Elle Seule.

Génération non-non

Les banlieues ont toujours été un point fondamental de mon pacte présidentiel. J'ai toujours considéré que le manque de volonté dans la politique de la ville, l'absence de réaction face aux problèmes de délinquance et le manque de moyens étaient un gigantesque gâchis humain, beaucoup de jeunes talentueux étant ainsi privés de toute chances de réussite. C'est pourquoi, dès mon entrée en fonction, j'ai immédiatement demandée à Manuel Valls, le ministre de lÉducation, de mettre en branle son administration pour concevoir une réforme de la carte scolaire. De plus, j'ai commencé à concevoir mon ''Plan Investissement Urbain''.

J'ai ainsi souhaité réserver l'uns de mes premiers déplacements de terrain à ces territoires oubliés de la République, en me rendant sur la dalle d'Argenteuil. Je voulais ainsi dire aux populations que non, lÉtat ne les oubliera plus. En arrivant sur place, je retrouve la rappeuse Diam's, icône de la jeunesse. Je sais qu'avec elle, je n'ai aucune chance de me faire siffler ou chahuter. J'aime par ailleurs beaucoup cette femme de caractère, que j'ai rencontré au début de la campagne sur le plateau du Grand Journal de Michel Denisot. J'avais ainsi déclarée à l'interprète de La boulette (génération non-non), qu'il était désormais temps de passer avec moi à une jeunesse qui dit oui au changement. Le déplacement se passe bien, je découvre quelques initiatives citoyennes et laccueil est chaleureux. Le midi, je déjeune avec mon artiste acolyte aux côtés du maire chez une habitante du quartier qui nous prépare un succulent couscous aux pruneaux. Évidemment, les caméras entrent dans le salon pour prendre quelques images. Notre hôte qui regardait la télévision à notre arrivée, n'a pas pris la peine de l'éteindre. Branchée sur LCI, j'en profite pour me tenir au courant de l'actualité mondiale en jetant de rapides coups d'oeil au bandeau déroulant. Soudain, le visage de Laurent Fabius apparaît. Stupeur de ma conseillère presse, Françoise Debois, qui demande dans la seconde aux journalistes d'évacuer les lieux. Le maire s'empare de la télécommande et monte le son. J'apprends alors qu'un coup de palais est en train de se dérouler à Solférino. Fabius vient de demander la démission de François, sous prétexte d'un prétendu ''népotisme''. Il prononcera ensuite cette phrase surprenante qui restera gravée dans les annales politiques : ''Imaginerait t-on Bernadette Chirac présidente de l'UMP ?''.

Je vais rapidement m'isoler dans la salle de bain pour téléphoner à François. Il ne réponds pas. Je suis très inquiète Rebsamen me demande ensuite de rentrer à Paris au plus vite. Impossible. Je me dois d'honorer ce rendez-vous avec les gens qui m'attendent si nombreux. Je finirai donc cette journée en serrant les dents.

Je rentre au palais sur le coup des 20 heures. Mon téléphone est en surchauffe, j'ai dû tenter d'appeler François plusieurs dizaines de fois Il ne m'a jamais répondu. Toute la nuit, je me tourne et me retourne dans mon grand lit froid. Il me manque Je m'en veux de lui faire subir toutes ses difficultés.

J'apprendrai sa décision de démissionner de la direction du PS le lendemain, comme de millions de français, à l'écoute de la matinale de RTL. Toute la journée je tente de l'appeler. Il ne réponds pas. Il ne réponds plus. Je partirai sans lui dans ma première tournée diplomatique que j'ai consacrée à l'Amérique du Sud. Pendant ce voyage, je tenterai de placer les médias le plus loin possible de moi. Toutes les conférences de presse sont annulées.

C'est la semaine suivante que je rentre à Paris. Régulièrement, je consulte le compte-rendu des activités de François que me fournit toutes les quatre heures son officier de sécurité. Je vois qu'il reste en Corrèze, à faire campagne. Je sais qu'il a prévu, au soir du premier tour des législatives, de rentrer dormir dans notre appartement de Boulogne que nous avons conservés pour le moment. C'est décidé, j'irai l'attendre là-bas, et on s'expliquera.