Chapitre VII

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Le lendemain à l'aube, ils se retrouvèrent devant le palais d'Eurycratidès. Hylas n'avait croisé personne dans les couloirs. Le palais était plongé dans une cette douce torpeur qui succède toujours une grande fête. Les gardes eux, étaient toujours à leurs postes et ils jetèrent à Eria et Hylas des regards méfiants lorsqu'ils passèrent la poterne.

Quand ils furent dans la rue, Eria lui fit signe de la suivre. Ils ne s'étaient pas parlés depuis leur départ.

-D'après ce que tu m'as dit, commença Eria, le père qui t'abandonne étant petit, les mystérieux pouvoirs, le messager qui disparaît...Je pense que ton père est, enfin, pourrait être un dieu.

-Aussi étonnant que cela puisse te paraître, répliqua Hylas, j'avais déjà pensé à cette éventualité, même si je n'osais pas vraiment y croire.

-En fait, reprit Eria, c'est plus fréquent que l'on imagine. Les dieux aiment beaucoup se mêler aux mortels. Mais ils sont peu nombreux a revendiquer leur enfants. La plupart du temps, ces enfants ne le remarquent même pas, surtout ceux qui ont hérité de peu de pouvoir de leur parent divin. Mais les plus puissants sont souvents pourchassés par les immortels ennemis de son parent divin et ils meurent. D'autres survivent et deviennent généralement célèbre, comme Ulysse, ou Atalante.

-Mais alors, quel serait mon parent divin? J'y ai souvent pensé mais je n'ai jamais trouvé un dieu qui me correspondrais...

-Quand on a vécu ce que j'ai vécu, on se renseigne le plus possible sur les immortels. De nouveaux dieux sont nés, dans les derniers siècles. La plupart sont fils de Zeus. Celui qui pourrait être ton père, Janus, ne fait pas exception. Il est fils de Zeus et de Créüse, fille du roi d'Athènes. Le culte qui lui est voué est encore récent. Il n'a pas beaucoup de fidèles, ni de temples, mais il se trouve qu'il y en a un à Sparte.

-Un héros m'a parlé de Janus, s'écria Hylas. À Tyrinthe, un nommé Héraklès m'a appelé fils de Janus!

-Oui, approuva Eria, ce n'est pas un hasard. Tout se recoupe. Ce messager t'a envoyé à Sparte pour que tu puisses te rendre au temple de Janus c'est évident!

Ils étaient parvenus à l'esplanade des temples. Encore sous le choc des dernières révélations, Hylas n'avait pas remarqué qu'ils étaient allés aussi vite. Il s'arrêta un instant pour profiter de la vue. De là où ils étaient, ils surplombaient toute la ville. Il voyait au loin le soleil se lever derrière la forêt.

La voix d'Eria le ramena brusquement à la réalité:

-Le temple de ton père est tout près. Tu n'as pas envie de le voir?

Il la suivit, délaissant à regret le le rebord de l'esplanade. Ils passèrent devant le temple de Nikè, qui avait été spectaculairement remis en état depuis leurs actions d'éclats.

Eria s'arrêta devant un temple de pierre blanche, environ deux fois plus petit que celui de Niké. Sur le fronton était représenté un homme bouclé avec deux visages: un normal à l'avant et l'autre, à l'arrière du crâne.

-Qu'est-ce que...voulut demander Hylas avant d'être interrompus par la voix d'Eria.

-Ah oui, j'avais oublié. Ton père, si nous ne nous sommes a trompés est bicéphale. Il a deux têtes... Enfin, en l'occurrence, deux visages...Très bien, je vais te laisser maintenant Hylas. Retrouve ton père. Prends ton temps. Quand tu en auras fini, viens me retrouver au palais, j'aurais quelques petites choses à te dire.

Hylas ne répondit rien. Elle s'en alla. Il resta longtemps devant la porte, à tergiverser. Lorsqu'il se décida, le soleil avait déjà parcouru le quart de sa course. Il ouvrit la porte du temple. Près de l'autel se tenait son père.

***

Hylas aurait voulu lui poser milles questions, lui demander pourquoi il l'avait abandonné, pourquoi il n'avait pas aidé sa mère, pourquoi il ne l'avait pas aidé lui! Mais il resta muet. Son père avança vers lui. Il était grand, brun et bouclé et avait effectivement deux visages. Janus se mit de face vers lui et il ne vit plus le visage de l'arrière de sa tête.

-Mon cher fils, dit Janus d'une voix chaude et grave. Je sais que tu te poses beaucoup de questions. Je savais ce qui allait arriver à ta mère mais je n'avais pas le choix. Quelle ironie...Être le dieu des choix et ne pas pouvoirs prendre ses décisions! Les Moires° m'avaient montré ta destiné bien avant ta naissance. Un bien lourd poids repose sur toi. De ta vie dépendra l'équilibre du monde. Cependant, jamais personne ne connaîtra ton nom, ni ce que tu as fait. Tu seras le Σκιασερώς°!

Les Chroniques de La CléWhere stories live. Discover now