Chapitre 1

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20 ans plus tard....

On frappa trois coups à la porte. Devinant l'identité du visiteur avant même qu'il ne s'annonce, je me jetai sur la poignée pour ouvrir.

Le drone était là, voletant devant l'entrée de mon appartement, tenant entre ses crochets l'enveloppe que j'attendais depuis deux longs mois. Fébrile, je voulus la lui arracher, mais l'engin recula brusquement et présenta sa plaquette d'identification digitale.

-       Veuillez confirmer votre identité, commanda-t-il de sa voix presque naturelle. Cléïs Jones, vous avez du courrier.

« Non, sans blague ? » pensai-je, exaspérée, en posant ma main droite sur le lecteur d'empreintes. Il était vraiment temps que la Compagnie des Livraisons modifie ces stupides messages pré-enregistrés.

-       Bonne journée, Mademoiselle Jones. Et merci de la confiance que vous accordez à notre...

-       Ouais, ouais, c'est bon, on a compris, grognai-je en saisissant ma lettre et en claquant la porte pour ne plus entendre le drone débiter ses salades publicitaires.

Je me laissai lourdement tomber à la table de la salle à manger et déchirai l'enveloppe de mes doigts tremblants. Je soupirai en songeant que si j'avais reçu un message express, j'aurais déjà pu le lire. Mais l'Institut était très attaché à la solennité des vieilles méthodes, et envoyer des lettres-papier en était une. Bon, il y avait tout de même une grosse faille dans ce système : ils étaient les seuls à procéder encore de cette manière, et le Service des Courriers avait disparu depuis bien longtemps ! Et la Compagnie des Livraisons n'était pas vraiment pointilleuse sur les délais, la distribution des lettres n'étant pas officiellement de son ressort. C'est pourquoi j'attendais ce moment depuis deux mois, au lieu de deux jours.

En extrayant la feuille pliée en quatre de son emballage de plastique, j'étais presque morte de peur. Quelle était leur réponse ? Si elle était négative, je m'étais promis de ne pas être déçue, mais je ne me sentais plus aussi prête à tant de courage. Et pourtant, il fallait bien que je la lise !

Je restai immobile ainsi un long moment, à peser le pour et le contre, à jauger mes chances d'avoir obtenu satisfaction, les yeux rivés sur le sigle que tous connaissaient, et qui ornait le papier à lettres.

Mais je finis par me décider et commençai ma lecture :

« Mademoiselle Jones,

En ma qualité de directrice de l'Institut des Sciences, j'ai étudié le dossier de candidature que vous nous avez transmis. Votre cursus étant des plus impressionnants, j'ai l'honneur et le plaisir de vous informer que votre demande d'affectation a été acceptée.

Conformément à l'article 522.4 de notre règlement, vous avez jusqu'au 138ème jour de l'année 3412 inclus (calendrier de la station Sirion II) pour vous présenter à l'Institut. En cas d'absence après cette date, votre poste sera réputé vacant, et vous n'aurez plus jamais la possibilité de faire partie de notre grande famille. Alors ne soyez pas en retard !

A très bientôt,

Johanna Wilcraft, directrice. »

Je posai la lettre sur la table en respirant profondément. Je n'en revenais pas. Moi, Cléïs Jones, je venais de devenir la plus jeune biologiste jamais acceptée au très prestigieux Institut des Sciences de Sirion II.

Une fois la surprise passée, je laissai éclater ma joie, bondissant de ma chaise et traversant l'appartement en hurlant comme une hystérique. Je tirai ainsi sur mes cordes vocales jusqu'à ce que le Détecteur de Décibels s'affole et que la voix métallique d'un Opérateur de Secours retentisse dans toutes les pièces.

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