00 - Un monde cruel - partie 2

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Nous fûmes réveillées le jour suivant par le bruit retentissant de quelqu'un frappant son épée contre la porte. L'une des esclavagistes féline était venue chercher la souris pour son nouveau travail. Cette dernière tenta de résister et se débattit, mais la différence de taille d'espèce ne jouait pas en sa faveur, sa tête atteignant à peine le ventre de son bourreau. Elle finit facilement trainée dehors. Une fois que l'assourdissant silence revint, mes pensées reprirent leur horrible besogne, et je ne pus retenir mes frissons.

La journée se passa, et la fille revint. Les quelques coup d'œil que j'osai lancer dans sa direction ne me rassurèrent pas. Elle n'avait pas tant de marque sur son corps, mais à sa façon de marcher, et à son regard vide rivé au sol, elle était anéantie. Même si nous n'étions pas muselées, j'étais convaincu qu'elle ne parlerait plus, à présent.

Le matin suivant, ce fut mon tour. Apeurée, quand la gardienne m'appela à l'aide d'insultes dégradantes déguisées en mots doux, je fis de mon mieux pour obéir, me levai rapidement et sortis. Cela ne l'empêcha pas de me claquer les fesses, m'ordonnant d'aller plus vite. Nous fîmes ainsi le chemin retour dans le dédale de couloir. Cependant, avant que nous n'atteignions l'entrée, une autre truande se plaça au milieu du chemin.

– Bouge ton gros cul, grogna mon escorte à l'attention de l'autre. J'veux pas que l'cheffe attende après son joujou préféré. J'ai perdu assez de dent comme ça.

– J'espère que t'aime la soupe, répondit la seconde avec un sourire, car la boss veut la chimère dans son bureau. Utilisation personnelle. Amène l'autre à la place pour l'entraînement.

Je ne compris pas le mot, mais elles parlaient clairement de moi. La première frappa violemment le mur de son poing, et cracha toutes les vulgarités qu'elle put. Elle tourna ensuite les talons et s'en alla. Nous prîmes donc, avec ma nouvelle compagnie, la direction d'autres zones de la caverne, et nous retrouvâmes devant une porte de bois sculptée, bien mieux construite que celle de la prison. La fille frappa, ouvra, et me poussa rapidement à l'intérieur.

Contrairement au reste du refuge, la chambre de la boss était meublée comme une maison fixe, et me fit comprendre que leur entreprise était en place depuis bien des années. Un pupitre se trouvait dans un coin, avec un empilement de paperasse et une magnifique plume dessus ; des équipements en cordes, en cuir et en fer pendaient sur le mur du fond, ou étaient exposés sur des étagères, certains dont je reconnu l'usage pour le combat, d'autres dont je ne compris pas, à ce moment, l'intérêt que quelqu'un aurait à les porter ; et un lit construit de l'autre côté de la pièce, avec une base surélevée, un matelas souple, et de gros anneaux de métal tout autour, dont j'allais vite découvrir l'utilité.

La boss était assise devant son secrétaire, plongée dans la lecture d'une lettre. Elle était la femelle la plus impressionnante qu'il m'eut été donné de voir, et pas seulement parce qu'elle était une louve grise. Un simple regard suffisait à comprendre qu'elle n'avait rien à voir avec une truande de grand chemin, mais était une guerrière qu'il ne valait mieux pas contredire. Elle avait le corps athlétique, arborait des symboles en guise de tatouage sur sa tête, son dos et autour de ses seins, et avait de telle cicatrices que sa fourrure manquait par endroit. Ses griffes étaient si pointues que je me demandais comment elle ne déchirait pas la feuille. Surmontées par ses courts cheveux noirs, les rides de son visage montraient qu'elle n'avait qu'une expression faciale : renfrognée. Quand elle se décida à se lever, je pus la contempler de toute sa taille, me faisant passer pour une pauvre souris. Elle posa son papier et s'étira.

– Fini pour la saison. Enfin un peu de plaisir maintenant.

Elle s'approcha tranquillement et commença à m'examiner scrupuleusement, même dans les endroits les plus indélicats. Même si je ne me serais jamais risquée à remuer le petit doigt, elle m'attrapa par le cou et s'assura que je ne bougeasse pas.

La guerrière aux yeux-coeurOù les histoires vivent. Découvrez maintenant