◇ SECOND ◇

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Depuis que Thomas m'avait cette sorte de "déclaration", il me suivait partout en babillant sans cesse tandis que moi je ne prenais pas réellement part aux conversations. Pourtant, d'un côté j'avais envie d'apprendre à le connaître et d'un autre, j'avais peur de nuire à sa réputation en le fréquentant. Et c'était sans compter ma tante, cette ourse mal léchée. Elle me dissuadait en permanence de d'avoir des amis sous prétexte qu'ils me feront perdre mon temps et me détourner de mes études.

J'aurais voulu me laisser tenter, ne plus penser aux autres et ne penser qu'à moi, mais je ne pouvais. Je n'y arrivais pas, plutôt. Car quand on passe des années à se forger une carapace, à se renfermer sur soi-même, c'est presque impossible de s'ouvrir aux autres et de se laisser approcher.

Pourtant un jour, je lui posai cette question qui me brûlait depuis un moment :

- Dis-moi, pourquoi tu as tant insisté pour que l'on soit amis ? Je veux dire, c'est bizarre. Tu ne me connais ni d'Adam ni d'Ève

- À ton avis ?

- Je n'en ai aucune idée.

- Oh... mais pour toi, a-t-on besoin d'une réelle justification pour vouloir se lier d'amitié avec quelqu'un ?

- Je suppose.

- Faux !, me répondit Thomas en rigolant et en touchant le bout de mon nez, me faisant ainsi loucher sur son index.

Sa réaction me fit penser à celle d'un gamin. Il ne semblait pas seulement taquin, il l'était réellement. Il était aussi très immature mais restait adorable. C'est alors que je me mis à pleurer, sans aucune raison. Les larmes déferlèrent sur mes joues et avant que je m'en rende compte, mon visage était détrempé. Thomas lui, était sidéré. Mais je pouvais aussi déceler un peu de culpabilité sur sa face.

- Désolé, je... T'ai-je bléssée ? Demanda-t-il.

- Non, ce n'est pas... Je ne sais pas pourquoi je pleure. C'est arrivé subitement, comme ça.

- Oh, je vois.

A mon grand étonnement, il passa son bras autour de mes épaules dans un geste réconfortant et me conduit à l'infirmerie. Là, dit à l'infirmière que je ne me sentais pas très en forme, et elle me laissa me reposer. Thomas parti alors vers la salle de cours et me dit qu'il allait se charger aussi de mon excuse pour le professeur.

Allongée depuis une demie heure sur le lit, je ne parvenais pas à fermer l'œil. A chaque fois, je repensait à son geste et cela me donnait des frissons. Ma réaction était puérile, je le savais. Mais c'était ainsi et je ne pouvais rien y faire. Il me troublait, attisait ma curiosité. Il avait débarqué un jour comme une fleur et le minute d'après, m'avait demandé à être son amie. Sans même me connaître. J'essayais de trouver une logique à tout ça mais je n'y parvenais point. Tout était allé très vite et je n'ai pas pu mettre mes idées en place. De plus, il semblait faire fit de mon apparence et paraîssait réellement intéressé par ma personne. Comment une telle personne pouvait-elle exister ? Je ne le savais pas et je ne le saurais sûrement  jamais. Quel garçon simplet.

La porte de l'infirmerie s'ouvrit subitement laissant apparaître un Thomas plus rayonnant que jamais. Une aura rafraîchissante semblait émaner de son corps. Instinctivement, je souris. Puis je ris. Et bientôt, il me rejoignit dans un fou rire. C'était la première depuis extrêmement longtemps.

~

Alors que je longeais le pont, j'entendis des pas de course dans mon dos. N'y prêtant pas attention, je continuais mon chemin mais c'est seulement lorsque un poids lourd s'abattit sur mes épaules que je remarquai qu'il s'agissait de Thomas.

- Mais tu est fou ! Tu veux ma mort !

- Calm down, calm down sweetie, dit-il en mimant de ses lèvres un bisou.

Je lui donnai une tape amicale sur la bouche et repris mon chemin, lui à mes côtés. 

Cela faisait maintenant cinq semaines environ que nous étions " officiellement " amis. Cinq semaines de pure joie où j'avais enfin réussi à m'épanouir. Cinq semaines où pas une seule fois, je n'avais eu de pensées négatives. Et cela malgré tout le reste. J'étais très contente. C'était la première fois que j'expérimentais ce genre sentiments et bien qu'au début je n'était pas très à l'aise, je me suis vite accommodée.

Thomas me dit alors :

- Ça t'intéresserait de savoir pourquoi j'ai tant tenu à être ton ami ?

- Vas-y, répondis-je feignant l'indifférence.

- C'est parce que tu es comme moi.

- Pardon ? Comment pouvais-tu savoir que l'on étaient similaires alors que l'on ne se connaissaient même pas ?

- Je l'ai vu dans ton regard. Il était vide, dépourvu d'une quelconque émotion. Tu ne semblais pas heureuse. On pouvait même deviner que ce mot n'avait jamais fait parti de ton quotidien. Et dans ce regard, je me suis revu. Un petit perdu, faible qui n'a personne sur qui compter. Mais un petit qui endure malgré tout. 

J'étais touchée, pas seulement par le profondeur de ses mots, mais aussi par rapport au fait qu'il avait parfaitement décris ce que je ressentais.

Ce fut à mon tour de demander : 

- Et ça t'intéresserait de savoir pourquoi j'ai accepté d'être ton amie ?

- Mmh.

- Parce que inconsciemment, sans rien faire, tu me rends heureuse. Et ça, c'est précieux.

OUR SWEETEST MOMENTSOù les histoires vivent. Découvrez maintenant