CHAPITRE X

26 2 0
                                    

Victor déambulait dans la petite maison de sa mère en soupirant d'ennuie, comme à son habitude. L'ennuie, il connaissait bien ça, un peu trop peut-être. Depuis le jour où il ne pouvait plus poser ses pieds sur le sol, il avait dut faire une croix sur beaucoup de ses activités et ses rêves. Il trouvait à présent sa vie triste, monotone et sans surprises.
Il s'arrêta dans la cuisine, et relut le mot que sa mère lui avait laissé : "Je reviendrai ce soir à dix-huit heures, je t'ai laissé les spaghettis. Je t'aime mon Trésor."
Le garçon ouvrit la porte du frigo et constata qu'il restait effectivement une bonne assiette de spaghettis bolognaise prête à être réchauffée. Mais Victor n'avait pas spécialement faim. Il referma le frigo et se dit qu'il mangera plus tard, quand l'envie lui prendra. Il fit rouler son fauteuil dans le couloir jusqu'à sa chambre. Il verrouille la porte par précaution, sachant que sa sœur allait bientôt finir les cours et qu'elle pourrait à tout moment faire irruption. Il n'en avait pas spécialement envie.
Sa sœur Hannah, de quatre ans son aîné, était turbulente, malpolie, bruyante et insupportable. Le parfait contraire de Victor. De plus, elle n'hésitait pas à rabâcher sans cesse ses petits discours horripilants voulant faire comprendre à son frère que Palaye Royale était "simplement de la grosse merde." Elle n'hésite pas non plus à lui faire des remarques sur sa chambre beaucoup trop étrange et laide à ses yeux. Victor aimait bien sa chambre pourtant. La pièce carré était assez vaste pour qu'il puisse se déplacer assez facilement et son lit était positionné dans l'unique enfoncement de la pièce, là où se situe la fenêtre longeant le mur. Une immense bibliothèque recouvrait la largeur du mur à droite de la porte et son bureau se situait juste en face. À gauche, plusieurs étagère et meubles de rangement, s'empilent sur une petite hauteur, permettent de ranger toute les affaires d'art du garçon ainsi que ses carnets d'écriture qui ne sont pas encore éparpillés. Et près de la porte, sa petite armoire en bois qui contient ses habits est placée dans l'ombre. Le bois sombre était vernis et les poignets en argent commençaient à rouiller à certains endroit. Il y a quelques années, une des porte maintenait un miroir qui a finit par se briser par les nombreux coups de poings d'un jeune Victor encore plus fragile qu'à l'heure actuelle. Mais Victor ne voulait plus entendre parler de cette histoire.
Le jeune adolescent s'installa sur son lit et regarda les bouts de mur qui n'étaient pas cachés par les meubles. Une dizaine de photos de Palaye Royale et de dessins en tout genre les décoraient en une bonne partie. Quand Victor pleurait, il avait prit l'habitude de regarder ces photos, et sa tristesse s'apaisait doucement, pendant quelque temps.
Le garçon laissa échapper un petit soupire en fixant une photo d'Emerson datant de deux-milles-seize. Il n'avait pas tant changé que ça comparé au chanteur. Il sentit son cœur s'accélérer puis il sursauta vivement en entendant son téléphone vibrer sous sa couette. Il avait complètement oublié qu'il était là. Il fourra son bras sous la couverture et en sortit l'appareil. Le garçon le contempla quelques secondes et le déverrouilla. Un message. Avant même qu'il puisse le lire, la sonnerie de son portable le sortit complètement de sa torpeur. Il sursauta encore une fois et décrocha en inspirant profondément.

"-Allô, baragouina Victor
-Tu pourrais faire un effort au téléphone Victor.
-Désolé maman.
-C'est un conseil mon Trésor, pour ton avenir. Enfin bref.

Le ton de parole de sa mère semblait assez sec.

-Il y a un problème maman ? Demanda le garçon en fronçant les sourcils
-Qu'est-ce qu'on avait dit Victor pour les jeudis ? Demanda-t-elle fermement
-Maman...
-Victor, qu'est-ce qu'on a dit ?
-Qu'il fallait pas que je leur parle, souffla-t-il
-Très bien, et pourquoi tu ne le fais pas ?
-C'est pas de ma faute maman, et puis comment tu sais que je leur ai parlé ?
-C'est Sebastian qui vient de me le dire. Il m'a demandé si je connaissais un garçon en fauteuil roulant.

Ses paroles étaient pleine de reproches et Victor le sentait. Sa main se mit à trembler.

-Que ça soit clair Victor, je ne veux plus que tu traîne dans les couloirs quand ils viennent, dit sèchement sa mère
-J'irai où alors ? Fit Victor en soupirant à moitié de tristesse
-Ne me parle pas comme ça.

Le garçon ne dit rien.

-Tu restera du côté de l'appartement, je ne veux pas te voir à nouveau traîner du côté du hall."

Sa mère avait déjà raccroché avant même qu'il ne commence à répondre quoi que ce soit. Victor remit son téléphone sous sa couette. Ses bras tremblaient et il jouait nerveusement avec ses mains tout en mordant furieusement sa lèvre inférieur déjà bien abîmée par d'autres marques de ses dents.
Il détestait ce ton. Il n'aimait pas sa mère quand elle est dans son rôle de psychologue, il la trouve hautaine et presque inhumaine.
L'empêcher de retrouver Sebastian alors qu'ils avaient prévus (plus ou moins) de se revoir, il en était hors de question. Ses mains se mirent à trembler de plus belles et ses yeux commençaient à s'humidifier. Dans la tête du garçon, d'innombrables idées de vengeance lui traversaient l'esprit. Il savait que c'était inutile et qu'il allait le regretter, il laissa tomber. Il s'allongea doucement sur son lit, serrant un coussin contre son torse pour calmer ses tremblements. Victor se sentait très seul à présent. Et pourtant il avait tort.

Maladivement MortelOù les histoires vivent. Découvrez maintenant