Les noces funèbres

Chapitre 17

Du côté des parents d'Eren, c'est l'angoisse totale.

Où était-il donc passé ?

S'il ne réapparaît pas, ils pourront dire adieu à leur futur titre de noblesse.

À l'abri du vent et du froid dans leur élégant carrosse, les Jeager se plaignent encore et encore.

Leur fils est un ingrat.

Leur fils n'est qu'un égoïste.

Leur fils est un idiot.

Mais leur fils reste leur fils.

Pendant ce temps, Hannes, le cocher, continue encore et encore de cracher ses poumons.

Sa toux ne s'arrête pas.

Alors que le véhicule passe le pont qui donne sur la sinistre forêt, on peut entendre au loin la voix d'Armin qui crie sur tous les toits les nouvelles.

-"Un nouveau venu pour mademoiselle Ackerman !"

De quoi parle t-il ?

-"Eren marié à un mort !"

Ce jeune homme n'a plus toute sa tête, songe les Jeager en pénétrant dans le bois.

Hannes tousse encore.

Pour la dernière fois.

-"Hannes, arrêtez ce bruit ! Il me dérange !"

Pas besoin de le lui dire.

Hannes a arrêté de tousser.

Hannes n'est même plus sur le carosse.

Hannes est tombé.

Hannes a cessé de respirer.

Hannes est mort.

En parlant de cadavres, retournons voir comment se passe l'histoire entre nos deux jeunes marié dans le monde d'en bas.

Eren parcourt les rues à la recherche de Levi pour s'excuser.

Il s'en veut un peu, d'avoir manqué de tact.

D'avoir dit les choses un peu trop sévèrement.

Mais il fallait bien que Levi comprenne.

Cependant, Eren ne veut pas le voir triste.

Il a l'impression que sa poitrine se comprime, quand son époux pleure.

Le châtain finit par le retrouver, assis sur un vieux banc en bois, jouant du piano.

Jouant une bien triste mélodie.

Eren avait retrouvé le bouquet de fleur quelques temps plus tôt, alors il avait décidé de le lui rapporter, en gage d'excuse.

-"Écoutez, je suis sincèrement désolé pour tout à l'heure..."

Mais le mort aux yeux orageux est bien trop en colère pour l'écouter.

La musique qui s'échappe du piano devient soudainement plus rapide. Plus grave.

Comme si Levi essayait de lui faire passer un message.

"Comme si ça allait suffire, Dom Juan de Pissotière."

Alors le vivant, ne sachant pas trop quoi faire, prend place aux côtés de son mari.

Et pose ses doigts sur les touches de l'instrument.

-"Je n'aurais pas du vous dire toutes ces choses tout à l'heure..."

La mélodie devient plus brutale.
Plus bestiale.

"Je ne te le fais pas dire !"

Eren écoute attentivement chaque note.

-"Mais il fallait que vous compreniez."

La mélodie s'adoucit. Redevient calme et mélancolique.

"Oui, je sais bien. Je vivais dans une illusion, mais je m'en fichais, tant que tu étais là. "

Puis, le jeune Jeager commence à jouer.

Dans les aigus.

Une douce mélodie agréable à l'oreille.

Le marié cadavérique, qui s'était arrêté de jouer, reprend sa musique.

Dans le grave.

Une mélodie qui exprime sa colère, une mélodie qui exprime sa rancune.

Et Eren répond.

Par une mélodie coupable. Une jolie mélodie qui chante ses excuses.

Alors, ils finissent par jouer à deux.
En même temps.

Une musique passionnée.

Bestiale et sensuelle.
Douce et mélancolique.

Une musique remplie de sentiments.

De leurs sentiments.

Puis, la main de Levi se détache.

À ce stade de décomposition, les membres n'en font qu'à leurs têtes.

La main continue de jouer du piano.

Et un rire s'échappe de la barrière des lèvres du vivant, sous le regard adoucit du mort.

Le châtain rattrape la main blanche et squelettique, et la remet à sa place sur le poignet de son époux.

Levi le laisse faire, calmé.

-"Je vous pardonne." Déclare t-il.