En cette fin de mois de mai, la lourdeur du temps était atroce. Le ciel semblait toujours aussi morose, teinté de perpétuels nuages noirs et de ses grondements menaçants transcendants l'orage a l'horizon.
Cinq jours s'étaient écoulés depuis que la famille de Donegall avait reçu la lettre et depuis, Daphney ne faisait que s'imaginer avec son futur lord. Elle avait invité de la bonne compagnie, comprenant entre autre une ribambelle de jeunes ladys venant des comtés voisins, afin de communiquer ses fiançailles.
La jeune femme n'avait toujours pas rencontré ce fameux Darnley, mais rien qu'à l'entente de ce prénom elle esquissait de minces sourires en l'imaginant.
Daphney ne cessait de glousser lorsqu'elle le prononçait. Et Catalina pensait sincèrement que c'était un spectacle déplorable. Elle qui n'avait jamais eut de premier amour se fichait bien de ce que pouvait ressentir sa grande sœur. Après tout, ses réactions étaient ridicules et exagérées puisqu'elle ne le connaissait même pas. Si cela se trouvait, cet homme était laid ? Handicapé ? Rien ne disait que ce Darnley ressemblait à un prince charmant ! Mais bornée comme elle l'était, elle n'en avait bien cure. Et Catalina s'en fichait tout autant.
Il devait être six heures du matin lorsque la jeune servante de Catalina rentra en trombe dans sa chambre - ce qui était absolument inconvenable. La lady était inhabituellement réveillée, assise auprès de son bureau massif en train de manuscrire un petit livret à la couverture de cuir. Celle-ci redressa la tête, étudiant minutieusement la camériste qui venait de la déranger. La jeune enfant essoufflée réajusta son tablier et arrangea une mèche de cheveux brunâtre derrière sa tête.
– Le lord de Wellington vient d'arriver avec sa famille, votre père m'envoie vous quérir, articula-t-elle entre deux bouffées d'oxygène.
Catalina resta impassible, presque indifférente à l'annonce de leur arrivée. C'était plutôt sa sœur qui allait exprimer une certaine excitation. Après six longues journées d'attente, voilà qu'elle allait enfin le rencontrer.
Elle soupira en hochant la tête.
Lise, la jeune servante, s'empressa de lui préparer son bain dans la foulée. La jeune lady s'y glissa au bout de quelques minutes, frissonnant au contact chaud de l'eau tandis qu'elle se laissait savonner en une caresse appréciable. Malgré tout, elle sentait une boule d'appréhension grandir au creux de son ventre, comme si cette rencontre l'inquiétait. Devait-elle sincèrement appréhender ? Non, elle ne le devait.
Celle-ci se fit pomponner durant presque une quarantaine de minutes, avant de revêtir sa tenue. Elle portait un élégant corset en dentelle noire qui lui encerclait sa taille en une exquise torture. Sa toilette était d'un violet foncé ravissant et possédait un décolleté lui arrivant aux épaules, allongé en de longues manches adaptées à ses bras. Ses jupons traînaient à ses pieds avec raffinement, se mouvant avec finesse. Un large collier de perles cernait sa gorge avec délice tandis que de minuscules boucles d'oreilles pendaient à ses lobes. Pour finir, ses cheveux étaient rattachés en un chignon bas très soft.
Pourtant, si douce et charmante, Catalina se sentait enfermée dans cette lourde robe, qui ne la représentait pas. Comme si elle l'avait choisie pour prouver tout autre chose ; une facette cachée de sa personnalité.
Enfin prête, elle sortit de son immense chambre avant de traverser le couloir de l'aile est de la demeure. Durant une fraction de seconde elle n'entendit que le fracas de ses talons résonnant dans l'allée, bercée par le mouvement répétitifs de ses pas. Il lui semblait que le corridor s'allongeait à mesure qu'elle avançait, comme s'il lui était impossible de rejoindre le bout de sa traversée. A moins que ça ne soit elle qui recule, recule face au changement qu'opérerait cette famille de Wellington. Ainsi que ce Darnley.
VOUS LISEZ
À l'Aube de nos Noces
Romance1823. Comté de Donegall, Angleterre. À dix-neuf ans, Catalina, une demoiselle discrète et introvertie, est la dernière fille du lord George de Donegall. D'apparence douce, elle n'avait jamais suscité le doute sur sa bienséance, bien obligée de faire...