L'incroyable Histoire Barbante d'Hector Lheureux

Partie Sept

— Qu'est ce que tu fais, range ton cahier tu vas te faire engueuler pour rien !

Je regarde mon ami lassement. Depuis quand sortir des affaires avant le début du cours est mal ?

— Tu comptes quand même pas tricher au premier rang ?

Oh fichtre, le contrôle. Je l'avais oublié celui là. Bon, je range mes affaires, quelque peu dépité, et commence à réfléchir à ce que je pourrais bien faire de mes deux prochaines heures, parce que je vais pas écrire une ligne sur ce contrôle soyons honnêtes.

Je lance un regard désespéré à mon meilleur ami qui me répond par un haussement d'épaule condescendant pendant que la prof nous distribue les sujets.

J'ai même pas envie de le lire. A quoi bon me prendre la tête pendant deux heures pour me taper un huit à la fin ? Au moins en ne faisant rien le ratio production/résultat est plus que correct et j'ai pas de mauvaise surprise.

J'ai jamais dit que ma façon de penser était la bonne non plus.

***

Ceci étant fait, je n'attends personne et cours vers la cantine réserver une place à mon groupe d'amis. Deux heures à fixer un coin de la pièce en silence suivies d'une heure à fixer un autre coin de la pièce avec cette fois la prof qui donne le cours, ça creuse contrairement à ce qu'on pourrait penser.

— Hector attends moi !

Mon fidèle ami, toujours là dans les pires moments, arrive me sauver de l'ennui qui m'attendait dans la file pour entrer dans le réfectoire.

— Si tu me parles de ce contrôle j'te promets que je te piquerai avec ma fourchette jusqu'à ce que mort s'en suive.

— Ouh là, princesse est de mauvaise humeur ! De toute façon j'suis trop content aujourd'hui pour t'engueuler.

— Fort bien, parlons de ton bonheur alors.

Avant même qu'il ne puisse répondre, nos amis nous appellent à l'extérieur de la file nous demandant de leur garder une table.
Je croise par hasard le regard de Machin (une bien sombre histoire qu'est l'attribution de ce surnom) et me souviens soudainement qu'il a quelque chose à me dire.
Je me tourne vers mon meilleur ami :

— Je veux Machin à côté de moi.

L'autre andouille me fait une mine offensée et porte sa main à son coeur avec une exclamation grotesque.

— Je suis jaloux. C'est par rapport aux messages que je t'ai envoyé hier j'imagine ?

— Perspicace.

Il regarde dans le vide d'un faux air mystérieux.

— E.

— Pardon ?

— E. Son prénom se termine par un e.

Incroyable.

— Waw comme pour quatre-vingt-dix pour cents des prénoms français, ça m'avance tellement ! Pourquoi vous voulez pas me le donner directement ?

Il fait mine de réfléchir.

— Parce que c'est marrant de te voir galérer !

Des "potes" hein..

— Bon causons d'autre chose deux secondes, sérieusement, j'aimerais pas être dans ta tête ça doit être un bordel dans lequel le visage de cette fille rebondit dans tous les sens dans le vide de ta caboche !

Oh, je m'imaginais exactement la même chose.

— C'est à peu près ça ouais.

***

Enfin. Il est quinze heures vingt-huit à ma montre.
Nous sommes à la récré de l'après midi.
C'est le moment.
C'est maintenant.
Elle est seule.
Je dois y aller.
Lui déclarer ma flamme.
Elle m'attend.
C'est ma chance.
Allez j'y vais.
J'inspire.
J'expire.
Je révise mon texte.
C'est tellement parfait.
Allez zou, je me lance- aaaah et voilà qu'elle est rejointe par ses amis, flûte mon plan tombe à l'eau.

— Tu m'écoute ?

— Nan.

Mon meilleur ami soupire et me donne une tape derrière la tête.

— Allez on doit sortir avant que la grille ferme.

Personne ne me privera de mes quinze minutes quotidiennes de mon aimée.

— Vas-y, je reste encore un peu avec Gigi.

— Gigi ?

— Tu m'a toujours pas dit son nom.

— Ah oui, bon à demain alors !

Je lui fais honneur de mon plus long doigt et il s'en va en souriant.
Pas grave, j'ai pas besoin de son nom pour continuer à l'aimer.
N'empêche que ce serait plus pratique..

Je pourrais aller directement lui demander, mais non, je préfère rester dans l'ignorance plutôt que de l'affronter.
On ne dirait pas comme ça mais je suis timide hein !

Ma vie est si triste..