant échoué pour la énième fois, je me laissais tomber sur mon lit.

Attristé, peut-être ravagé, je sanglotais à quelques mètres seulement de la maison des Bakugou. Le ciel semblait m'accompagner dans ma tristesse et mes remords et nous pleurions tous deux, la douleur de l'amour des hommes.

Un grand éclaboussement se fit entendre derrière moi, et je vis quelque chose d'incroyable. Rêvais-je? Était-il bien réel?
Kacchan se tenait sous la pluie, haletant, ses mains trempées appuyées sur ses genoux tremblants.
Par ce grand froid, il ne portait qu'un simple tee-shirt noir et un short. Je remarquai qu'il était pieds nus et qu'il ne portait pas de bandages autour de son mollet cette fois-ci. Sans me rendre compte de mes gestes, je courus à ses côtés et laissa tomber mon parapluie durant ma courte course.

« - Idiot! »

C'était sûrement la toute première fois que je le traitais d'idiot.
Je quittai mon blouson et lui posa sur ses épaules mouillées. Il se redressa instantanément, les joues saucées au goût des larmes. Quel bel homme, réellement.
Même avec ses cheveux blonds d'originaire si rebelles qui se déformaient maintenant au contact de l'eau et son regard aussi apeuré que le mien, il restait merveilleusement beau.

D'un geste violent, il dégagea ma veste de son dos et serra son haut, aussi fort qu'il le pouvait.

« - Idiot... Évidemment que je suis un idiot ! Ne le vois-tu pas? Pourquoi continues-tu de venir chez moi? De taper à ma porte tous ces soirs? Dis-le moi! »

Une voix cassée par les pleurs, étouffée par ses sentiments. "Enfin" pensais-je. "Il vide son sac."
Malheureusement, je ne savais que trop bien la raison de mon agissement. Je l'aimais. Et je ne pouvais me résoudre à le lui dire.
Il me rejetterait, et j'en avais trop peur.

Doucement, je levai la tête et me plongea dans ses yeux. Des yeux magnifiques malgré tout.
Il tenait la lettre dans ses mains.

« - Kacchan... Tu vas attraper froid. »

Esquiver. Toujours esquiver.
Il ne devait rien savoir, rien.

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*petite allusion au tout premier chapitre où Katsuki dit « Il ne doit rien savoir, rien. » 😉

Bref!
Cela dit, je vous assure que cette histoire est une happy ending 😂
Merci d'avoir lu et à bientôt!

PS: je ne sais pas vraiment si mes prochains chapitres seront « bien foutus » comme les précédents. J'ai quelques petits minuscules inconvénients donc je vais faire de mon mieux mais je ne promets rien!
Cheer up!

❤️

Selfish (KatsuDeku)Où les histoires vivent. Découvrez maintenant