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Le lendemain, Alice se leva encore une fois, pour une nouvelle et morne journée. Ce matin, il ne restait plus qu'un pétale sur la rose. Alice l'effleura avec l'index... Elle allait rendre visite à son grand-père avant d'aller au travail, et y retournerait après.

Mais avant qu'elle ne puisse mettre la machine à café en route, on sonna à la porte. Peut-être était-ce Alexandre ? Ou alors Judithe, cette alcolo... La première option était de loin celle que préférait Alice. Mais pourquoi serait-il de retour ? Peut être que sa bimbo l'avait largué! Ou qu'il est tombé malade à cause d'un moustique ! L'idée de devoir jouer l'infirmière à ses côtés la fit rougir.

Elle courut à la porte et l'ouvrit violemment. Son sourire s'effaça quand elle reconnut la tête de con du livreur.

- Euuuh, je suis bien au numéro quatre ? Monsieur Bonneville ?

- Alors de un, ducon, c'est écrit sur la porte "numéro cinq". La prochaine fois que je te le répète, tu vas le bouffer ce numéro. Deuzio, j'ai vraiment l'air de m'appeler "Monsieur" ? Si tu critiques mon épilation, vas te faire voir.

Et la porte se referma aussi violemment qu'elle s'était ouverte. Alice n'était pas connue pour sa diplomatie, puis cela faisait maintenant trois fois que ce livreur se trompait d'appartement. Ou peut être huit. D'ailleurs la jeune femme se demandait bien ce que faisait son voisin pour se faire livrer aussi souvent. Il était peut être dealer, et il se faisait livrer ses graines... Ou alors espion, et c'était des dossiers et des armes qu'il recevait ! Ou peut-être qu'il faisait un élevage de hamsters dans sa salle de bain, donc il avait besoin de cages, de roulettes et de bouffe. Sûrement pour attirer les jeunes enfants chez lui. Fort possible.

La jeune femme retourna à ses affaires et alluma la machine à café. Elle regarda l'heure, et constata qu'il était déjà dix heures. Elle but le liquide chaud d'une traite et se brûla la langue avant d'aller prendre une douche froide, d'enfiler un vieux débardeur troué et un jean sale.

Elle sortit en trombe de l'appartement, manquant de renverser Monsieur Bonneville qui rentrait un nouveau colis chez lui.

- Ne vous excusez surtout pas.

Alice se retourna, et croisa les bras.

- Mon grand père va mourir bientôt. Je dois aller le voir avant, pardonnez mon impolitesse vieux con.

Sur ce, la jeune femme quitta l'immeuble."Mon grand père va mourir bientôt". N'importe quoi.

Elle monta dans sa petite voiture rouge, et arriva quelques minutes après devant le bâtiment bleu. Elle rejoignit son grand père comme d'habitude.

- Qui êtes-vous ?

- Euh... Papi, c'est moi, Alice. Ta petite fille.

Aucun son ne sortit de la bouche de Camille. Il avait le contour des yeux violet sombre, et ses yeux étaient vitreux. Sa respiration se faisait forte et saccadée.

- Sortez, je ne vous connais pas.

- Mais papi... C'est moi !

- Sortez !

Les yeux de la jeune fille s'emplirent de larmes et elle fit un pas vers le lit de son grand père.

- Allez vous en !!!

Alice ne se fit pas prier et sortit de la chambre entre haine et tristesse. Comment son grand père pouvait-il lui faire ça ? L'oublier, alors que personne ne savait quand il partirait définitivement ? Et si elle n'était pas là pour lui dire ses adieux, alors il mourrait sans se souvenir d'elle ? Sans pouvoir résister encore un peu plus, Alice glissa le long du mur et se laissa submerger par la tristesse.

De lourds sanglots l'emportèrent pendant plusieurs minutes.

Soudain une main se posa sur son épaule. En tournant la tête, elle eût d'abord du mal à reconnaître le visage de l'homme à travers les larmes. Puis petit à petit, sa silhouette s'affina et Alice reconnut le Docteur Tomas, qui était accroupi à côté d'elle.

- Docteur...

- Madame.

- Il ne sait pas qui je suis.

- C'est normal.

- Il n'arrive pas à bien respirer...

- Oui.

- Et il est fatigué...

La jeune fille réalisait lentement ce qui allait arriver dans quelques jours. Ou peut être quelques heures, qui sait ?

Elle fut de nouveau envahie d'un long sanglot, et le Docteur Tomas se retira.

Elle se revoyait, à sept ans, se laisser pousser par son grand père sur la balançoire qu'ils avaient fabriquée ensemble. Elle pouvait l'entendre raconter ses histoires à dormir debout, et ses blagues en tout genre. Plus tard pendant son adolescence, elle le revoyait lui faire des massages sur la nuque et l'appeler "Mon gros bébé". Et elle le revoyait il y a un an, déjà dans ce lit d'hôpital, insulter Alexandre pendant qu'elle pleurait son départ en Australie. Il ne cachait jamais ce qu'il pensait. Il avait toujours dit : "La franchise nous apprend qui sont les vrais amis."

Elle se leva lentement, et frappa à la porte de la chambre, puis entra.

- Cassez vous, bon sang !

- Non Papi. Je resterai ici. Jusqu'à ce que tu t'en ailles. Je ne te lâcherai plus.

Dernier chapitre! L'épilogue viendra plus tard, puis après on pourra commencer la deuxième nouvelle hehe...

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La réecriture de cette nouvelle là est bientôt terminée ! J'ai eu pas mal de remarques sur le caractère (... Fort ?) d 'Alice et j'ai décidé de ne pas le modifier, mon but n'étant pas de faire dans chacune de mes nouvelles des personnages très aimables. J'espère quand même que ça ne posera pas trop de problèmes !

Chapitre corrigé.

DéchéanceOù les histoires vivent. Découvrez maintenant