Musca

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J'avais tué quelqu'un.

J'en étais certaine. 

Ou presque.

 Mais la coïncidence aurait été trop grande. Je considérai le journal que j'avais en main et sentis mon rythme cardiaque s'accélérer. Mes yeux parcoururent à nouveau le titre de l'article. "Faits divers : Attaque d'animal sauvage à Riverside ; deux morts à déplorer". Je resserrai ma prise sur mon bureau et entendis le bois craquer. Mon cœur battait si vite que j'avais l'impression qu'il voulait sortir de ma poitrine. Je relus l'article pour la sixième fois. Je ne pouvais m'en empêcher, les mots sur cette feuille de papier étaient l'unique chose stable autour de moi. La pièce tanguait tellement que j'étais étonnée de toujours tenir sur mes pieds. Un homme de 43 ans et sa fille de 22 ans étaient morts trois jours plus tôt. Tués par un animal sauvage d'après la presse. Un puma, un coyote, la police n'en savait rien. Le loup et le grizzli avaient aussi été envisagés même s'il n'y en avait pas dans cet état. 

Mais j'étais bien placée pour savoir qu'une attaque  "d'animal sauvage" pouvait bien représenter une attaque de loups-garou ou n'importe quelle autre joyeuseté du même acabit. 

Et j'étais à Riverside à ce moment-là. La nuit où je m'étais retrouvée sur le parking du fast-food, sans me rappeler ce qu'il s'était passé. Rien du tout. Et ce n'était pas revenu depuis. C'était bien pire qu'un trou noir provoqué par un abus d'alcool. 

 Ce fut uniquement quand mes griffes passèrent à travers le journal que je remarquais mon contrôle vacillant. Je fermai les yeux pour tenter de me calmer. Ma respiration s'emballait et le sang pulsait à mes oreilles.  Ce n'était pas une perte de contrôle. C'était... une crise de panique ? Sérieusement ?

 Je serrai encore plus mon bureau et mes griffes raclèrent contre le bois.

 -C'est la nuit des frasques au lycée, je sais que t'as dit que tu... Alice ?

 Je ne relevai même pas la tête vers Scott en entendant la note inquiète perçant dans sa voix lorsqu'il avait prononcé mon prénom.

 -J'arrive... j'arrive pas à respirer, haletai-je.

 L'instant suivant, je sentis le bras de Scott s'enrouler autour de ma taille. Il me plaqua contre son torse en posant une main sur ma poitrine qui montait et descendait beaucoup trop vite.

 -Chuuuut. Calme-toi. Tu te souviens ce qu'on faisait quand on était petits ?

 J'hochai frénétiquement la tête. Scott tendit le bras devant nous en désignant ma bibliothèque.

 -Allez, compte avec moi les livres sur l'étagère du haut. 1... 2...

 -3... 4... 5...

Tandis que nous continuions à compter les livres, je m'obligeai à caler ma respiration sur les nombres paires. Une inspiration sur le 2 ; une expiration sur le 4. Nous dûmes arriver jusqu'à 26 pour que mon cœur reprenne un semblant de rythme normal et que j'arrête de trembler. Je repoussai mon frère avant de lui offrir un sourire vacillant.

 -Merci... Je pensais pas que j'aurais encore des crises de panique. Pour un loup-garou, c'est bizarre.

Pathétique, même.

 Il pencha la tête.

 -Ca m'est arrivé aussi. Ma première pleine lune. Stiles m'a donné mon inhalateur ce qui m'a fait croire que c'était une crise d'asthme ce qui a stoppé la crise de panique. Enfin d'après lui.

 Je secouai la tête en pouffant légèrement.

 -Stiles et ses plans foireux... En parlant de plans foireux, j'en conclus que vous allez à la nuit des frasques ?

Alice au Pays des Loups-Garou IIIOù les histoires vivent. Découvrez maintenant