Installée devant une rangée d'eprouvettes remplies à différents échelons, Camille prenait un soin consciencieux pour prélever quelques millilitres de précieux liquides à analyser.
Vêtue d'une longue blouse blanche, la chercheuse était assise sur un tabouret monté sur roulettes.
Après chaque prélèvement qu'elle déversait dans un fin recipient ovale, elle inscrivait une série de chiffres au-dessus du couvercle qu'elle reportait ensuite sur un calepin épais.
Elle renouvela le processus une bonne dizaine de fois.
Le téléphone qu'elle avait dans l'une de ses poches se mit à sonner. Cela ne l'a déstabilisa pas le moindre du monde. Concentrée sur ses gestes répétés, elle ne pouvait se permettre d'arrêter son importante entreprise. L'appel prit fin et resta sans réponse. Le calme ambiant régna à nouveau.
Seule au milieu de la grande salle stérile, Camille ne se doutait pas qu'il était déjà plus de 20h00 passées. La pièce était sans fenêtres et ne donnait donc aucun indice sur la luminosité extérieure, le cycle du jour. La lumière blanche qui l'eclairait était comme cet endroit : incolore et stérile.
Les yeux rougis par la fatigue trahissèrent cependant la grosse journée qu'elle venait de passer dans ce sous-sol de laboratoire.
Le téléphone sonna à nouveau.
Soupirant, la femme dont les cheveux grisonnants dépassaient légèrement de sa toque plate, mit un point final à sa dernière annotation.
Elle attrapa l'appareil dont la mélodie frénétique l'insupportait déjà.
- Camille Birmon, j'écoute ? répondit-elle d'un ton sec.
- Camille, Dieu merci, vous êtes encore sur place ! Ici le professeur Standfield.
- Oh, professeur. Bonsoir. Comment allez-vous ? reprit-elle plus aimablement.
- Bien, bien. Enfin, mieux quand j'aurais la réponse à la question qui me turlupine depuis ces dix dernières minutes...
- Oui ?
- Avons-nous envoyé nos derniers résultats à Barcelone ?
- Ceux de la semaine passée ?
- Ceux-là même... Alo ? Vous êtes toujours là ?
Après un léger temps d'hésitation, Camille reprit gênée en se balançant de gauche à droite du haut de son tabouret mobile.
- Je n'ai pas fini de taper le compte rendu pour être honnête... J'ai été débordée ces derniers jours et...
- Parfait ! coupa-t-il d'un air soulagé.
- Vraiment ? s'étonna l'analyste qui se figea sur sa place.
- Birmon, écoutez-moi bien. C'est très important. Il faut que vous détruisiez tous nos résultats et n'en laissiez aucune trace. C'est capital.
- Professeur ?
- Je compte sur vous. Je vous fais confiance depuis tant d'années et je vous demande à votre tour de me porter cette même confiance Camille.
- Mais... Que... Que dois-je comprendre ? balbutia-t-elle d'une voix chevretante.
- Ne vous torturez pas l'esprit, s'il vous plaît. Nous devons tout reprendre depuis le départ mais avant, il faut que vous passiez tout au crematorium du centre. Dossiers papiers, échantillons... J'ai commencé à supprimer tout ce qu'il y a sur notre gestionnaire de données informatiques. Je vais en avoir pour toute la nuit et de là où je suis je ne peux pas gérer le labo.
- Mais où êtes-vous donc ?
- En Argentine... Non loin du glacier Perito Moreno. Il y a foule d'échantillons à ramener. Vous et votre équipe avez du travail qui vous attend.
- Je vois. Et vous serez en France dans combien de temps ?
- Je ne sais pas exactement. Je vous informerais le moment venu. En attendant, s'il vous plaît... Le plus urgent. Le dossier GC6. Détruisez-le !
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Immersion en nos troubles
Mystery / ThrillerÀ notre époque où tout avance à cent à l'heure, où la consommation de toute chose prend une place prépondérante tant au niveau matériel qu'affectif, où le superflu et le superficiel s'allient aisément, il n'y a plus de permission pour l'authentique...
