CHAPITRE I.

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Bertholdt se tenait debout face à son miroir, torse nu, les mains appuyés sur le plan de travail installé devant lui. Son regard le fixait avec pitié. Il soupira bruyamment, et il entreprit de nettoyer les nouvelles plaies dont il avait hérité dans la journée.

-Sacrés enfants de putains, grogna-t-il dans sa barbe qu'il n'avait même pas.

Lorsqu'il plongea dans le baquet de bois rempli d'eau chaude savonneuse, la douleur le reprit. L'eau s'infiltrait dans ses blessures et le piquait furieusement, comme de multiples petites aiguilles. L'étape du bain n'était plus un plaisir comme lorsqu'il était enfant. Parfois c'était une corvée, d'autres fois, comme celle-ci, une souffrance. Il ne resta donc que très peu de temps immergé, simplement le temps de laver ses beaux cheveux foncés, la seule chose dont il prenait vraiment soin. Quand il sortit de l'eau, il s'enveloppa dans une serviette, frissonnant.

-Bertholdt ! appela une voix familière depuis la pièce d'à côté. As-tu terminé dans la salle de bain ?

-Une minute, Maman !

Il s'habilla de vêtements légers, car il ne tarderait pas à aller se coucher. En sortant, il souhaita bonne nuit à sa mère et à sa sœur, Ymir, qui aidait à faire la vaisselle.

Sa chambre ressemblait d'avantage à une grange qu'un endroit où dormir. En effet, la maison était assez petite et il fallait donc bien trouver de la place où entreposer les outils. Ils étaient une famille de paysans. S'installant dans son lit composé de planches assemblées, de paille et de quelques couvertures, il pensa au jour suivant. Arriverait-il à s'affirmer enfin, ou prendrait-il tarif, comme tous les jours ?

Le Bertholdt enfouit dans son esprit lui disait de ne plus se laisser faire, de se lever contre ses bourreaux. L'autre Bertholdt, qui lui, vivait en surface, se disait que ce n'était pas si grave, que les garçons étaient méchants entre eux, que ça passerait. Finalement, il s'endormit la tête pleine de doutes.

Le lendemain, ça ne manqua pas. Il travaillait aux champs, et sa mission du jour était de labourer. Il attela donc un cheval de l'exploitation à sa machine, et commença à marcher derrière lui. La terre était tendre, le travail serait vite achevé. Cependant, le soleil tapait fort.

-Aller, mon grand, encouragea-t-il. C'est bientôt fini.

Si pour lui l'exercice était particulièrement physique, il n'imaginait pas la force dont la bête faisait preuve. Si lui perlait au front, le cheval écumait.

-Hoover ! Hé, Hoover !

Il tournait la tête et les vit approcher, piétinant le travail qu'il venait d'accomplir. Quand ils arrivèrent à sa hauteur, il vit la lueur belliqueuse dans leurs yeux. Il savait ce qui allait se passer, donc il serra les dents à l'avance.

-Alors, Hoover ? Tu travailles dur, on dirait.

-Hoover, c'est vrai que ta frangine n'a pas encore saigné ? Tu voudrais pas me brancher avec elle ? Je suis sûr que je pourrais lui plaire !

-Hé, Hoover, j'ai entendu dire que t'avais été payé double, cette semaine ! Tu voudrais pas partager un peu ?

Bertholdt essaya de se remettre au travail, mais l'un d'eux tenait le cheval par la bride pour le forcer à rester à l'arrêt.

-Je n'ai rien pour vous, assura le brun. Laissez-moi tranquille.

-"Laissez-moi tranquille !" imita un de ses assaillants en prenant une voix de fille. Sinon quoi, Hoover ?

-Sinon quoi, hein ? renchérit un autre.

Ils étaient quatre. Autrement dit, la grande taille de Bertholdt ne lui aurait été que d'un très mince avantage, et fuir était la dernière chose à laquelle il aurait pensé. Il n'était pas un lâche, ça non. Il connaissait ces quatre têtes depuis sa plus tendre enfance : il y avait Eren, Jean, Connie et Armin. Ils avaient été copains, autrefois. Mais abusant de la générosité de Bertholdt, ils avaient fini par en faire leur souffre-douleur.

Jean, le plus grand des quatre, saisit sa cible par les poignets avant qu'il n'ait le temps de réagir, et lui tordit simultanément les deux bras. Bertholdt tomba à genoux, une fois de plus. Connie, qui était une véritable fouine, vint le dépouiller du contenu de ses poches. Malheureusement pour le gentil, il y restait quelques pièces parmi celles qu'il avait durement gagné. Il avait espéré pouvoir acheter un savon de meilleure qualité en quittant le travail, pour l'offrir à sa sœur.

Fiers de leur victoire, le quatuor infernal sonna sa retraite par quelques exclamations enjouées. Les traits déformés par la honte et la colère, Bertholdt ne se releva pas tout de suite : il ne voulait pas qu'ils puisse voir dans quel état ils le mettait.

-N'oublie pas ce que j'ai dit pour ta sœur, Hoover ! Je l'aurais un jour, je l'aurais !

Je m'en sort bien aujourd'hui, se dit-il en reprenant son travail. Pas de nouvelles blessures. Avant de se remettre en marche, le cheval lui adressa un regard de compassion.

Le lendemain, Bertholdt était assigné au poulailler. Enfin une journée reposante ! Il en avait besoin. Son travail consistait à nourrir et à faire sortir les poules, tout en surveillant qu'aucune d'elles ne se fasse la malle en douce. Il allait pouvoir rester assis une bonne partie de la journée.

L'endroit où il travaillait était une petite bâtisse qui ressemblait à une forteresse. C'est donc installé dans la cour, proche du lavoir, qu'il surveillait les volailles. Le bruit de l'eau qui coulait dans le bassin près de lui l'apaisait. Il s'autorisa même à fermer les yeux quelques instants, profitant d'un peu de tranquillité.

-Hoover !

Oh non, pas déjà. Cette fois, la voix était celle d'Eren. C'était un peu lui, le chef de la bande. Il se planta devant Bertholdt qui, assis, était en position de faiblesse.

-Est-ce que tu as fait ce que je t'ai demandé, Berthi ?

Bertholdt fronça les sourcils, les yeux levés vers le sourire narquois d'Eren.

-C'est bien ce que je pensais. Tu n'as pas parlé de moi à ta sœur. Tu sais quoi Berthi, ce n'est pas grave. J'irai simplement la courtiser moi-même.

Les autres ricanèrent. Bertholdt se propulsa pour se relever, mais Eren lui donna un coup de pied qui le projeta au sol et lui coupa le souffle.

-Non non, Berthi. Reste par terre devant moi. C'est là, ta place.

Les poings serrés, le grand se sentait parfaitement impuissant. Il était couvert de honte. Il était même incapable de défendre sa propre famille. Et pour couronner le tout, il vit une poule sortir par la grande porte qui était restée ouverte. Il allait se faire engueuler, voir ne pas être payé. Le patron comptait les poules chaque jour.

Alors qu'il se retournait pour s'en aller, Eren ajouta encore :

-Et crois-moi que je la trouerais comme il faut, cette Ymir Hoover.

-La seule chose sera être trouée, c'est ta face !

Bertholdt observa la scène qui se déroulait sous ses yeux. Son cerveau devait lui jouer des tours, il ne le croyait pas.

[Voici le premier chapitre ! J'espère que ça vous plaît ! N'hésitez pas à voter et à me donner votre avis, ça me ferait très plaisir ! Bonne journée/soirée/nuit à vous !]

[REIBERT] Comme un éclat d'or... [TERMINE]Où les histoires vivent. Découvrez maintenant