7. Sur la route d'Okinawa

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« Allez, plus que deux mille cent vingt-deux kilomètres et on y est ! Ganbatte ! Courage tout le monde ! »

L'heure du grand départ avait été fixée à onze heures, chez Akémi, le septième jour du mois de juillet. Un véritable symbole. Juste avant de quitter son appartement, l'adolescent avait pris soin d'accrocher son vœu de Tanabata. Il était d'une grande sobriété. « Je veux trouver le trésor d'Aaron. » Cela faisait maintenant trois ans que le brunet l'avait laissé seul avec comme unique directive de se lancer à la recherche d'un Mon doré pommé sur un iceberg. Ces trois années étaient celles pendant lesquelles il avait le plus grandi. En taille, mais aussi en maturité. Il n'était plus un petit enfant craintif et torturé. À présent, il jouait un tout autre rôle, celui d'un capitaine dirigeant la plus fabuleuse expédition qu'il n'avait entreprise. Plus de deux milles kilomètres de train, de voiture et de bateau à travers tout le Japon ! Dès la fin de la première borne, parcourue à pieds et en métro, il s'était retourné vers sa petite troupe pour saluer l'exploit. Toute l'équipe des chercheurs d'or était-là, même si tous ne partageaient pas exactement les mêmes objectifs.

À lui le trésor, aux autres le plaisir du voyage ! Cécile adorait l'idée de passer une bonne semaine à la plage après un petit périple dans tout le pays qui comprenait une croisière en bateau avec son petit ami du moment ! En plus, cela faisait plaisir à son petit frère et la changeait de Miyajima où de Kyoto, lieux où elle avait déjà passé bien des étés. Akito, lui, suivait principalement le mouvement. Tant qu'il pouvait poser son regard bienveillant sur la nuque recouverte de cheveux fins et noirs d'Akémi et tenir la main de sa sœur, tout lui allait. Son principal souhait était de profiter du long trajet pour opérer un rapprochement de plus en plus assumé physiquement parlant avec Cécile. Si l'embrasser était quelque chose de particulièrement agréable, passer sa main sur sa poitrine se révélait meilleur encore. De quoi imaginer avec malice l'étape suivante. Il le savait : même s'ils n'en avaient pas beaucoup discuté, elle n'était pas forcément contre l'idée d'essayer. Cela faisait déjà plusieurs semaines qu'elle n'hésitait plus à se montrer devant lui en petite tenue, et certains messages particulièrement érotiques qu'ils avaient pu s'envoyer par SMS avait naturellement guidé sa main droite vers des sommets. Forcément, jouer ainsi avec son adolescence en pensant à sa désirée lui avait procuré une certaine honte, mais cette dernière restait bien moins ennuyante que celle qu'il avait déjà ressentie devant certaines vidéos d'un genre très particulier sur internet. Le véritable problème n'était pas tant ce que les protagonistes pouvaient y faire, ni même leur sexe – quoi que certains visionnages s'étaient révélés particulièrement perturbants – mais bel et bien le visage qu'il imaginait dès qu'il fermait les yeux. C'était pour cela qu'il préférait largement penser à Cécile. Au moins les choses lui semblaient-elles ainsi un peu plus normal.

De son côté, Ydaï s'était fixé une mission bien particulière : photographier tout ce qu'il visiterait pour montrer son épopée à sa mère bien aimée. Ayant reçu pour son anniversaire un appareil photo Reflex avec un objectif 70-200mm dernier cri, il s'était découvert une toute nouvelle passion. Même la cuisine et le salon d'Akémi furent capturés dans les moindres détails, tout comme le wagon restaurant du Shinkanzen devant les mener à Hisoshima.

Qu'il était beau, le train blanc à grande vitesse ! Finalement, les quatre adolescents avaient fait le choix de la ligne la plus rapide, même si le billet était couteux. Cette décision avait été rendue possible via de nombreuses économies sur la suite du voyage. Assis à sa fenêtre, Akémi admira le mont Fuji en arrière-plan. Bien que l'été eût fait fondre la neige qui recouvrait son sommet en hiver et au printemps, le vieux volcan somnolant restait majestueux. Les rizières et champs ici et là dans le paysage sentaient bon la campagne. Quelques minutes seulement suffirent pour passer d'une facette du Japon à une autre. La ville grouillante de vie laissa sa place au calme, à la verdure et aux grands échassiers. Voir une grue du Japon s'envoler au passage du train fit sourire Akémi et se lamenter Ydaï. Trop occupé à photographier son Bento, il en avait raté l'oiseau. Sur le siège juste derrière, Akito leva les yeux au plafond et soupira. Le voyage serait long. Heureusement que pour occuper son esprit, il pouvait laisser ses doigts se balader entre la paume et le flanc de sa petite amie. Ainsi ne vit-il pas le temps passer. À peine le Shinkansen fut-il entré en gare d'Hiroshima qu'Akémi se leva et pressa les autres de le suivre. Ils avaient encore un petit trajet en bateau jusqu'à Miyajima où les attendait son grand-oncle pour la suite du voyage ! Plutôt que de monter sur Tokyo puis redescendre avec ses petits-enfants et leurs amis, Ohjiro leur avait proposé de le rejoindre et de poursuivre leur périple après une bonne nuit de repos dans son auberge dans sa vielle Toyota Prius qui lui avait rendu tant de services par le passé.

AkémiOù les histoires vivent. Découvrez maintenant