- Chapitre 10 -

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Jeudi 1er Octobre :

    Une douce odeur de crêpe titilla mes narines, m'éveillant d'une nuit peu réparatrice.
    Mon corps, après le cours de sport et ma douche régénératrice, s'était subitement ankylosé et l'épuisement m'avait frappée. Pour autant, mon cerveau m'avait empêchée de trouver refuge dans les bras de Morphée, m'obligeant à me distraire comme je le pouvais. Netflix et discussions nocturnes avaient été de la partie, et au moment où j'allais enfin laisser à mon corps le temps de répit qu'il méritait, les pleurs de Tom m'avaient rappelée. Alors, je tentais de faire bonne figure après seulement quatre misérables heures de sommeil.

    J'entrai dans la chambre de mon fils, encore un peu sonnée, et remarquai, à mon plus grand étonnement, l'absence totale de ce dernier dans son lit. Mes sourcils se froncèrent face à cette incompréhension. Je retournai sur mes pas et pris les escaliers, me rendant à la cuisine, soucieuse.
    Je soufflai un bon coup lorsque j'aperçus Tom, admirant mon frère qui retournait une crêpe. Le grand blond se tourna dans ma direction et un sourire étira ses lèvres.
- Tiens, Luciole. Ça s'passe ton réveil ?
Je le considérai, légèrement décontenancée et toujours aussi ensommeillée. Je me frottai les yeux et m'étirai un bon coup.
- Salut, Sting. J'suis pas très bien réveillée là, mais merci pour ce doux réveil. L'odeur s'est ramenée jusqu'à ma chambre.
Mon frère riota tandis qu'il déposait la pâte sur la poêle. Je me tournai vers mon fils et m'abaissai, touchant son nez du bout du doigt.
- Maman ! S'exclama le petit blond, se jetant dans mes bras.
Tom enfonça sa tête dans ma poitrine, y trouvant un agréable réconfort. Je le portai jusqu'à sa chambre pour le vêtir d'une sublime petite salopette bordeaux dont j'avais faite l'emplette à ma dernière séance de shopping avec ma mère.
     Le jeudi, nous avions la chance de commencer à dix heures et, puisqu'étant à peine neuf heures passées, je profitais du temps que je possédais.

     Après un bref débarbouillage, je me brossai les cheveux et les laissai librement détachés. J'appliquai une fine couche de mascara après avoir donné de la couleur à mes paupières, estompant avec un fard rose balais et passant un dernier coup de gloss.
    Je me vêtis d'une jupe évasée de couleur grise sombre, dissimulant mes jambes avec un opaque collant noir, et portant un body en velour pêche avant de casser cette tenue élégante avec mon habituel perfecto.
- Parfois, j'me demande combien de meufs doivent te jalouser. Lança Sting, amusé.
Je me plaçai à ses côtés et laissai enfin mon estomac goûter à ces délicieuses crêpes, préparées par mon talentueux frère. Je les savourai sans retenue et lâchai même un grognement de plaisir, sous les rires moqueurs de Sting.

    La matinée se déroula sans encombre, et l'après-midi aurait pu se passer dans la même tranquillité si un petit groupe de filles ne serait pas venu à ma rencontre, alors que je me posais pour déjeuner.
   Je m'attaquais à mon poisson au moment où elles entrèrent dans mon champ de vision.
    Un trio féminin de mon âge se tenait devant moi. L'une d'elles, celle au centre, possédait une volumineuse tignasse proéminente. Sa peau laiteuse créait un contraste avec la couleur sombre de sa chevelure, et son regard café me toisait sans se le cacher. Le mien se leva vers elle et, muette, j'attendais que l'une des trois se lancent.
- C'est toi qui as passé le Bac en Seconde ? Me demanda finalement celle du milieu.
Je sourcillai, les dévisageant une par une. Je tenais toujours ma fourchette en main tandis que la vapeur de mon plat me réchauffait légèrement le visage.
     D'un hochement de tête, j'opinai et, la sympathie et la politesse les étouffant sûrement, elles s'installèrent à ma table, m'observant longuement.
- Tu t'appelles comment ? S'enquit de savoir la rousse du groupe.
- Euh... Lucy.
- C'est vrai que c'est parce que t'as eu un enfant que t'as redoublé ? M'interroga la tignasse, me coupant presque dans mon élan.
Mon cœur bondit dans ma poitrine, accélérant son pompage de sang. Mes mains s'humifièrent et un désert trônait dans ma gorge. Je masquai tant bien que mal ma gêne et baissai les yeux.
- Alors ? Continua la prétendue leader du trio.
- Plus ou moins, ouais.
De faibles messes basses entre le trio bourdonnèrent dans mes oreilles avant qu'il n'y eût un silence accusateur.
- Alors t'as vraiment été violée ? S'interrogea donc la blonde, silencieuse depuis le début.
Une grimace se forma devant l'incompréhension et je relevai mon regard pour considérer leur question grotesque et impudique. La rage me monta brusquement face à leurs idioties de commérage. Je posai brutalement mes mains sur la table, me levant de ma chaise, sous le regard intrigué de tous.
- Mais putain, vous m'voulez quoi à la fin ?! On n'a pas élevé les cochons ensemble à c'que j'sache ! Allez piailler ailleurs que sous mon nez parce que je suis à deux doigts de vous en mettre une pour votre irrespect de merde. Crachai-je à ces trois cruches de façon crue et cinglante.
Ces dernières se tenaient raides comme des piquets sur leur chaise.    Me fixant sans bouger, leurs yeux ressortaient presque de leur orbite. Le trio déguerpit finalement aussi vite qu'il était venu.
     Un soufflement calma ma colère et je me rassis, ne prêtant pas attention au regard qu'on me jetait. Ensuite rejointe par mes meilleures amies, qui faisaient encore la queue, la sérénité reprit place dans mon esprit.

    Le soleil commençait à se coucher, laissant le ciel se métamorphoser dans un doux orangé des plus agréables à l'œil. Je marchais dans les rues de Magnolia, ayant pour mission de rapporter le dîner de ce soir. L'air frais me provoquait des frissons dans tout mon corps, même habillée d'un jogging molletonné et d'un pull en laine.
    Je remerciai pourtant ma mère de m'avoir forcée à prendre mon écharpe avec moi. Je n'avais aucune dégaine mais le confort de mes vêtements me convenaient plus que la jupe de ce matin.
    Je me rendis donc à l'endroit qui détenait mon repas du soir et restai à attendre une bonne dizaine de minutes mon tour.

     Ma tâche accomplie, je sortis du restaurant et râlai de mécontentement face à la fâcheuse météo qui s'était annoncée. J'extirpai de mon sac à main mon parapluie qui me couvrit instantanément de la pluie qui s'abattait sur Magnolia. J'entrepris de faire alors le chemin inverse que précédemment pour rentrer dîner un bon repas au chaud, chez moi.
    Sur ma route, tandis que je fixais continuellement mes chaussures depuis le début de ma marche, mon regard s'éleva à la hauteur du faciès des rares passants. Il rencontra soudainement un jeune homme à la chevelure rose, les mains dans les poches et le regard sombre, se faufiler dans les rues du centre ville. Il se trouvait que ce garçon, que je connaissais bien, n'était vêtu que d'un simple blouson qui ne le protégeait en aucun cas de l'averse. Sa paire d'écouteurs enfilés dans ses oreilles,    Natsu ne prêtait pas attention à ce qui l'entourait, bien trop encré dans ses pensées.

    De loin, je l'observais marcher promptement sans but. Pour une raison que j'ignorais, mon cœur se serra et un air peiné se peignit sur mon visage. Un air que j'effaçai tant bien que mal, bien décidée à aller aider mon ami.
    J'accélérai le pas et le rattrapai rapidement, couvrant sa tête de l'averse. Il s'arrêta dans sa course et se retourna, détaillant la personne qui se trouvait en face de lui. Je lui tendais mon parapluie alors qu'il me fixait toujours, désemparé.
- Alors comme ça, tu te promènes tout seul, sous la pluie ? Ça fait un peu drama tout ça, tout ça. Lançai-je.
Natsu eut un temps de réflexion avant que ses yeux ne se baissent, l'air toujours aussi chagriné. Le rosé posa de nouveau son regard sur moi, concédant à un faible sourire.
- Ça fait bien pathétique, ouais. Se moqua-t-il.
Un petit sourire se dessina sur mes lèvres. Je me rapprochai de lui et me retrouvai de nouveau sous mon parapluie. Mon écharpe le réchauffa tandis que Natsu me scrutait, dérouté.
- Qu'est-ce que tu fais ?
- Tu crois vraiment que je vais te laisser dans cet état alors qu'il pleut ? Alors ça, c'est hors de question.
Le rosé passa par plusieurs réactions avant que ses traits ne s'adoucissent, tout comme son regard. Natsu marmonna un remerciement presque imperceptible que je réussis pourtant à comprendre. Je lui adressai un large sourire pendant que son regard se posa sur le sachet que je tenais en main.
- Ça doit être trempé, nan ? Me demanda-t-il.
Je vérifiai le contenu et soufflai de soulagement, secouant de la tête comme réponse. Je regardai l'heure sur mon téléphone avant que mes yeux ne trouvent refuge dans le regard de Natsu. Un contact visuel qui réchauffa mon cœur.
- Ça te dit de faire un p'tit tour à Starbucks ? Lui proposai-je.
Mon ami me considéra un instant, toujours aussi désorienté, détournant par la suite le regard, embarrassé.
- Pourquoi pas...

   Sur la route, je tentais d'engager la conversation et Natsu ne me laissait pas bider. Je contournai le sujet sensible puisqu'il était inutile que je le sache. Après tout, sa vie ne me regardait ni de loin et encore moins de près.
- Je devais normalement me garder toute la bouffe pour moi et ne rien laisser à ma famille mais, je te laisse une cuisse de poulet si tu veux.
Natsu réprima un sourire, à mon plus grand bonheur, et accepta ma cuisse. La discussion avait pris vie. Les sujets étaient variés et s'enchaînaient continuellement et ce, à mon plus grand plaisir.

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Credit to @ksmile1313 on insta

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