La Décadence des Flamants - Tome 5

Chapitre 24 : Pertes

– Cole –

Vendredi matin. Une migraine atroce me prenait et j'avais le choix entre abuser de l'aspirine ou de l'alcool. L'un n'était pas forcément plus sain que l'autre.

En jetant un bref regard sur mon portable, je vis qu'il était assez tard et que si je tenais absolument à me rendre à mon rendez-vous avec Kavalieris, il fallait que je me dépêche, mais je n'y tenais pas vraiment. En fait, une autre idée me traversait l'esprit.

Je me contentai d'une tasse de café, assez dégueulasse, comme toujours, et me dirigeai vers la porte, prêt à partir, du moins, jusqu'à ce qu'Asra m'interrompe.

— Tu n'es pas censé partir plus tôt d'habitude ? demanda-t-elle, assez inquiète.

— C'est pour ça que je dois partir maintenant, prétendis-je.

Alors que je posai ma main sur la poignée, elle m'arrêta de nouveau :

— C'est moi où tu es dans un état assez... étrange ?

— La situation l'est aussi. Mais tout va bien.

Mes mensonges étaient de plus en plus aberrants, tellement que je pus à peine la regarder dans les yeux et partis précipitamment. Je n'avais même pas cherché à savoir si Heather m'avait vu dormir dans le canapé, je savais quelles conclusions elle en tirerait. Elle me connaissait trop bien pour passer à côté de ça... Pourtant, même si je savais que c'était mal ce que je faisais, je n'arrivais pas à éviter ça. Comme toujours, c'était au-dessus de moi.

*

J'étais perdu. Totalement perdu. D'un côté, Kavalieris s'inquiétait de mon absence et m'avait laissé un message stipulant que c'était important que je vienne à toutes les séances, en particulier en ce moment. Pour l'instant, je n'avais aucune nouvelle de Heather. Tant mieux ? Et de l'autre côté, j'avais eu une envie assez morbide mais qui était nécessaire.

Au courant de cette semaine, Lyne avait été enterrée et je ne m'étais pas senti capable d'y aller. D'après les dires, peu de personnes avaient été présentes. En même temps, tout le monde la considérait comme le mal incarné. Mais je n'avais pas la même notion que tout le monde du mal, sûrement ce pourquoi j'avais décidé de me rendre sur sa tombe.

Je dus faire un détour chez un fleuriste, refusant de venir les mains vides. Je déambulai dans les rayons en espérant trouver ce qui conviendrait le mieux, et je me rendais compte que je n'y connaissais vraiment rien en fleurs. D'habitude, je demandais toujours au vendeur ou prenais des roses. J'avais toujours eu à offrir des fleurs pour des femmes dans le but de les séduire. Des roses et des bijoux avaient toujours fait l'affaire. Cette fois-ci, c'était différent et même demander l'avis d'un vendeur me semblait déstabilisant. Alors je me contentai de regarder les différentes fleurs en espérant trouver de moi-même. Du moins, c'était ce qui était prévu jusqu'à ce qu'un vendeur s'approche de moi, quelques fleurs en main.

— Je vois quelqu'un qui ne sait pas quoi choisir. Serait-ce pour une femme ?

Je me tournai vers lui. Il était assez jeune, il devait sûrement travailler à mi-temps pour payer ses études.

— En quelque sorte. Enfin, c'est compliqué... C'est quelqu'un de la famille... qui est partie...

Il lâcha un petit "oh", ayant compris mon fort sous-entendu. Puis je baissai mon regard, observant les fleurs qu'il tenait en main. Celles-ci étaient bleues, en forme d'étoile aux cinq pétales assez fines.

— Ce sont des amsonias, lança-t-il en voyant mon intérêt. Elles pourraient très bien faire l'affaire...

— Ce sont de très belles fleurs, même si elles ont une signification assez sombre.