Quelque part, entre le couloir et le bureau de maman, quelque chose résonne ;
Dap dip dip dap dip dip dap dip
quelque chose gratte ;
Krch - krch - krch - krch - krch - krch
quelque chose s'affole -
- ERIC !
maman hurle.***
La chambre d'Eric est une pièce vaste, sombre, élégante - adulte.
Eric est un enfant. Eric veut voir des piles de jouets, des cubes colorés, des teintes vives sur les murs, de larges fenêtres pour laisser passer la lumière. Eric veut maman.
Les jouets - ils sont dans le bureau de maman. De l'autre côté du couloir. Mais papa ne le laisse plus y toucher - ne le laisse plus y entrer.***
- ERIC !
Maman hurle encore. La chose gratte -
krch krch krch krch
Eric se terre dans son lit, pétrifié. Et la chose résonne -
Dap dip dip dap dip dip dap
- Eric...
Il entend un sanglot. Tout est fini - le silence.***
Les rideaux - Eric les hait. Ils sont immenses, pourpres, ondulant au moindre courant d'air, et n'importe quel monstre pourrait être caché derrière, et eux-mêmes cachent le moindre rai de lumière... mais le lit... le lit est bien pire.
Il est grand. Il est large - trop pour une seule personne. Il est froid. Et surtout, surtout - il rappelle à Eric que jadis, le sourire de maman venait réchauffer l'endroit.***
Ce silence, il est... assourdissant:
Ses pieds se plaquent lentement contre le sol frais - il frissonne. L'air est froid sur ses chevilles découvertes, mais... aucune importance. Maman a besoin de lui.
Un, deux, trois pas. Sa main sur la poignée en cuivre ouvragé. La porte s'ouvre.
Le grincement est sonore, hérissant - un grincement de fin du monde. La chose s'affole, le bruit plus proche désormais -
Dap dip dip dap dip dip dap
ses pieds foulent le tapis qui étouffe le moindre son - sans un bruit, sans un bruit...
Ses yeux - ils sont fixés sur la porte tout au bout, tout au bout, la porte noire et sombre, si loin, si loin...
Et déjà il se tient devant elle, avance une main tremblante -
(La chose s'est tue)
et l'ouvre.
Le bureau de maman est rangé comme dans son souvenir :
tout y est ordonné, rangé, trié ; rien qui ne dépasse des étagères, pas de lumière qui filtre à travers les lourds rideaux semblables à ceux de sa chambre ; l'air est immobile. Épais. Tout est pareil.
Et pourtant - quelque chose ne va pas.
Cela commence avec une vague odeur, qui s'intensifie comme les secondes passent et qu'Eric attend, pétrifié...
Et puis maman est là.
Sauf que - ce n'est pas maman.
La chose lui adresse un sourire décharné, lui tend une main squelettique -
Eric hurle.***
La pièce est silencieuse. Calme. Sombre.
Des pas se font entendre - et voilà qu'une silhouette se dresse dans l'embrasure de la porte.
- Bon dieu, Eric... dit papa.
Agenouillé sur le tapis, l'enfant pleure.
Tout au fond de la pièce, là où le regard peine à percer l'obscurité - là, la lueur d'un sourire sinistre, d'yeux rougeoyants, vient de s'éteindre.***
Alors pour celui-là, j'hésite - parce que bon, il a pas tout à fait le format des autres. Du coup, plutôt le laisser ici ou en faire une nouvelle à part entière ? Help, j'ai besoin d'avis 😂
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Et d'un même cri nous tissons l'infini
NouvellesParce qu'ils sont là, centaines de silhouettes dont jamais on n'entend la voix, j'essaie de leur prêter la mienne. Recueil de courts textes. Couverture réalisée par la merveilleuse Raysolem ^^