47 : M'oublieras-tu ?

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« Je vais tout rater, putain, me lamentai-je en frappant ma tête contre ce maudit manuel d'histoire.
- N'importe quoi ! contra Olenka. Tu vas gérer en histoire.
- Super, j'aurais peut-être 10 en histoire et 3 ailleurs.
- Arrête d'être aussi négative, me reprocha Zoé, qui lisait un livre en allemand. »

Je maugréai quelques mots inaudibles, contrariée. La première épreuve du baccalauréat était désormais dans deux semaines et c'était clairement la merde. J'avais l'impression de redécouvrir un nouveau cours de page en page. Rattraper un an de cours en deux semaines, était-ce vraiment possible ? Spoiler : non.

La philosophie m'inquiétait particulièrement. J'avais toujours cru que la philo était une réflexion personnelle mais en réalité, la clé de la réussite dans cette matière semblait être le bourrage de crâne de thèses aussi insensées les unes que les autres. Enfin bon, mon avis n'était pas objectif, puisque j'étais une véritable bille dans cette matière.

Les langues s'annonçaient aussi catastrophiques. Avec mon accent russe, je pouvais presque déjà voir les juges grimacer. Et ne parlons pas des maths.

Toute l'année, je m'étais répétée que je compterai sur l'histoire pour me remonter tout. Mais il y avait une grosse différence entre les petits contrôles de mon prof et tous les chapitres à connaître sur le bout des doigts.

« Comment vous faites pour tout retenir ? me plaignis-je.
- Je sais pas, essaie de donner du sens à ce que tu apprends, déclara Olenka. »

Je fronçai les sourcils, il faisait bien trop chaud pour qu'Olenka m'explique ces conneries.

« Je vais m'acheter un cookies, annonçai-je, un peu ragaillardie à cette idée.
- Ce n'est pas comme ça que tu vas t'améliorer, soupira Olenka.
- Oh, ça va, je me mets simplement en bonne condition pour réviser. »

Je n'ai plus mis les pieds dans la bibliothèque de la journée.

Je passai le reste de la journée à errer dans la forêt. J'adorais me balader, seule, avec des écouteurs, à réfléchir et faire le point.

Le bac m'inquiétait bien plus que je ne laissais paraître. Mais la vérité, c'était que j'avais perdu toute motivation à réviser. J'aspirais bien plus qu'à décrocher un simple diplôme. Je rêvais de m'envoler, de partir loin d'ici à la recherche du bonheur. Malheureusement, dans cette société, cela ne marchait pas comme ça. On nous conditionnait à un examen qui en cas d'échec nous faisait perdre confiance en ce que nous étions alors qu'il était terriblement subjectif.

« Thylane ! »

À ma grande surprise, Sam débarqua et me rejoignit sur le banc où je m'étais assise.

« Comment tu as su que j'étais là ? m'étonnai-je.
- Je sais que tu adores venir ici. Ces mots me réchauffèrent le cœur. Bon, il faut qu'on parle. Tout à l'heure, à la bibliothèque, Anna m'a demandé comment je prenais ton départ l'année prochaine. Tu m'expliques ? »

Cette fois-ci, mon cœur se serra douloureusement. Bien sûr, il fallait bien que l'on ait cette conversation un jour, mais je ne voulais pas qu'il l'apprenne de cette façon. Encore une super journée.

« Tu sais, je t'ai déjà dit que j'aimerais partir l'année prochaine...
- Je t'en supplie, ne me dis pas que tu vas partir loin l'année prochaine. »

Ne pouvant supporter davantage son regard désespéré, je détournai le regard.

« J'en ai besoin...
- Thy...
- Plus qu'une simplement envie, j'en ai besoin, Sam, l'implorai-je de nouveau. Cette année a été terriblement éprouvante pour moi. J'ai besoin d'être seule avec moi-même et de me reconstruire. Et... j'ai été acceptée pour un service civique en Roumanie. Je vais aller dans un centre pour aider les personnes en situation d'handicap. »

Se détruireOù les histoires vivent. Découvrez maintenant