CHAPITRE 5 : Game over

4 0 0
                                    

Pas celle de ma mère, étonnant.

Celle de mentor. Qui sort du froid et du brouillard.
Ce n'est pas de la gentillesse, c'est un ordre. « Relève toi ! »

Je suis définitivement fou. Pourquoi lui ?

J'ouvre un œil. Son visage est au dessus du mien. Ses yeux lancent des éclairs. Je ne comprends plus rien. Pourquoi est-il là ? Depuis combien de temps suis-je tombé ?
Il me regarde d'un air mauvais, l'air mécontent, déçu peut être. Sûrement même.
« Tu es faible Sacha, ce n'était qu'un entraînement. Planque toi maintenant. Maintenant ! »
Il hurle.
Je le regarde, étonné, sous le choc. J'attends la prochaine vague.

Et puis je vois son arme, je vois ses yeux injectés de sang. Je ne comprends pas tout. Mais j'ai peur. Je me suis perdu. J'ai fait face à plus fort que moi.

Je vois les brutes autour de lui. Il n'est jamais seul. On finit par céder. Petit à petit et pour toujours. Alors, je cours pour y échapper.

Plus vite qu'on ne m'a jamais vu le faire je détale. Je cours pour fuir l'enfer.
Car c'est bien ça, l'Enfer c'est eux, c'est lui, c'est ça.

C'est cette spirale addictive.

Je tremble. Mes genoux se dérobent sous moi. Ils me suivent. Je ne me bats plus que contre moi même. Et je suis mon pire ennemi. Car je ne gagne jamais. Je suis un faible.

Je tourne plusieurs fois.
Et puis celle de trop, le cul de sac.
Celui duquel on ne sortira pas vivant.

Je cherche une cachette, une dernière planque. Dernier rempart contre la folie.
Une boite.
J'y saute.
Quelle piètre endroit.

La vraie partie commence, celle qui ne se termine jamais.

Elle a débuté un matin d'hiver, à la première dose. Mais maintenant, elle s'essouffle, plus rien à faire, les dés sont jetés depuis si longtemps. Les autres sont surs d'eux, ils ne sont même plus discrets. Ils savent qu'ils m'auront. Ce n'est qu'une question de temps.

Je me bats.
Je résiste.
Ils ne me trouvent pas.

L'espoir grandit.

Ma lucidité s'évanouit, je remue.

Fini.

Je les entends.

Je n'étais pas si bien caché.

Je ferme les yeux, dans un accès de courage.

L'haleine puante de Mentor m'accueille. « C'est fini Sacha, arrête de te battre. »
Je le sais.
J'abandonne.
Une si longue partie perdue. Je baisse la tête et la douleur me transperce. J'imagine que du sang gicle. Je ne souffre plus. J'accepte. Je cede.

Mentor, c'est bien lui.
Celui qui m'a pris sous son aile un matin d'hiver.
Celui qui m'a fait oublié ma douleur.
Celui qui en a créé de nouvelles.
Celui qui m'a assujetti.
Celui en qui j'ai placé toute ma vie.
Celui qui m'a formé et qui aujourd'hui m'achève.
On ne lui résiste pas. On lui obéit.
Parce qu'il en va ainsi.

On ne se bat pas éternellement contre soi même.
On ne se cache pas indéfiniment.
C'est la fin du jeu. C'était trop dur pour un enfant.
On ne peut pas décider de s'arrêter. Je suis allé trop loin pour la marche arrière.
La pause, c'est pour les faible. Dans ce monde, il n'y en a pas.
Alors suis les règles ou crève.

Je termine d'enfoncer la seringue dans mon bras. Enfin cette sensation enivrante, la fin du délire et le retour à ma réalité. Ma triste réalité.
L'héroïne coule doucement en moi, doucement jusqu'à mon cœur et le gèle définitivement. Je ne le voulais pas, c'est un aléa de ce jeu dont on ne contrôle rien.
Au moins maintenant je te vois « maman ».

Encore une partieOù les histoires vivent. Découvrez maintenant