Ce n'était que petite réflexion qui aurait pu passer inaperçue, mais ça me tracasse depuis une heure. D'accord, ça ne fait qu'une vingtaine de minutes que le cours de philo à commencé mais tout est toujours plus long en philo (voyez comme je résiste à la tentation de faire une blague de mauvais goût. Admirable.).
Je fixe mon ami, de façon un peu suspecte il est vrai, comme si la réponse à ma question allait venir de lui.
Je soupire, un peu trop bruyamment semble t'il.
— Je sais que je suis exceptionnellement beau mais ça devient gênant là.
Il a fallu qu'il me choppe.
— Prends pas tes rêves pour des réalités.
Il rit et je le rejoint.
Je sais qu'il est ouvert sur le sujet, on en rigole souvent et il défend les droits LGBT (tout le monde devrait le faire d'ailleurs) et il m'a même déjà dit qu'il serait limite content si j'étais plus garçons, comme ça il aurait son "fameux meilleur ami gay" (j'ai tellement ri ce jour là il a dû se poser des questions). Il aime un peu trop ces gens là à mon avis, au début je le suspectais de me mentir -comme moi aujourd'hui je ne peux pas le juger- mais en fait nan, c'est le gars le plus hétéro que je connaisse (hyperbole, faut pas abuser quand même), il est juste enthousiaste. Friendly.
Alors pourquoi je peux pas lui dire que je trouve que les gars c'est bien aussi ?J'ai un début de réponse, à la base j'ai un peu zappé. Si, c'est possible, j'ai gardé ça pour moi tant que j'étais pas sûr et certain, et ensuite j'ai pas trouvé d'occasion de le lui dire. Et maintenant j'en suis là, obligé de mentir à mon meilleur ami sur mon orientation sexuelle.
J'ai le droit à tous les détails de sa vie sexuelle (enfin si il en avait une, mais il me raconte quand même des trucs dont je ne voudrais jamais entendre parler) mais moi j'suis incapable de lui dire un simple:《tiens au fait j'aime les queues hihi》...
Et à cause de ça je me retrouve à le fixer, sans raison apparente pour les étrangers à mes pensées.
***
Nous sortons enfin de cet enfer de réflexion, d'ordinaire je fais un effort pour écouter et noter le cours, mais aujourd'hui je n'ai pas envie, c'était ma dernière heure de la journée (dure journée de cours qui se termine à 15h30) et j'ai eu trop matière à réfléchir depuis ce matin, entre mon avenir compromis par mon non-travail, mon orientation que je ne suis pas sûr d'assumer et cette fille qui a le pouvoir de changer mon humeur rien que par sa présence ou non, je suis contrarié.
Sérieusement, je ne l'ai pas vue depuis ce midi à la cantine et je la croise de moins en moins ces derniers jours, comme si elle me fuyait, comme si elle savait qu'elle contribuait à mon bonheur et que ça l'amusait de m'en priver. Elle est la meilleure et la pire chose qui pouvait m'arriver. C'est peut-être une sirène, elle m'attire irrésistiblement pour mieux me noyer.. L'amour est une saloperie, une belle saloperie.
Le truc, c'est que je ne suis même pas sûr d'en être amoureux, mais ça y ressemble drôlement et c'est fort agréable -seulement quand la sirène chante on est d'accord.
— J'ai eu quinze à ma dissert' sur le bonheur tu réalises ?
Oh oui que je réalise à quel point je suis minable face à toi mon ami.
— Oh tiens pareil, sauf que j'ai une virgule entre les deux chiffres, je comprends pas..
L' ironie est ma deuxième meilleure amie.
— Je t'avais dit de copier sur moi ! Pourquoi tu le fais jamais ?
— Ça sert à rien de rendre la même chose que toi, si j'suis pas noté pour mon travail alors-
— Alors autant ne rien rendre !
Je le déteste quand lui est ironique par contre.
— Je préfère ne rien faire plutôt que de le faire mal, c'est ce qu'on m'a toujours dit.
— Tes raisonnements sont nuls.
— Mes parents passent déjà leur temps à m'engueuler, tu vas pas t'y mettre s'il te plait !
— Un peu que je vais m'y mettre ! Tu vas te bouger le cul Hector !
C'est à ce moment que j'arrête de l'écouter, marre de me faire constamment engueuler. Quand il se tait, je ne réponds rien, parce que j'ai pas envie d'empirer les choses.
Je n'ai surtout pas d'arguments.Nous sortons enfin à l'air libre, et sommes accueillis par une désagréable brise de fin mars.
Voilà qu'elle me nargue encore, elle passe à côté de moi, me privant même de contact et continue sa conversation -que je devine passionnante- avec son amie.
Il semble que je ne sois pas le seul à l'avoir remarquée, car mon très cher camarade me donne un coup de coude.— Ça y est, t'as vu ta copine, maintenant t'es content ? T'arrête de bouder ? T'es déjà moche, c'est encore pire quand tu tires la tronche.
... Merci.
— Nan, elle me rend malheureux. Et parle pas si fort, on pourrait nous entendre.
— Et puis quoi encore..
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L'incroyable Histoire Barbante d'Hector Lheureux
General FictionHector Lheureux, c'est ce gars au prénom étrange qui ressemble à une blague. Hector Lheureux, c'est ce gars un peu invisible, qu'a pas beaucoup d'amis et qui n'aime pas grand monde de toute façon, qui est amoureux de plein de gens, mais déteste l'hu...