Sombrer pour mieux se relever

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Et cest à ce moment que je le vois, installé au fond de la salle il ne me lâche pas des yeux.

Quand son regard dévie sur mon ventre dénudé sa mâchoire se contracte. Je baisse instantanément mon pull et baisse les yeux, honteuse et mal à laise que tant de gens aient vus toutes ces cicatrices, je ne sais pas ce quil ma prisje veux juste en finir. Je veux condamner mes parents et ce ,par tous les moyens possibles, il faut quils payent pour ce quils ont fait. Lavocat ne peut alors plus remettre en question ces marques sur mon corps. Pendant la délibération des jurés je rejoins mes nouveaux parents. Cependant mes « vrais » parents, si je peux les appeler ainsi, se font un plaisir de me déstabiliser. Lorsque je passe à côté deux je les entends marmonner et rigoler.

-Et bien Kaitlyn il semblerait que nous ayons toujours une emprise sur toi. Tu ne crois tout de même pas que lon va se laisser faire si ? Autant thumilier jusquau bout, quest-ce que tu en penses ?

Je tente de ne pas marrêter sur leurs mots mais même pendant le procès ils arrivent à conserver le dessus sur moi. Jessaie de me contrôler mais la volonté que manime nest pas assez forte. Je mélance vers eux, les poings serrés et les larmes aux yeux.

-Vous avez perdus, vous mentendez, plus jamais vous naurez demprise sur moi. Que croyez-vous sérieusement ? Que les jurés vont autoriser une remise en liberté sous caution ou quelque chose dans le genre ? je mécris.

-Tu ne crois pas si bien dire Kaitlyn chérie, siffle Jim alias Noah.

Et cest là que tout dérape, je mavance vers eux et agrippe mon frère par le col. Je commence à le frapper sur le visage, à tous les endroits possibles. Je narrive pas à marrêter. Jai envie de leur rendre tout le mal quils mont fait.

-Kaitlyn ! Arrête je ten prie ! En faisant cela tu ne vaux pas mieux queux, sécrie Blake qui se trouve à présent à mes côtés.

-Oh que cest mignon, le prince vient au secours de sa belle, sécrie dune voix mielleuse ma mère.

Et cest la goutte qui fait déborder le vase. Je lagrippe à son tour mais avant que jai pu la toucher, des bras musclés mencerclent et me tirent vers larrière. Je me débats, donnant coups de pieds, coups de coudes mais rien ny fait. Blake est trop fort. Je crie comme si ma vie en dépendait. Ma mère avait raison, je me suis une fois de plus humiliéeIl mentraîne à lextérieur de la salle, sous les regards ébahis de lassemblée.

-Blake lâche moi, je dois les faire payer, je hurle.

Il relâche son emprise et se plante face à moi, créant une barrière infranchissable entre moi et la porte qui me sépare de mes parents. Même à bout de force je suis animée par une telle rage quil mest impossible de la contrôler. Je mélance vers lui mais sans succès, il me serre fort contre lui, tandis que je martèle son torse de coup de poings.

-Blake, laisse-moi passer ! Je ten supplie

Ma voix se brise sur ces derniers mots et je meffondre contre lui, ayant perdu toute occasion de faire ,une dernière fois, face à mes parents.

-Ça va aller, je te le promets.

Malgré son ton réconfortant je nen crois pas un mot. « Ça va aller » na aucun sens, comment peut-il savoir que ça va aller, que jirai mieux, que je guérirai de mon passé ? Il nen a aucune idée, il nest pas devin. Personne ne peut savoir de quoi sera fait demain. Je rassemble mes dernières forces pour tenter de me frayer un chemin jusquà la salle daudience, en vain. Je me sens vidée de toute énergie. Même la phrase réconfortante de Blake ne me rassure pas car je sais que ce nest que le début dune longue épreuve. Une lente guérison, parce que dans ce genre de cas-là, il ny a pas de remède miracle, ni de rétablissement rapide, il ny a quune atténuation provisoire des symptômes, qui peuvent revenir et me briser à nouveau. Je nai aucune idée de combien de temps il me faudra pour que je men remette mais je sais que si Blake est à mes côtés, jaurais une bouée à laquelle maccrocher. Une bouée qui mempêchera de meffondrer et qui par un moyen ou un autre me relèvera un peu plus chaque jour. Peu de temps après, de lextérieur, jécoute attentivement la sentence prononcée par la juge après la délibération des jurés. Mes parents sont condamnés à vingt ans de prison et mon frère est envoyé dans un centre de détention pour mineurs.

-Blake, dit mon oncle.

-Monsieur Bright, salue mon ami.

-Kaitlyn on y va, dit sur un ton autoritaire ma tante.

Sa voix me rend sceptique mais je ne peux pas lui reprocher, elle a en elle la colère que jai ressenti pendant près de sept ans contre mon incapacité à menfuir, à ma lâcheté, à la naïveté dont jai fait preuve en croyant bêtement quun jour ils cesseraient de me faire du mal mais quespérai-je ?

Pendant cinq ans elle na pas cherché à comprendre ma soudaine venue, voyant bien que je ne parlerai pas. Elle na pas envisagé une seule seconde au fait que javais pu être battue et que je cherchais un abri, elle ma juste accueillie comme laurais fait tout membre dune famille. Jamais elle na pensé que jétais victime de maltraitance.

Je mélance vers eux, tout aussi pressée de quitter cet endroit, lorsquune main agrippe mon poignet.

-Kaitlyn, attends, sécrie Blake. Ne me repousse pas sil te plaît, je veux être là pour toidéclare-t-il en sapprochant de moi, plus quil ne lest déjà. Ses yeux plongent dans les miens et je reste captivée. Captivée par cette lueur de malice, ce bleu clair hypnotisant et apaisant. Une immensité dans laquelle je veux me noyer et ne plus jamais faire face à la triste réalité. Je veux rester dans lillusion dun monde juste, sans peine, ni tragédie. Mais lorsque son nez frôle le mien je sens que notre proximité me fragilise. Et que je dois y renoncer, une nouvelle fois. Je me recule et pars sans me retourner.

-Jai besoin de temps Blake.

Malheureusement la durée dépendra du temps que je mettrai pour me remettre à vivre comme avant. Ma vie sans Blake, sans son imprévisibilité et ses sourires réconfortants. Juste moi et ma forteresse. Une forteresse que je veux absolument imprenable.

Vivre, me battre et aimer...Où les histoires vivent. Découvrez maintenant