15h55. Le temps passe si vite que j'ai l'impression d'attendre ici depuis hier.
Qu'y a t'il de plus ennuyeux que de patienter pour un bus ? Bien des choses, mais en cet instant c'est le truc le plus chiant de ma journée. Mais je me console en me disant qu'une récompense m'attend dans le véhicule, ça en vaut la peine.
Mais vu que ce foutu bus n'est pas décidé à arriver dans la minute, je m'adonne à une de mes occupations favorites : regarder les gens. Pas pour me moquer d'eux ou les juger, juste pour le plaisir de mes yeux, pour observer le monde, beau monde qui m'entoure. C'est fou à quel point je peux haïr et aimer les gens en même temps.
Chance ou non pour moi, c'est l'heure de sortie de l'établissement scolaire d'à côté, d'où sort ma récompense.
Durant l'heure et demie de trajet qui va suivre, mes pensées vont se résumer à 《Que tu es belle toi !》;《Tu veux pas fermer ta gueule sale môme !》;《Waw touche encore à tes cheveux et je vais défaillir..》...
Puis je le voit, lui, le troisième et dernier rayon de soleil de ma vie. Je le vois arriver au loin, avec le même groupe d'amis que les autres fois. Aujourd'hui, c'est la septième fois que nos regards se croiseront (non je ne suis pas désespéré au point de compter tout ce que je peux en ce qui le concerne) et je m'en réjouis. C'est dans ces moments que j'aimerais avoir mon meilleur ami à mes côtés pour me chambrer comme il le fait avec la fille. Malheureusement pour moi, je dois faire mon fanboy tout seul et garder ce terrible secret pour moi même.
Cette fois, il ne m'adresse pas un regard et continue sa discussion avec ses amis. Ça parle musique aujourd'hui, comme la première fois.
Il me semble que c'était au siècle dernier, le bus était bondé et comme d'habitude, je ralais intérieurement contre ces sales mômes mal élevés qui criaient trop fort. J'avais en plus oublié mes écouteurs, c'était une bonne journée de merde pour le jeune Hector. Pour couronner le tout je ne pouvais m'adosser nulle part alors j'ai dû toucher la barre pour tenir. Malgré une centaine de douches après ça je me sens toujours aussi sale. Mais un mal pour un bien, car un très charmant garçon se tenait juste en face de moi, sa main sur la même barre, au dessus de la mienne. Par moments, sa paume glissait et touchait ma peau, au début j'ai gueulé intérieurement, puis quand j'ai vu son visage, je me suis radouci.
C'est là que j'ai réalisé que j'étais foutu.
Au bout d'un moment, il a fini par se rendre compte que nos contacts répétés pouvaient être agaçants, alors il a levé la tête vers moi (il faut dire qu'il n'était pas très haut) et m'a demandé de sa voix virile et enfantine :《Je peux mettre ma main ici ?》, ce à quoi j'ai répondu le plus naturellement du monde :《Oui bien sûr, y'a pas de problème.》.
La magie aurait pu durer, si son ami ne l'avait pas regardé de travers pour lui faire remarquer en gloussant que 《C'est un peu limite ce que tu viens de dire là》.
On s'est fixé un moment, un peu paumés. L'autre nous à fait comprendre que ça sonnait comme une phrase de harceleur de rue. C'était pas drôle mais on a ri.
C'était cocasse, et je crois que c'est quand il a essayé de se rattraper en s'excusant que j'en suis tombé amoureux.***
Fait chier. J'ai froid. J'ai faim. J'ai loupé mon putain de deuxième bus.
L'ennui avec les lignes qui passent par l'autoroute, c'est qu'à l'heure de pointe, bah c'est le bordel, donc je suis arrivé en retard pour mon changement de bus, donc je l'attend dans le froid !Le seul truc cool dans cette histoire, c'est que j'étais pas loin du métalleux (il débat sur des groupes de métal à chaque fois que je l'écoute, c'est le meilleur surnom que j'aie) et que j'ai pu en apprendre un peu plus sur lui. Rien de passionnant, mais ça occupe. Mais cette fois, il ne m'a pas jeté un dernier regard quand il est descendu -moi non plus du coup, je ne peux pas trop savoir mais je l'ai senti. Il est parti comme ça. Il m'a délibérément ignoré.
Tant pis pour lui, il sait pas ce qu'il rate avec moi. Je m'en remettrai.Je peux toujours le remplacer par la fille.
Enfin bref, il me tarde de rentrer chez moi pour noyer ma peine dans le chocolat et le jus d'orange, continuer ma série et surtout, retrouver mon lit pour m'imaginer toute la nuit des scénarii géniaux qui n'arriveront jamais.
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L'incroyable Histoire Barbante d'Hector Lheureux
General FictionHector Lheureux, c'est ce gars au prénom étrange qui ressemble à une blague. Hector Lheureux, c'est ce gars un peu invisible, qu'a pas beaucoup d'amis et qui n'aime pas grand monde de toute façon, qui est amoureux de plein de gens, mais déteste l'hu...