Tapis au fond de ma cage, balancée sans ménagement à l'arrière de la camionnette, j'entend mon "maître" hurler et frapper du poing dans l'habitacle. J'ai droit à du "sale clébard", "abrutit de chien", "bon à rien", "je vais le tuer de mes propres mains". Cette dernière phrase me parait pleine de bon sens et j'espère presque qu'il la mettra à exécution. Je sais que la seule chance que j'avais de me sauver vient de me filer entre les doigts, si je peux dire. Je ne veux pas revivre ce que j'ai vécu aujourd'hui,  je ne m'en sortirais pas, je suis tombé sur un adversaire peu coriace mais je sais très bien qu'au prochain combat je me ferais tuer. Je ne suis pas assez grand, pas assez fort et surtout je ne sais pas me battre, pas comme un chien. Qu'est mon intelligence d'homme face à des crocs, des griffes et la fureur d'un animal? Alors oui, j'espère que quand on rentrera, il me frappera assez fort pour que ça me tue. Ses copains sont assis sur la banquette à ses côtés, ils ne disent pas un mot. Ils ont peur de lui, j'entends leurs rythmes cardiaques s'accélérés à chaque coup de poing qui résonne dans le plafond ou sur le volant. Ils sont là pour l'aider à transporter la cage par pour le plaisir de sa compagnie. 

Si ils avaient fait un tant sois peu attention en m'emmenant, ils ne prennent pas les mêmes gants au retour. Ma cage est jetée sur la planche à roulettes puis sur le sol. Me voila de retour dans cette cave...ou ce garage...je ne sais pas vraiment ou je me trouve, toujours est-il que c'est glauque, froid et sombre. Quand je disais avant de combattre que je n'avais jamais ressenti une telle peur c'était avant cet instant. Les oreilles plaquées sur la tête, je me recroqueville contre la paroi, je guette le moment ou il ouvrira la grille pour me punir. Je l'entend tourner autour de ma cage,de temps en temps un coup de pied vient me faire sursauter. Il fait des allers-retours entre ce que je pense être la maison et moi. Et là, deux jambes se plantes devant mes barreaux, une laisse en cuir et un collier à pointes pendent le long de la jambe droite. Nous y voila. Il coulisse doucement le verrou et ouvre la porte grillagée. Je ne bouge pas, si tu me veux mon pote, il va falloir venir me chercher:

"- Vous attendez quoi? Hurle t'il. Levez la cage qu'il glisse jusqu'à moi. Je ne vais pas y mettre mon bras!!!"

Je sens l'arrière de la cage se soulevée, j'ai beau me tendre comme un arc et planter les griffes dans le bois rien n'y fait, je suis inévitablement guider vers la sortie. Je ne veux pas, j'ai peur, j'ai envie de crier mais je crois que ce couinement plaintif est le seul son qui arrive à sortir de ma poitrine comprimée par l'angoisse. Mes yeux brûles comme si ils étaient remplis de larmes...des larmes??? Ce n'est pas possible je suis un chien, comment je pourrais avoir des larmes? Je suis dans le corps d'un animal stupide et primitif, il ne peut pas ressentir la peur et l'angoisse et encore moins avoir des réactions proches des nôtres...et pourtant ce sont bien des larmes qui s'accumulent aux coins de mes yeux et c'est bien la peur qui me vrille la tête et le ventre.  Je ne suis plus qu'à quelques centimètres du béton, les deux hommes derrière moi soulèvent encore un tout petit peu et me voila sur le sol, coller contre ses jambes. Je n'ose pas lever la tête, je sens son regard furieux sur moi. Une poigne solide m'attrape par la peau du cou et le collier de chaîne glisse par dessus mes oreilles. Les pointes viennent me mordre la chaire. La muselière vient mettre un terme à toutes tentatives de défense...je suis totalement à la merci de sa colère.  Il me traîne vers le mur ou un anneau est incruster. Il y attache le bout de la laisse. C'est à partir de là que le déferlement de coups a commencé. Ils arrivent avec une telle force et une telle rapidité que je suis incapable de dire si ce sont des coups de pieds ou de poings. Je reste coucher là à encaisser. Des hurlements stridents me brûlent les cordes vocales, les coups résonnes sourdement dans chacun de mes organes, je n'ai jamais connu une telle violence, j'ai pourtant déjà eu affaire à quelques branleurs ou mari jaloux, avec qui j'ai échanger quelques coups de poings, je ne vis pas au pays des bisounours, je ne suis pas débile mais rien de comparable à aujourd'hui, je ne pensais même pas qu'un être humain pouvait faire preuve de tant de haine.  Je me sens lentement glisser dans une douce torpeur, ses cris deviennent murmures, ses coups font bouger mon corps mais bizarrement je ne ressens plus aucune douleur, c'est comme quand quelqu'un vous remue l'épaule pour vous réveiller. J'ai sommeil, terriblement sommeil. Les yeux fermés j'attends de mourir, ce qui est moins terrifiant que l'idée qu'on s'en fait au final, tout devient calme autour de soi, on s'enfonce dans le néant comme quand on est anesthésier pour une opération ni plus ni moins:

"- Arrête tu es fou, tu vas le tuer!!!!"

Ce cri vient me chercher dans l'obscurité dans laquelle je suis en train de glisser...c'est elle:

"- Qu'il crève je m'en balance, c'est un bon a rien.

- Il est jeune, c'est la première fois que tu le faisait combattre, laisse lui le temps. Je suis sure qu'il est capable de t'étonner."

Je peine à ouvrir les paupières, je ne distingue que sa silhouette, mais c'est bien elle. Sa voix et son odeur...cette odeur qui s'est encrée dans ma tête des le premier jour et que je reconnaîtrais entre mille, cette voix qui m'apaise. Je crois que j'aurais besoin d'entendre cette voix jusqu'à la fin de mes jours, vitale comme l'air que je respire. Elle tend la main vers son poing levé, elle a peur, je le ressens au plus profond de mon être, mais elle abaisse lentement son bras:

"- S'il te plais, souffle t'elle. Laisse lui une deuxième chance.

- La prochaine fois je le laisse sur le carreau, c'est clair?"

Il repousse brutalement sa main et nous tourne le dos, sans oublier de me coller un dernier coup de pied dans les côtes avant. Garder les yeux ouverts me fais mal, je les referme, de toute façon je n'y vois rien. Elle détache la laisse et je sens ses mains glisser sous ma tête:

"- Je vais te retirer ça, murmure t'elle en décrochant la muselière."

La gueule enfin libérée, je prend une grande goulée d'air. Elle verse de l'eau dans le creux de sa main et me la verse doucement dans la gorge. Ça me fait tellement de bien que je me met à lécher frénétiquement sa paume qu'elle remplie au fur et à mesure.

 Les jours qui suivent elle s'occupe de moi non stop. Elle m'a poser un bandage sur les yeux, ils sont injecter de sang à cause des coups, je dois les reposer au risque de devenir aveugle, mais je m'en fiche, je n'ai pas besoin de la voir pour savoir qu'elle arrive, je la sens arriver avant même qu'elle passe la porte. Mon cœur s'emballe comme un ado qui attend son rencard, ses visites sont les seules choses qui me maintienne et qui me donne la force de me battre. Elle s'assoie devant ma cage, parfois même elle s'allonge, le visage tourner vers moi et elle me parle, de tout, de rien, de sa journée, de sa vie. Parfois, elle passe la main entre mes barreaux et me caresse doucement la patte, j'adore quand elle fait ça. Je sais tout d'elle de son enfance à aujourd'hui et je ne me lasse pas de l'entendre parler. C'est nouveau pour moi, j'étais tellement égoïste et imbu de ma petite personne que je n'ai jamais pris la peine d'écouter les autres et encore moins les femmes que je trouvais puériles et dénuées de tout intérêt, sauf pour un....alors qu'en fait elles sont intelligentes, drôles, douces et douées d'une empathie que je n'ai jamais trouver chez aucun mec. J'ai l'apparence d'un chien et pourtant elle me parle comme si je pouvais la comprendre, pire, lui répondre. Elle me demande si je vais mieux, si je suis bien installé, elle est....incroyable. L'autre connard est son mec, j'ai ressenti une étrange sensation quand j'ai appris ça, aujourd'hui je crois pouvoir dire qu'en fait j'étais jaloux...moi jaloux, c'est une première. Et je le déteste encore plus maintenant que je sais que je ne suis pas le seul sur qui il se défoule quand il a ses humeurs. Le jour ou elle l'a supplié de m'épargner je lui été reconnaissant, aujourd'hui je suis stupéfait qu'elle ait risquer sa colère pour un pauvre chien au risque qu'il se retourne contre elle.  Je vous l'ai dis...elle est incroyable. Si j'avais pu la rencontrer avant, elle seule aurait pu changer le salaud que j'étais ou peut-être pas, car aurais-je pris le temps de l'écouter comme je le fais aujourd'hui? Si ça se trouve je l'aurais blessé comme je l'ai fais avec toutes les autres. Je ressens de l'amour pour quelqu'un maintenant que je ne suis plus capable d'en donner, enfin si, mais pas comme j'aimerais le lui donner à elle. C'est peut-être ça ma pénitence, mon enfer personnel pour avoir si peu prêter attention aux autres dans ma vie, aimer sans rien recevoir en retour, n'être rien de plus à ses yeux qu'un chien. Parfois, dans mes rêves, certaines de ces filles viennent me hanter, ce qui me marque le plus ce sont leurs regards quand elles comprennent que j'ai jouer avec elles et qu'elles ne représentent rien à mes yeux. Leur tristesse et leur désillusion. Certaine m'ont donner leur cœur avec lequel j'ai jouer sans vergogne et d'autres leur virginité, ce qui est tout aussi cruel car c'est un moment magique et important dans la vie d'une femme et elles pensaient être avec celui à la hauteur de cette magie, elles me faisaient confiance et moi j'en ai profiter sans penser aux conséquences.  Je mérite ce qui m'arrive aujourd'hui. 


Chiens de combatOù les histoires vivent. Découvrez maintenant