Chassés-croisés de Noël

Chapitre 1 : c'est le destin

La première chose que fit Martin quand il quitta le bureau de son rédacteur en chef fut d'envoyer un sms à Yann pour le prévenir de la formidable nouvelle que son patron venait tout juste de lui annoncer. C'était une opportunité en or pour lui, il était trop heureux, et il n'y a qu'avec son Chambérien préféré qu'il avait envie de partager sa joie.

« Hey devine à qui on a demandé de couvrir la conférence annuelle du jouet ? »

« C'est génial Martin, je suis trop content pour toi ! Ça va te changer de la rubrique nécrologique ».

« C'est clair. Et puis surtout, on pourra enfin se voir ! »

Il savait qu'en tant qu'assistant du PDG de la marque de jouet Ecoiffier, Yann serait forcément là et cela le rendait tout aussi euphorique que totalement tétanisé par l'enjeu de cette rencontre capitale pour lui. Treize mois déjà qu'ils échangeaient par mails ou se parlaient par sms, Martin ne se souvenait même plus comment était sa vie avant que le brun à frisettes ne fasse joliment irruption dans la sienne.

« Je sais, c'est la première chose à laquelle j'ai pensé quand j'ai eu ton message ». 

« C'est le destin ». 

« Voilà ». 

« Mon premier article en plus. Tu te rends compte ? C'est juste énorme. Mon boss me fait confiance. J'ai la pression. Je suis hyper nerveux ». 

« Mais non, t'inquiète Martin, ça va bien se passer, tu vas tout déchirer, je crois en toi ». 

« Merci, ça fait plaisir. Comment j'ai hâte d'y être. »

« Moi aussi. J'ai jamais été aussi pressé d'être à vendredi je crois.»

« Tu m'étonnes, moi pareil ».

Le sourire de Martin se figea, la boule au ventre, il se demandait s'il devait avouer toute la vérité à Yann alors qu'il sentait déjà le peu de courage qu'il avait lui faire défaut à la simple idée de tout lui avouer.

Affalé sur le canapé avec son téléphone en main, Martin avait les yeux rivés sur l'écran de ce dernier et un sourire niais aux lèvres.

- à qui t'envoies des sms ?

Hugo l'interrogea du regard tout en prenant place à ses côtés en face du téléviseur, la télécommande soigneusement en main.

- Yann.

Son colocataire n'avait même pas daigné relevé la tête vers lui et Hugo leva les yeux au ciel au passage.

- pourquoi je pose encore la question ?

- il sera là. Ce week-end. À la conférence. On règle les derniers détails pour que tout soit parfait pour après-demain.

- et ben, c'est pas trop tôt ! Je croyais que ce jour n'arriverait jamais. Tu dois être comme un dingue j'imagine.

- ouais, terrifié serait plus juste.

Cette fois les yeux de son colocataire oscillaient entre lui et l'écran de son téléphone, il y avait déjà un léger progrès, miracle !

- à ce point ? Pourquoi ?

- parce que... ça fait 13 mois qu'on se parle tous les deux et puis tu me connais, je suis capable de tout faire foirer en même pas 13 secondes.

- mais non, tu vas rien faire foirer du tout, sois pas aussi dur envers toi-même. Le secret c'est de pas trop stresser et ça devrait rouler tout seul. Au pire, je veux bien t'accompagner à cette conférence moi, c'est pas un souci...