Le soleil paraissait déjà bien loin de l'horizon à présent. Seuls les lampadaires placés le long des rails éclairaient avec discontinuité les wagons du métro qui se glissaient dans le froid en silence. Elle n'avait pas su lui dire non. Comment refuser quoi que ce soit à ces yeux pétillants de supplication ? C'était tout bonnement impossible. Comment décliner l'invitation d'une personne qu'elle avait blessé ? Ne lui était-elle pas redevable après tout ?
Enfin, peu importait les raisons pour lesquelles elle n'avait su s'empêcher d'accepter, le fait était qu'à présent, elle se laissait traîner de station en station en espérant que par miracle, le temps s'accélère et lui épargne les trois prochaines heures de sa vie. Heureusement, elle s'estimait heureuse de trouver à ses pieds un compagnon dans sa torture personnelle. Profitant de cette sortie pour enfin emmener son cher Muchi en balade, elle s'était rassurée en se persuadant qu'ainsi, avec lui, elle ne ferait pas face seule au bavard blond qui n'avait, par ailleurs, laissé aucune chance au silence depuis leur départ. Était-il si heureux d'avoir quelqu'un à ses côtés pour contempler les étoiles ? Fuyait-il donc la solitude autant que la brune, elle, évitait les relations sociales ? Si tel était le cas, jamais elle n'aurait pu comprendre son enthousiasme.
Mais afin de se réconforter, Sana se plaisait à se persuader que lui aussi, était nerveux. Qu'il laissait échapper son anxiété par les mots au lieu du silence. Ainsi, elle pouvait voir en lui quelqu'un de moins étrange à ses yeux que ce qu'il ne laissait transparaître. Un faux-semblant de compréhension, voilà ce qu'elle avait trouvé.
Après plusieurs minutes de trajet, Hideyoshi se décida enfin à les faire descendre du train. Posté un peu en périphérie de la ville, les lieux étaient calmes, loin des embouteillages et brouhaha des avenues du centre-ville. La route était éclairée, mais les alentours étaient parfois plongés dans les ténèbres et plus ils avançaient, plus ces zones obscures se faisaient nombreuses. Où diable le blond souhaitait-il les emmener ? La jeune fille sentit soudainement son cœur s'arrêter. Et s'il avait prévu de l'emmener loin de tout pour s'en prendre à elle ? Après tout, elle ne le connaissait que très peu. Peut-être avait-il tout prévu. Peut-être les étoiles n'étaient-elles qu'un prétexte pour l'éloigner de ses proches. Sa nervosité s'expliquait alors autrement. Les assassins devaient bien être angoissés avant chacun de leurs méfaits, pas vrai ?
Mais si cela devait se terminer ainsi, serait-ce si pire ?
Serrant davantage la laisse de Muchi qu'elle agrippait dans sa main droite à chaque pas, elle s'enfonça dans ses films la boule au ventre. Elle paniquait. Elle paniquait alors que son pauvre camarade, lui, faisait tout pour la mettre à l'aise. Son cerveau n'étant décidément pas capable de comprendre ceux qu'il ne connaissait pas, il préférait considérer tout inconnu comme un danger immédiat. Quelle idiotie. Mais à force d'avancer dans la nuit, les voilà qui arrivaient au point d'observation : les abords d'une rivière.
Au clair de Lune, les berges baignaient dans une lumière silencieuse. Le lieu dégageait quelque chose de reposant. Tapissait d'une pelouse endormie par l'hiver, il offrait un endroit convivial où, il en était certain, bon nombre venaient passer du bon temps dès les premiers beaux jours. Les roseaux, les pieds dans l'eau, gardaient la tête haute et dansaient sous la bise, laissant le fleuve à l'abri des regards. Si l'on se permettait de descendre près du lit, l'on n'entendrait du courant, que des clapotis irréguliers. Oui, ce lieu avait définitivement ce je ne sais quoi d'apaisant. Tant et si bien que la brune en oublia aussitôt toutes ses angoisses.
Ils se trouvaient à l'écart des lumières de la ville, peut-être était-ce bien là, l'endroit idéal pour observer les étoiles. Si ce n'était pas pour la kidnapper alors, Hideyoshi avait bien choisi, il fallait le reconnaître. Pour autant, ce qui retint l'attention de la jeune fille ne fut ni le ciel ni la chanson de l'eau non loin. Non, ses yeux d'océan s'étaient plutôt attardés sur un arbre dénudé. Majestueux il tendait ses branches en direction des étoiles comme s'il avait souhaité à un instant les caresser. Mais bien qu'avec grandeur il se dressait là, jamais il n'aurait pu atteindre les constellations. Au lieu de ça, les lumières de la nuit offrait à son branchage, un habit de lumière qu'il n'avait rien à envier aux plus beaux sapins de Noël. Entourant son tronc, un coupe-vent en osier semblait vouloir lui tenir chaud.
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Le Nom qu'Elle m'a Donné [Tokyo Ghoul]
Fanfic__________________ Je pense que du plus loin que remontent mes souvenirs, je n'ai jamais été seule. Oh bien sûr, le sentiment de solitude m'a touché parfois... plusieurs fois même, mais aujourd'hui je comprends. Je comprends que peu importe si tout...