Chapitre 9

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Quelques heures après le départ de Matthias, je me trouvais dans la cour arrière, assise sur une chaise, en train de regarder le soleil se coucher peu à peu. Plus tôt dans la soirée, Luke avait reçu un appel et avait dû se rendre au poste de police. Lucie, elle, était en train de regarder un documentaire sur Opra Winfrey dans le salon. Je n'avais pas voulu me joindre à elle, préférant être seule. Elle n'avait pas paru mal le prendre. Ne voulant pas rester enfermée dans ma chambre, j'avais voulu aller marcher en forêt comme la dernière fois, mais il commençait à faire sombre alors je m'étais juste installé dans la cour.

J'ignorais depuis combien de temps j'étais là. Probablement une éternité. Quand je me perdais dans mes pensées, je ne voyais plus le temps passer. Et ma tête était remplie d'une tonne de chose. De choses auxquelles je ne voulais pas penser, mais c'était plus fort que moi.

Je levais mes mains vers mon visage et me frottais les yeux en soupirant. Il était temps que je rentre. Je me levais et me dirigeais vers la porte quand j'entendis un couinement. Je me tournais mais n'aperçus rien du tout. Probablement mon imagination qui me jouait des tours. Mais à peine pensais-je à ça qu'un autre couinement se fit entendre. Le son provenait de la forêt. Je fronçais les sourcils. Est-ce que je devais aller voir? La dernière fois, ça ne s'était pas super bien passé. Mais il fallait croire que je n'apprenais pas de mes erreurs puisque j'étais déjà en train de me diriger lentement vers l'orée de la forêt.

Une fois dépassés les premiers arbres, je cherchais des yeux la source de ce couinement, mais, encore une fois, n'aperçus rien. Je m'apprêtais à faire demi-tour quand je le vis. Le louveteau. Il était tapi dans les feuilles au sol, derrière un arbre. Je le foudroyais des yeux, même si visiblement ça ne lui faisait rien.

- Qu'est-ce que tu fiches ici? Chuchotais-je.

Son poil était encore plus sale que la dernière fois. On aurait dit qu'il s'était roulé dans la boue. Ce qui était probablement le cas. Est-ce que ses blessures étaient guérit? Et pourquoi est-ce que je m'en inquiétais? Je levais les yeux pour observer la forêt, à la recherche de mouvement entre les arbres.

- Tu devrais t'en aller, lui dis-je.

Il ne bougea pas.

- Tu sais, ce n'est que la deuxième fois qu'on se rencontre. Je ne suis pas encore prête à rencontrer tes parents.

Il ne bougea toujours pas.

- Aller va-t'en! Lui dis-je plus sévèrement en faisant des signes de la main.

Il pencha la tête sur le côté. Je soupirais, puis, compris ce qu'il attendait.

- Je n'ai rien à te donner, lui dis- je en lui montrant mes mains vides.

Il observa mes mains et poussa un couinement. Le même que j'avais entendu quelques minutes plus tôt. Ce traitre m'avait attiré dans la forêt. Je l'observais encore un instant sans qu'aucun de nous deux ne bouge, puis je jurais.

- Reste là, je reviens.

Je rentrais dans la maison et me rendis à la cuisine pour prendre un bâtonnet de bœuf séché. Avant de ressortir, je vis que Lucie s'était endormie sur le fauteuil. Je posais doucement une couverture sur elle et éteignis la télévision.

Une fois dehors, je me dirigeais vers un vieux cabanon dans la cour et y trouvais ce que je cherchais. Quand je fus de retour près de la forêt, je déposais le grand bac, que j'avais rempli d'eau au préalable, juste devant les arbres. Le louveteau n'avait pas bougé. Je déballais le bœuf séché et tendis la main vers lui. Il se leva et sentis l'air en étirant le cou, mais n'osa pas s'approcher pour prendre le bout le viande.

Bien. Il ne me faisait pas totalement confiance. C'était une bonne chose.

Je lui lançais le morceau de bœuf. Il l'attrapa au vol et se déchaîna dessus. Quand il eu fini, je reculais de plusieurs pas. Il observa chacun de mes mouvements. Il avança d'un pas, mais se figea. Je voyais bien qu'il était nerveux, mais il fini par sortir de la forêt pour aller vers le bac d'eau. Il but si longtemps que je fini par me demander depuis combien de temps il ne l'avait pas fait.

- Comment s'appelle ton nouvel ami?

Je sursautais et me tournais vers la voix. Lucie se tenait dans le cadre de la porte et nous regardait. Depuis combien de temps nous observait-elle? Je ne savais pas trop si je devais me sentir honteuse. Je me tournais vers le louveteau.

- Je ne lui ai pas donner de nom.

Elle regarda le petit loup un moment, puis tourna vers moi.

- On ne le voit pas très bien sous toute cette saleté, mais je crois qu'il est albinos. Il a probablement été rejeté par sa meute, c'est pour cette raison qu'il est dans cet état. Il ne survivra pas longtemps tout seul.

- Qu'est-ce que tu veux dire? Demandais-je confuse.

- C'est un loup. C'est un animal de meute. Il n'est pas fait pour vivre seul. Il doit apprendre à chasser pour survivre. Mais je suppose que si tu l'aide un peu, il devrait pouvoir s'en sortir. De plus, s'il doit traîner dans les parages, je préfère qu'il ne nous voit pas comme son prochain repas.

Sur ce, elle rentra dans la maison, comme si trouver sa petite-fille en compagnie d'un loup dans la cour arrière lui arrivais souvent. J'observais le louveteau en haussant les sourcils. Est-ce qu'elle me suggérait vraiment de l'aider?

Après plusieurs minutes, il retourna dans la forêt en courant. Il s'arrêta au bord des arbres pour me jeter un regard et disparu. Je rentrais dans la maison et trouvais Lucie assis au comptoir.

- Je lui ai trouvé un nom, lui dis-je.

J'avais l'impression d'être une enfant en disant ça. Je haussais les épaules d'un air détaché.

- Je me suis dit que ce serait mieux que de toujours dire le louveteau.

Elle sourit.

- Et tu l'as appelé comment?

- Ulysse.

Il m'était venu à l'esprit facilement.

- Ça a une signification? demanda Lucie.

Je réfléchis pour trouver les bons mots.

- Ulysse est un héros grec. Tu connais l'histoire de l'Odyssée?

Lucie fit signe que non et attendis que je continue mon histoire.

- Dans ce récit, Ulysse a crevé l'œil d'un cyclope, et pour se venger, Poséidon, le père du cyclope, l'a fait s'égarer alors qu'il essayait de regagner Ithaque, dont il est roi et où l'attende sa femme et son fils. Pendant une vingtaine d'année, Ulysse a erré et a traversé toute sorte de danger. Il est même aller jusqu'à visiter l'enfer. Il avait perdu son chemin, mais il continuait de se battre. C'est pour ça que j'ai donné son nom au louveteau. Il me faisait un peu penser à lui et j'espère qu'il pourra retrouver son chemin.

Lucie me regarda attentivement.

- Et toi, ton histoire te fait penser à la sienne? Me demanda-t-elle doucement.

Je baissais les yeux et haussait les épaules. En vérité, mon histoire ne me faisait vraiment pas penser à celle d'Ulysse. Contrairement à lui, je n'avais pas de maison à retrouver. Je n'avais pas perdu mon chemin, puisque je n'en avais jamais eu et ça faisait maintenant bien longtemps que j'avais cessé de me battre. Par contre, pour ce qui était de visiter l'enfer, ça je l'avais fait.

- Après toutes ces années, continuais-je, les efforts d'Ulysse ont fini par porter leurs fruits. Il y a d'autre détails sur son retour, mais au bout du compte, il a retrouvé sa maison et sa famille.

- C'est une très belle histoire, me dit-elle.

- Oui, je suis d'accord.

Lucie se leva et posa une main sur mon épaule.

- Bon, je suis épuisée, je vais aller dormir. Tu devrais en faire autant, ma puce.

J'acquiesçais.

- Bonne nuit Lucie.

- Bonne nuit.

How To Love Life When...?Où les histoires vivent. Découvrez maintenant