Chapitre VII • Ça

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Sarah adouci le ton de sa voix, se pencha vers moi et me chuchota :

- Nous sommes amies car je n'en ai pas d'autres.

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Je ne comprenais pas pourquoi elle avait dit ça. La Sarah populaire, toujours radieuse, sautillant partout et optimiste avait laissé place à une Sarah calme, renfermée sur elle-même, triste et seule.

- Mais.... pourquoi ?

Cette fois-ci, j'avais prononcé ce mot en chuchotant comme elle. C'était sincère, je ne comprenais pas.
Je crus apercevoir une larme, qui voulait glisser sur sa joue, rester bloquée au coin de son œil. Sarah ne la laissa pas vivre bien longtemps. Après 1 minute d'un silence perturbant, Sarah se releva brusquement tout en séchant sa larme d'un geste qui se voulait discret mais qui ne l'était pas. Elle me pris le poignet et me força à la suivre. On traversa une entrée et un salon plutôt modeste qui se trouvaient derrière la salle de《L'Alaska》. Elle me tira dans un passage fermé par une porte en bois décorée de dessins d'enfant. Elle sortit une trousseau de clefs de sa poche et en enfonça une dans la serrure de la porte. Un tour. La porte s'ouvrit. Sarah me poussa doucement au travers.
Un monde complètement différent m'apparus.

Le froid s'agrippa à mon corps. Nous étions à l'extérieur. Alors que l'horloge de L'Alaska retentissait jusqu'à nous pour nous avertir qu'il était 16h, la luminosité était moindre là où Sarah m'avait emmenée.

- Nous sommes directement dans le bois quand on passe par cette porte...

En effet, je levai la tête et remarquai que l'obscurité était due aux épaisses branches des immenses pins qui ne laissaient passer que très légèrement les doux rayons du Soleil d'hiver. Quelques couleurs orangées peinaient à nous faire comprendre que la nuit ne tarderait pas. Il régnait dans ces bois obscures une étrangeté troublante.
Le froid se faisait de plus en plus insistant et aucune chaleur, même minime, ne pouvait venir à travers les sombres arbres.

- ... mais Papa ne veut plus que je viennes par là. Il préfère que je fasse le tour pour rentrer "comme tout le monde" dans le bois. Il a donc fermé la porte à clef.

- Comment as-tu fait pour la récupérer?

- La clef? Pas compliqué, mon père est persuadé qu'il l'a perdue dans les bois. Ce qui est vrai mais il ne sait pas que c'était à un moment où j'étais avec lui et que j'avais vu la clef tomber.

- Tu l'a ramassée et tu ne lui a rien dit.

- Exactement. C'est mon coin secret maintenant. Papa n'y viens jamais. Et j'espère que tu garderas le secret, hein?

- Bien sûr !

- Promis?

- Promis.

- Super! Maintenant suis moi.

Elle enleva ses chaussures et s'avança dans la pénombre. Voyant que je restait sur le pas de la porte, elle me pressa :

- Allez! Fais comme moi : met toi pieds nus et viens!

Ne sachant que faire, je suivis ses instructions et mis mes pieds sur l'herbe fraîche et humide.
Sarah passa derrière moi et referma la porte à clef. Elle s'avança de nouveau mais cette fois s'enfonça un peu plus loin entre les arbres.
Je me faufilai, suivant ses pas.
J'avais froid et tremblais des dents. Sarah le remarqua.

- On est arrivée ne t'inquiète pas. Par contre la couverture ne va pas être assez large pour qu'on puisse chacune avoir notre intimité.

Je crus apercevoir un sourire sur ses lèvres. Comme si elle avait prévue depuis longtemps de partager cette couverture avec moi. Une simple illusion.

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