Chapitre 13 : Le rêve d'Ayumi

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9 ans et 6 mois auparavant.

Île Kumo. Village Nôgyo.

Akemi Saëto porta une tasse à sa bouche et trempa ses lèvres dans le thé brûlant. Elle jeta un œil désespéré par la fenêtre, espérant apercevoir avec une once d'espoir la silhouette chétive de sa fille. Malheureusement, et comme chaque matin, elle ne la vit pas et se dit une nouvelle fois avec peine qu'elle ne devait plus être de ce monde.

Abaissant son visage en direction de la table, Akemi laissa une larme dévaler sa joue. Elle avait déjà perdu son compagnon et voilà que sa fille ne reviendrait plus, elle aussi. Tous deux lui avaient été volé par l'océan et la piraterie.

Avec un pincement au cœur, elle repensa à Sken. Lorsqu'elle l'avait vu pour la première, elle avait su qu'il serait le père de ses enfants. Sken avait une allure nonchalante, des cheveux roux foncés tirés en arrière, légèrement décoiffés et des yeux noisettes. Elle avait bien remarqué qu'il était attaché à la piraterie, mais pourtant elle l'avait aimé de tout son cœur et avait profondément espérer fonder une famille avec lui. Lorsqu'Ayumi était née, Sken s'était trouvé distant. Il retournait parfois en mer avec son équipage, revenant souvent au bout de plusieurs semaines. Akemi s'était quasiment occupée toute seule de sa fille. Lorsque Sken revenait de ses périples, il songeait déjà à repartir et consacrait peu de temps à Ayumi qui, pourtant, cherchait fortement son attention et sa fierté.

Le jour où il lui avait annoncé qu'il partait décidément en mer avait été un moment déchirant. Akemi lui avait pourtant imploré de rester à Nogyo, au moins pour sa fille qui n'était âgée que de cinq ans. Il lui avait ensuite dit : « La piraterie est plus importante ! » d'un ton sec et cela lui avait brisé le cœur.

Un torrent de larmes se mit à courir sur ses pommettes et elle se mit à hoqueter. L'espoir l'avait quitté depuis qu'Ayumi n'était plus à ses cotés. Qu'allait-elle bien pouvoir faire à présent qu'elle était seule ? Elle ne se consacrait même plus à son travail, jugeant que les plats qu'elle cuisinait avec tristesse avaient un goût fade. Elle ne mettait plus de cœur à malaxer des pâtes sablées, à mijoter des soupes ou à tremper son doigt délicat dans les sauces pour apprécier le soupçon d'aliment qu'il manquait. Elle elle ne sortait plus non plus et sa famille s'en inquiétait.

Dans un ultime espoir, Akemi regarda de nouveau par la fenêtre.

Son cœur rata soudain un battement.

Une silhouette de petite fille accompagnée d'une seconde, adulte et masculine, se dirigeait vers sa demeure. Elle secoua son visage, persuadée que son esprit fatigué lui jouait un mauvais tour, puis se frotta les yeux. Elle lança un dernier coup d'œil, puis elle sentit son pouls s'accélérer : ce qu'elle voyait était bien réel.

Dans un élan de bonheur, Akemi lâcha sa tasse, repoussa sa chaise avec violence et se rua dehors. Elle courut comme si le diable était à ses trousses, comme si on allait de nouveau lui arracher sa fille. Cette fois, elle ne la laisserait plus la quitter ! Ses jambes la portèrent jusqu'à la fillette et, sans la regarder, elle la prit dans ses bras, pleurant toute les larmes de son corps.

« Ayumi-Chan ! Ayumi-Chan ! » sanglota-t-elle.

Elle reconnut la chaleur du corps de sa fille. Puis, après un long moment, elle relâcha doucement son étreinte pour enfin l'observer.

Ayumi était maigre. Ses cheveux mi-longs étaient emmêlés et collés, son visage était sale, poisseux et elle dégageait une forte odeur de poubelle. Elle ruisselait de larme et Akemi pu lire dans son regard qu'elle était désolée de tout ce qui était arrivé et qu'elle s'en sentait coupable. Avec tendresse, elle lui caressa le visage, lui signifiant que cette mauvaise aventure était terminée et qu'elle était désormais à la maison.

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